Nettoyage ethnique des Géorgiens en Ossétie du Sud

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Réfugiés géorgiens d'Ossétie du Sud à Tbilissi le 10 août 2008.

Le nettoyage ethnique des Géorgiens en Ossétie du Sud est l'expulsion massive des Géorgiens menée en Ossétie du Sud et dans d'autres territoires occupés par les forces russes et sud-ossètes[1],[2],[3],[4],[5],[6],[7], menée pendant et après la guerre russo-géorgienne de 2008[8]. Au total, au moins 20 000 Géorgiens sont déplacés de force depuis l'Ossétie du Sud[9].

La conclusion d'Human Rights Watch démontre que les « forces sud-ossètes cherchent à nettoyer ethniquement » les zones peuplées de Géorgiens[10]. En 2009, les résolutions de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe condamnent « le nettoyage ethnique et les autres violations des droits de l'homme en Ossétie du Sud, ainsi que l'incapacité de la Russie et des autorités de facto à mettre un terme à ces pratiques et à traduire leurs auteurs en justice »[11]. Selon le rapport de septembre 2009 de la mission d'enquête internationale indépendante sur le conflit en Géorgie, parrainée par l'Union européenne, « plusieurs éléments permettent de conclure qu'un nettoyage ethnique a été mené contre les Géorgiens de souche en Ossétie du Sud pendant et après le conflit d'août 2008 »[12].

Sur les 192 000 personnes déportées pendant la guerre de 2008, 127 000 sont déplacées en Géorgie proprement dite, 30 000 en Ossétie du Sud et 35 000 autres ont fui vers l'Ossétie du Nord[13]. Selon le recensement de 2016 mené par les autorités sud-ossètes, 3 966 Géorgiens de souche sont restés sur le territoire séparatiste, constituant 7% de la population totale de la région de 53 532 habitants[14].

Guerre d'Ossétie du Sud de 1991–92[modifier | modifier le code]

Entre 1989 et 1992, des combats éclatent dans l'oblast autonome d'Ossétie du Sud et en Géorgie proprement dite entre les troupes paramilitaires de souche ossète et les unités et paramilitaires du ministère de l'Intérieur géorgien (MVD). L'Ossétie du Sud déclare son indépendance de la Géorgie. À son tour, la Géorgie abolit le statut d'autonomie de l'Ossétie du Sud, qui existe depuis les premières années soviétiques. Le gouvernement géorgien, dirigé par le président Zviad Gamsakhourdia, répond en envoyant des unités de l'armée et des paramilitaires, pour tenter de rétablir son contrôle sur la région.

Dans la nuit du 5 janvier 1991, 6 000 Géorgiens armés entrent à Tskhinvali. Après de violents combats de rue, les forces géorgiennes sont repoussées et chassées de Tshkinvali par les troupes sud-ossètes[15].

À la suite de la guerre, environ 100 000 Ossètes de souche ont fui l'OA d'Ossétie du Sud et la Géorgie proprement dite, et 23 000 Géorgiens de souche ont fui l'OA d'Ossétie du Sud vers des zones ethniquement géorgiennes. 100 villages auraient été détruits en Ossétie du Sud. De plus, la frontière entre l'Ossétie du Nord et la Géorgie devint largement incontrôlée, offrant un point d'accès presque sans entrave pour les armes, les combattants et les munitions dans les deux sens[16].

Un député du Soviet suprême d'Ossétie du Nord explique : « Lorsque la guerre a commencé en Ossétie du Sud (Géorgie), nous nous sommes retrouvés avec des milliers de réfugiés... Naturellement, ces réfugiés ossètes d'Ossétie du Sud et de Géorgie qui ont fui ici voulaient expulser les Géorgiens à la place. 15 000 Géorgiens vivent ici, rien qu'à Vladikavkaz... Nous avons arrêté cela ; personne ne s'est enfui »[16].

Position sud-ossète[modifier | modifier le code]

La politique de nettoyage ethnique a également été affirmée par le président de l'Ossétie du Sud, Edouard Kokoïty, qui dans son interview du 15 août 2008 accordée à la publication russe Kommersant, sur la question « Les civils géorgiens seront-ils autorisés à rentrer ? donne la réponse suivante : « Nous n'avons plus l'intention de laisser entrer qui que ce soit ici »[17].

The Economist cite également un officier du renseignement sud-ossète comme suit : « Nous avons brûlé ces maisons. Nous voulons nous assurer qu'ils [les Géorgiens] ne pourront pas revenir, car s'ils reviennent, ce sera à nouveau une enclave géorgienne et cela ne devra pas arriver »[18].

Tribunaux internationaux[modifier | modifier le code]

Le 21 janvier 2021, l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) reconnait les forces russes et sud-ossètes coupables d'avoir empêché le retour de milliers de Géorgiens déplacés de force sur leur territoire en Ossétie du Sud[19],[20],[21].

La Cour pénale internationale conclut son enquête sur la situation en Géorgie en décembre 2022, délivrant des mandats d'arrêt contre trois responsables de facto sud-ossètes soupçonnés d'être responsables de crimes de guerre commis pendant la guerre de 2008 — Mikhaïl Mindzaev, Gamlet Gouchmazov et David Sanakoev, occupant les postes de ministre de l'intérieur, chef d'un centre de détention à Tskhinvali et représentant présidentiel pour les droits de l'homme d'Ossétie du Sud, à cette période. Le quatrième suspect, le général russe Viatcheslav Borissov, n'a pas été inculpé car il est décédé en 2021[22].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. « August 28, 2008 Article: Georgia warns of ethnic cleansing in South Ossetia. AP via highbeam » [archive du ] (consulté le )
  2. "South Ossetia one year on: Georgians wait in fear for Russians to return" telegraph.co.uk 01 August 2009 Link retrieved 16 August 2009
  3. Mikheil (Counsellor, Embassy of Georgia, Amman) Patashuri, « A few more facts », Jordan Times,‎ (lire en ligne, consulté le )
  4. "Report by the Government of Georgia on the aggression by the Russian Federation against Georgia " georgiandaily.com 7 August 2009 Link retrieved 16 August 2009
  5. "Saakashvili Calls for Unity on War Anniversary" civil.ge 7 August 2009 Link retrieved 16 August 2009
  6. "Another War: Who Is It Good For? " georgiandaily.com 7 August 2009 Link retrieved 16 August 2009
  7. Kim Sengupta et Shaun Walker, « Georgians tell of ethnic cleansing », The Independent,‎ (lire en ligne [archive du ], consulté le )
  8. « Ethnic Cleansing Continues in South Ossetian Conflict Zone in Georgia - Den norske Helsingforskomité » [archive du ], (consulté le )
  9. « South Ossetia: The Burden of Recognition - Europe Report N°205 », International Crisis Group, (consulté le ), i
  10. The Human Rights Watch (January 23, 2009), Up in Flames: Humanitarian Law Violations and Civilian Victims in the Conflict over South Ossetia, pp. 3, 10, 125, 131. (ISBN 1-56432-428-1)
  11. Resolution 1647 (2009) and Resolution 1683 (2009). PACE. Retrieved on October 18, 2009
  12. IIFFMCG report, vol. II, ch. 7, pp. 389-394. IIFFMCG website. Retrieved on September 30, 2009
  13. « Revised UN estimates show 192,000 uprooted during Georgia conflict », UN News,‎ (lire en ligne, consulté le )
  14. « South Ossetian Authorities Release Results of 1st Census in 26 Years », (consulté le )
  15. Cristopher Zürcher, Understanding civil war: evidence and analysis, Volume 2, The World Bank, (ISBN 978-0-8213-6049-1, lire en ligne), « Civil Wars in the Caucasus »
  16. a et b RUSSIA THE INGUSH-OSSETIAN CONFLICT IN THE PRIGORODNYI REGION hrw.org May 1996 Link accessed 18-08-2009
  17. « (Russian) Eduard Kokoity: We have practically razed to the ground everything », Kommersant, (consulté le )
  18. « Ethnic Cleansing of Georgians Resulted from Russian Invasion and Occupation since August 8, 2008 » [doc], Office of the High Commissioner on Human Rights (consulté le )
  19. Luke Harding, « Russia committed human rights violation in Georgia war, ECHR rules »,
  20. « Court Condemns Russia for Violating Human Rights After 2008 Georgia War », (consulté le )
  21. « European court: Russia must answer for abuses in 2008 Georgia war »,
  22. (en) « Situation in Georgia: ICC Pre-Trial Chamber delivers three arrest warrants », International Criminal Court,‎ (lire en ligne)