Étude d'impact

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Une étude d'impact est une étude technique qui vise à apprécier les conséquences de toutes natures, notamment environnementales d'un projet pour tenter d'en limiter, atténuer ou compenser les impacts négatifs.

Diagramme présentant quelques mots-clé et les relations et interrelations entre 3 modes de compensation d'impacts écologiques, tels que devant ou pouvant être compensés suite aux études d'impacts

Étude d'impacts environnementaux

Origine et description

La prise de conscience dans les années 1970 de la nécessité[1] de limiter les dommages à la nature s’est concrétisée par des lois obligeant à réduire les nuisances et pollutions, et à atténuer les impacts des grands projets (ou de projets dépassant un certain coût). Pour ce faire, des « Études d'impact environnemental » (EIE) sont devenues obligatoires préalablement à la réalisation d'aménagements ou d'ouvrages qui, par l'importance de leurs dimensions ou leurs incidences sur le milieu naturel, pourraient porter atteinte à ce dernier.

La portée des études d'impact a été souvent renforcée par :

La loi Voynet en France invite les élus et porteurs de projets a mieux cerner les liens entre enjeux écologiques et socioéconomiques (cf. cohérence territoriale spécificité des enjeux..).

Les EIE ont cependant été insuffisantes pour enrayer la régression de la biodiversité[2].

Les EIE étudient et comparent les impacts écologiques (et donc faunistiques, floristiques, fongiques, éco-paysagers), acoustiques, paysagers, depuis le stade du chantier jusqu'au stade de la déconstruction.

Ces études doivent comparer et évaluer les avantages et inconvénients d'une solution retenue et d'alternatives ayant fait l'objet d'une évaluation affinée. Elles proposent des mesures conservatoires et/ou compensatoires pour atténuer les effets du projet, avec ou sans enquêtes publiques. Ces mesures sont cependant rarement suffisantes, par exemple pour réparer les effets de coupure écologique des routes, voies ferrées, canaux.

Limites et difficultés

Les études d’impacts sont financées par le pétitionnaire, et elles ne sont obligatoires qu'à partir d'un seuil financier ou pour certains projets (installations classées, grands projets..), alors qu’une somme de nombreux petits projets apparemment anodins peuvent générer des impacts environnementaux, sociaux et sanitaires encore plus importants, voire majeurs qu'un grand projet très coûteux. Un remembrement fait en France l’objet d’une étude d’impact, mais la somme des impacts de l’agriculture qui occupe généralement de 20 à 75 % du paysage des régions n’est pas étudié, pas plus que celui de l’urbanisme courant. Les effets indirects et différés dans l'espace et dans le temps d'un projet ne sont généralement pas étudiés.

Un des constats des bilans des lois de 1976 dressés en 1996 (par France Nature Environnement notamment) puis en 2006 par le Ministère de l'Écologie et du Développement Durable en France est que si elles ont permis de réels progrès dans certains domaines, elles n'ont pas suffi à enrayer la dégradation globale de l'Environnement. Les études d'impacts sont encore souvent incomplètes ou mal faites, notamment pour les raisons suivantes :

  • Manque de temps et de moyens financiers pour les experts nécessaires aux évaluations environnementales fines.
  • Défaut de cahiers des charges (certains cahiers des charges imposent de ne traiter que certains aspects en évitant par exemple les impacts indirects, secondaires ou les impacts sur la santé humaine, les impacts cumulatifs et/ou synergiques, ou induits par la pollution lumineuse, par les impacts énergétiques (émissions de gaz à effet de serre), en matière d’empreinte écologique, etc.).
  • Défaut d’accès à des informations essentielles mais jugées confidentielles pour des raisons industrielles, de brevet, militaires ou politiques. Dans de nombreux pays, les plans et documents établis à fins de défense nationale ou de protection civile ne sont pas soumis à une évaluation environnementale, bien que l’on sache que de nombreux sites pollués ont une origine militaire ou sont des séquelles de guerre.
  • Manque de temps et/ou de compétences techniques pour les inventaires faune-flore et écologiques, en particulier en zone tropicale forestière, aquatique ou marine où de nombreuses espèces sont inconnues ou connues que de quelques spécialistes, où les espèces sont parfois difficilement accessibles (sur la canopée, sous le sol) et les impacts peu prévisibles (par exemple sur les récifs coralliens pour les aménagements portuaires et littoraux).
  • Mauvaise prise en compte des impacts indirects et secondaires (différés dans l’espace et dans le temps) : par exemple, l’expérience a montré en France que la création d’autoroutes engendrait des impacts environnementaux très importants via les remembrements qu’ils entraînaient, autant sinon plus qu’à cause des retombées de pollution et de l’effet de fragmentation écologique de l’autoroute elle-même (idem pour les canaux, TGV et autres contournements..).
  • Parfois l’étude d’impact est bien faite, mais les mesures compensatoires et conservatoires qu’elle propose ne sont simplement pas mises en œuvre. Ou les observatoires nécessaires pour ajuster dans le temps les mesures compensatoires (prévus pour 3 ans minimum par la loi (LOTI) en France pour les grands projets routiers ne sont simplement presque jamais mis en œuvre).
  • Les grands projets doivent faire l'objet d'études d'impacts sur l'Environnement, mais ils sont parfois saucissonnés par leurs promoteurs (mis en œuvre par tranches successives dans le temps), ce qui leur permet d'échapper aux études d'impacts.
  • Certains aspects tels que le dérangement de la faune sont particulièrement difficiles à prendre en compte et à compenser.
  • Les impacts différés de la pêche (en mer), de la chasse et de l’agriculture ou de la sylviculture qui peuvent être amplifiés par certains aménagements sont rarement étudiés, et l'étude des impacts des aménagements sur ces activités est souvent très simplifiée, quand elle existe.
  • Les mesures compensatoires (replantation d’arbres, par exemple) peuvent prendre des dizaines d’années avant d’avoir un effet significatif, alors que l’impact négatif était majeur et immédiat.
  • La loi impose parfois des mesures contreproductives, avec par exemple la remise en état des carrières, justifiant en général qu’elles soient rebouchées par des déchets, alors qu’un aménagement plus propice à la biodiversité et à la conservation des ressources en eau pourrait être proposé, permettant la survie des espèces protégées qui s’y étaient généralement installées.
  • Des études d’impacts conditionnent certaines autorisations de mises sur le marché (de pesticides, de médicaments, de produits chimiques, d’OGM ou produits issus des nanotechnologies, etc, mais dans ces derniers cas, les études d'impact transmises aux autorités chargées d'autoriser ou d'approuver ces produits (agrément, autorisation provisoire de mise sur le marché..) sont généralement faites par le demandeur et à ses frais, sans contre-expertise possible, ce qui peut en limiter la crédibilité).
  • Dans le doute scientifique, face à des enjeux économiques souvent importants, le principe de précaution est d'application difficile.

En Europe

L'évaluation des incidences environnementales des plans et grands projets doivent faire l'objet d'une attention particulière, dans le respect des directives concernant l'environnement. De même, la participation et l'information du public doivent être permises et encouragées quand des impacts environnementaux sont possibles, conformément à la convention d'Aarhus et à la Convention d'Espoo (dans le cas de projets transfrontaliers ou aux impacts pouvant toucher le pays voisin).

En France

39 articles du nouveau Code de l'environnement (modifié par la loi Grenelle II) sont relatifs aux études d'impacts qui - en France - comprennent au minimum les éléments suivants :

  1. « une description du projet » ;
  2. « une analyse de l'« état initial » (ou « état de référence », « état-zéro ») de la zone susceptible d’être affectée et de son environnement » ;
  3. « l’étude des effets du projet sur l’environnement ou la santé humaine, y compris les effets cumulés avec d’autres projets connus » ;
  4. « les mesures proportionnées envisagées pour éviter, réduire et, lorsque c’est possible, compenser les effets négatifs notables du projet sur l’environnement ou la santé humaine, ainsi qu'une présentation des principales modalités de suivi de ces mesures et du suivi de leurs effets sur l’environnement ou la santé humaine » ; La séquence 'éviter-réduire-compenser' a été précisée en mai 2012 avec la publication d'une doctrine nationale[3], puis en 2013 par des fiches décrivant les « lignes directrices nationales »[4], elle « s’applique à toutes les composantes de l’environnement »
  5. « une esquisse des principales solutions de substitution qui ont été examinées par le maître d’ouvrage et une indication des principales raisons de son choix, eu égard aux effets sur l’environnement ou la santé humaine » ;
  6. pour les infrastructures de transport, l'étude « comprend une analyse des coûts collectifs des pollutions et nuisances et des avantages induits pour la collectivité ainsi qu’une évaluation des consommations énergétiques résultant de l’exploitation du projet, notamment du fait des déplacements qu’elle entraîne ou permet d’éviter » ; La Loi (LOTI) impose pour les autoroutes nouvellement construites des observatoires des impacts autoroutiers (pour au moins 3 ans), mais ils ont rarement été mis en œuvre.
  7. un « résumé non technique des informations prévues ci-dessus ».

Les EIE sont notamment cadrées par le Code de l’Environnement à partir de :

  1. la Loi du 10 juillet 1976 sur la protection de la nature décrète que « la protection des espaces naturels et des paysages, la préservation des espèces animales et végétales, le maintien des équilibres biologiques auxquels ils participent et la protection des ressources naturelles contre toutes les causes de dégradation qui les menacent sont d'intérêt général » (et du « devoir de chacun ») la loi s’appuie sur une liste nationale d'espèces protégées et des listes régionales (dont la portée est atténuée par une clause permettant la destruction d’espèces protégées par certaines pratiques agricoles courantes). Les activités publiques ou privées d'aménagement, d'équipement et de production doivent se conformer aux mêmes exigences. La loi vise également un équilibre harmonieux de la population résidant dans les milieux urbains et ruraux. Les études d'impact deviennent obligatoires pour les grandes infrastructures. Un classement en forêts de protection peut désormais concerner des forêts péri-urbaines (pour le bien-être de la population). Les milieux peuvent être classés en RN (réserve naturelle) ou RNV (réserve naturelle volontaire, devenue RNR ou Réserve naturelle régionale) ; la loi crée un statut d'APB (ou APPB : Arrêté Préfectoral de Protection de Biotope).
  2. la Loi du 19 juillet 1976 sur les installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) implique que l’auteur d’un projet demande l’autorisation du préfet pour l'installation d'activités présentant des « dangers ou des inconvénients » pour le voisinage ou la salubrité publique, telles que carrières, installations industrielles ou agricoles (65 000 installations soumises à autorisation, 550 000 installations soumises à déclaration, plus de 600 textes juridiques).

Les commissaires enquêteurs ont droit à des formations. Leur avis n’est pas nécessairement suivi par le préfet.

L'étude d'impact a été réformée par la loi du premier juin 2012[5].

L'Autorité environnementale

L'Autorité environnementale évalue la pertinence et la bonne conduite des études d’impact de tous les projets soumis à cette obligation. Pour la plupart des projets locaux, l'autorité environnementale 'AE) est exercée par le préfet de région. Pour les grands projets d’infrastructure (autoroute, ligne à grande vitesse, ligne à haute tension, centrale nucléaire et EPR) et de certains grands projets de collectivités, cette autorité est le ministère chargé de l'environnement ou le CGEDD.

Le Cas du CGEDD : Cet organe (« formation d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable ») a été créé en juillet 2008. Il est censé garantir une indépendance en tant qu'AE par rapport aux projets portés par le ministère. Cette autorité a 3 mois à partir de sa saisine pour donner un avis sur chaque projet pour lequel elle aura été saisie. L'avis ou l'information relative à l'existence d'un avis tacite est rendu public par voie électronique sur le site de l'Autorité environnementale.

L'autorité ne peut s’autosaisir, mais sa saisie est obligatoire pour tout projet présenté par le MEEDDM. Elle joue un rôle de conseil et expertise, voire d'inspection ou d'audit et d'évaluation du MEEDDM et des différents autres ministères ou autorités publiques qui peuvent le solliciter.

Elle doit notamment vérifier que l’état des lieux est complet, que les impacts ont été identifiés et que les mesures compensatoires sont suffisantes[6].

Michel Badré, son président a rappelé lors de l'installation de l'autorité que celle-ci préparait un cahier des charges minimal à respecter par chaque étude d’impact incluant l’articulation du projet avec « les trames vertes et bleues et la politique climatique. »

Le projet de loi Grenelle II contient quelques éléments[7] de « Réforme des études d'impact » (art 86).

En 2002, le Ministère de l'environnement a publié un Guide sur la prise en compte des milieux naturels dans les études d'impact[8]

Bibliographie

- ANDRE P. et Al, 2010, L’évaluation des impacts sur l’environnement, 3e édition: processus, acteurs et pratique, Presses internationales Polytechnique, Québec, 398 p.

Notes et références

  1. Cf. par exemple Rapport du Club de Rome et le Rapport Bruntlantd
  2. Le Millenium ecosystems assessment (évaluation produite à partir du travail de 1360 experts de 95 pays durant quatre ans, la plus complète jamais faite sur la planète) et les 3 bilans successifs Geo 1, Goeo 2 et Geo 3 de l'ONU, ou d'autres approches évaluatives comme les index du WWF montrent que les législations nationales et les textes internationaux n'ont pas suffi à protéger l'environnement, et qu'il sera difficile ou impossible d'atteindre l'objectif fixé de stabiliser la biodiversité en 2010
  3. Doctrine nationale sur la séquence éviter-réduire-compenser les impacts sur le milieu naturel, élaborée par le Comité de pilotage national sur la séquence éviter, réduire et compenser les impacts sur le milieu naturel.
  4. CGDD et Direction de l'eau et de la biodivesité du ministère de l'écologie (2013), Lignes directrices nationales sur la séquence éviter, réduire et compenser les impacts sur les milieux naturels octobre 2013, PDF, 232 pages
  5. http://www.developpement-durable.gouv.fr/Droit-de-l-environnement.html
  6. Décret no 2009-496 du 30 avril 2009 relatif à l'autorité administrative de l'État compétente en matière d'environnement prévue aux articles L. 122-1 et L. 122-7 du code de l'environnement
  7. Voir article 86 du Projet de loi (intitulé « Réforme des études d'impact »). Voir aussi chapitre III intitulé « Réforme de l'enquête publique »
  8. Biotope / Ministère de l'environnement (2002), Guide sur la prise en compte des milieux naturels dans les études d'impact, novembre 2002

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes