« Durabilité » : différence entre les versions

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[[Fichier:3x3 rondsLamiotWikimediaCommons.jpg|vignette|redresse=1.5|Une représentation des concepts du [[développement durable]] : gérer, restaurer et protéger des [[Ressource renouvelable|ressources plus ou moins renouvelables]].]]
{{Homonyme|durabilité (homonymie)}}


Les termes '''durabilité''' ou '''soutenabilité'''<ref group=alpha>Néologisme dont l'équivalent anglais est ''{{lang|en|sustainability}}''.</ref> sont utilisés depuis les années 1990 pour désigner une configuration de la [[Société (sociologie)|société]] humaine qui lui permet d'assurer sa pérennité. Une telle organisation humaine repose sur le maintien d'un [[environnement]] vivable, permettant le [[développement économique et social]] à l'échelle planétaire et, selon les points de vue, sur une [[organisation sociale]] [[Équité|équitable]]. La période de transition vers la durabilité peut se faire par le [[développement durable]], via la [[transition énergétique]] et la [[transition écologique]] notamment.
Les termes '''durabilité''' ou '''soutenabilité'''<ref group="alpha">Néologisme dont l'équivalent anglais est ''{{lang|en|sustainability}}''.</ref> sont utilisés depuis les années 1990 pour désigner une configuration de la [[Société (sociologie)|société]] humaine qui lui permet d'assurer sa pérennité. Une telle organisation humaine repose sur le maintien d'un [[environnement]] vivable, permettant le [[développement économique et social]] à l'échelle planétaire et, selon les points de vue, sur une [[organisation sociale]] [[Équité|équitable]]. La période de transition vers la durabilité peut se faire par le [[développement durable]], en particulier à travers la [[transition énergétique]] et la [[transition écologique]].


En 1987, le [[rapport Brundtland]] définissait le [[développement durable]] comme l'objectif de développement compatible avec les [[besoin]]s des [[générations futures]]. Il repose sur trois piliers : [[sciences économiques|économique]], [[environnemental]] et d'équité sociale.
En 1987, le [[rapport Brundtland]] définissait le développement durable comme l'objectif de développement compatible avec les [[besoin]]s des [[générations futures]]. Il repose sur trois piliers : [[Économie (activité humaine)|économique]], environnemental et d'équité sociale.
[[Fichier:3x3 rondsLamiotWikimediaCommons.jpg|vignette|redresse=1.5|Une représentation des concepts du développement durable : gérer, restaurer et protéger des ressources plus ou moins renouvelables.]]

La ''[[Durabilité (produit)|durabilité]]'' est la qualité d'un bien qui dure<ref>[http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/durable/27025 « durable »], définition, ''Petit Larousse''.</ref>. {{citation nécessaire|En [[droit]], c'est la période d'utilisation d'un [[Bien (droit)|bien]]}}. Dans le domaine de la [[sûreté de fonctionnement]], c'est l'aptitude d'un bien à accomplir une fonction jusqu'à ce qu'un état limite soit atteint<ref>Norme NF X60-500, octobre 1988, Terminologie relative à la fiabilité - Maintenabilité - Disponibilité.</ref>, ce qu'on appelle couramment la solidité d'un objet ou d'un équipement, par opposition à l'[[obsolescence]].


== Étymologie ==
== Étymologie ==
La [[Durabilité (produit)|durabilité]] est la qualité d'un bien qui dure<ref>{{Larousse |mot=durable |numéro=27025}}.</ref>. Dans le domaine de la [[sûreté de fonctionnement]], c'est l'aptitude d'un bien à accomplir une fonction jusqu'à ce qu'un état limite soit atteint<ref>[[Norme française|Norme NF]] X60-500, d'octobre 1988. Terminologie relative à la fiabilité, maintenabilité et disponibilité.</ref>, ce qu'on appelle couramment la solidité d'un objet ou d'un équipement, par opposition à l'[[obsolescence]].
Le terme de durabilité est un néologisme, appliqué à l'environnement naturel, de même que celui de [[développement durable]], avec le sens de pérennité des ressources ; ils se sont imposés dans les années 1990{{refsou|date=novembre 2019}}.


Appliqué à l'[[environnement]] naturel, les termes de « durabilité » et de « [[développement durable]] », qui prend le sens de pérennité des ressources, se sont imposés dans les années 1990.
Le mot « soutenir » (qui correspond au mot anglais ''{{langue|en|sustainability}}'') existait en revanche en vieux français dans ce même sens. La première formulation du concept date en effet de 1346, dans l'[[ordonnance de Brunoy]] édictée par [[Philippe VI de Valois]] pour préserver les ressources forestières<ref>Anne Jégou, [http://tel.archives-ouvertes.fr/docs/00/68/15/86/PDF/these1903AJ.pdf ''Territoires, acteurs, enjeux des dynamiques de durabilité urbaine : le cas de la métropole parisienne''] (thèse de doctorat de géographie), [[Université Panthéon-Sorbonne|Paris 1 Panthéon-Sorbonne]], 2011 {{pdf}}, {{p.|35}}.</ref>{{,}}<ref>Vincent Clément, [http://geoconfluences.ens-lyon.fr/doc/transv/DevDur/DevdurScient.htm ''Le développement durable : un concept géographique ?''], [[ENS LSH]] et [[DGESCO]], 2004.</ref>. Le terme allemand ''{{lang|de|nachhaltig}}'', que l'on traduit actuellement en français par « durable », a été utilisé dans ce contexte pour la première fois en 1713 par [[Hans Carl von Carlowitz]] dans ''{{langue|la|Sylvicultura oeconomica}}, {{langue|en|oder haußwirthliche Nachricht und Naturmäßige Anweisung zur wilden Baum-Zucht}}'', premier traité allemand complet sur l'[[Sylviculture|économie forestière]].

Le verbe « soutenir » (qui correspond au verbe anglais ''{{langue|en|to sustain}}'') existait en revanche en vieux français dans ce même sens. La première formulation du concept date en effet de 1346, dans l'[[ordonnance de Brunoy]] édictée par le roi de France [[Philippe VI de Valois]] pour préserver les ressources forestières<ref>Anne Jégou, [http://tel.archives-ouvertes.fr/docs/00/68/15/86/PDF/these1903AJ.pdf ''Territoires, acteurs, enjeux des dynamiques de durabilité urbaine : le cas de la métropole parisienne''], thèse de doctorat de géographie, Paris, [[Université Panthéon-Sorbonne|Paris 1 Panthéon-Sorbonne]], 2011, {{p.|35}}.</ref>{{,}}<ref>Vincent Clément, « [http://geoconfluences.ens-lyon.fr/doc/transv/DevDur/DevdurScient.htm Le développement durable : un concept géographique ?] », ''[[Géoconfluences]]'', 2004.</ref>. En allemand, le terme ''{{lang|de|nachhaltig}}'', que l'on traduit actuellement en français par « durable », a été utilisé dans ce contexte pour la première fois en 1713 par [[Hans Carl von Carlowitz]] dans ''{{langue|la|Sylvicultura oeconomica}}, {{langue|de|oder haußwirthliche Nachricht und Naturmäßige Anweisung zur wilden Baum-Zucht}}'', premier traité allemand complet sur l'[[Sylviculture|économie forestière]].


== Origine du problème ==
== Origine du problème ==
{{Section à sourcer|date=octobre 2019}}

=== Équilibre environnemental ===
=== Équilibre environnemental ===
Les questions environnementales et d'accès aux [[ressources naturelles]] constituent depuis les années 1970, avec les [[chocs pétroliers]] et la [[pollution]], une préoccupation croissante des sociétés occidentales.
Les questions environnementales et d'accès aux [[ressources naturelles]] constituent depuis les années 1970, du fait des [[chocs pétroliers]] et de la [[pollution]], une préoccupation croissante des [[Société occidentale|sociétés occidentales]].


On observe en effet que, selon les études d'experts en [[écologie]], l'[[empreinte écologique]] de l'[[humanité]] dépasse depuis le milieu des années 1970 la capacité de la [[Terre]] à régénérer de nouvelles [[ressources naturelles]] et à absorber les [[déchet]]s de toutes sortes de l'activité économique. Le phénomène de [[changement climatique]] n'est que l'un des aspects de ce problème, dont l'origine est en partie une tendance à une plus grande concentration de [[gaz à effet de serre]] dans l'[[Atmosphère (Terre)|atmosphère]].
On observe en effet que, selon les études d'[[expert]]s en [[écologie]], l'[[empreinte écologique]] de l'[[humanité]] dépasse depuis le milieu des années 1970 la capacité de la [[Terre]] à régénérer de nouvelles ressources naturelles et à absorber les [[déchet]]s de toutes sortes de l'[[Économie (activité humaine)|activité économique]]. Le phénomène de [[changement climatique]] n'est que l'un des aspects de ce problème, dont l'origine est une plus grande concentration de [[gaz à effet de serre]] d'origine anthropiques dans l'[[Atmosphère (Terre)|atmosphère]].


Les [[ressources halieutiques]] et l'[[énergie]] sont les deux domaines où l'épuisement des ressources est le plus à craindre<ref>[http://www.oecd.org/maintopic/0,3348,fr_2649_201185_1_1_1_1_1,00.html Thèmes], OCDE.</ref>.
Les [[ressources halieutiques]] et l'[[énergie]] sont les deux domaines où l'épuisement des ressources est le plus à craindre<ref>{{lien brisé |url=http://www.oecd.org/maintopic/0,3348,fr_2649_201185_1_1_1_1_1,00.html |titre=Thèmes |éditeur=[[Organisation de coopération et de développement économiques]] |brisé le=03/10/2023}}.</ref>.


C'est donc surtout le problème environnemental qui apparaît aujourd'hui au grand jour dans les sociétés occidentales contemporaines.
C'est donc surtout le problème environnemental qui apparaît aujourd'hui au grand jour dans les sociétés occidentales contemporaines.


=== Équité sociale ===
=== Équité sociale ===
Dans les [[pays développés]], on s'est rendu compte dans la deuxième moitié du {{s-|XIX}}, lors de la [[Révolution industrielle]], de la nécessité de veiller au respect des intérêts des employés dans les entreprises, avec les [[Syndicat de salariés|syndicats de salariés]], le [[droit de grève]]... D'où des expressions communément employées comme « économique et social », « capital / travail », qui ont fortement marqué les esprits et les institutions.
Dans les [[pays développés]], on s'est rendu compte dans la deuxième moitié du {{s-|XIX}}, lors de la [[révolution industrielle]], de la nécessité de veiller au respect des intérêts des travailleurs dans les entreprises, avec les [[Syndicat de salariés|syndicats de salariés]], le [[droit de grève]]{{etc.}} D'où des expressions communément employées comme « économique et social », « [[capital]] / [[travail]] », qui ont fortement marqué les esprits et les institutions.


Les [[inégalités de revenu]] dans le monde sur les aspects sociaux existent cependant :
Les [[inégalités de revenu]] dans le monde sur les aspects sociaux existent cependant :
* un déséquilibre entre les [[pays développés]] et les [[pays en développement]], en particulier les [[pays les moins avancés]], avec des inégalités très fortes d'accès à la [[connaissance]] ([[éducation]]), à l'[[alimentation]] et à la [[santé]] (nourriture, [[médicament]]s) ; d'où l'apparition de mouvements [[altermondialiste]]s, de revendication de la [[souveraineté alimentaire]], d'[[Organisation non gouvernementale|ONG]] sur les [[droits de l'homme]]... ;
* un déséquilibre entre les pays développés et les [[pays en développement]], en particulier les [[pays les moins avancés]], notamment des inégalités très fortes d'accès aux [[Besoin primaire|besoins fondamentaux]] : la [[connaissance]] ([[éducation]]), l'[[alimentation]] et la [[santé]] (nourriture, [[médicament]]s) ; d'où l'apparition de mouvements [[altermondialiste]]s, de revendication de la [[souveraineté alimentaire]], d'[[Organisation non gouvernementale|ONG]] sur les [[droits de l'homme]]{{etc.}} ;
* à l'intérieur des [[pays développés]], il existe aussi des inégalités très fortes.
* à l'intérieur des pays développés subsistent aussi des inégalités très fortes.


== Recherche de nouveaux modèles économiques durables ==
== Recherche de modèles économiques durables ==
=== Durabilité faible/forte ===
=== Durabilité faible/forte ===
Devant la difficulté d'intégrer la contrainte environnementale dans le fonctionnement global de l'économie, sont apparus deux [[paradigme]]s écologiques<ref>{{en}} « Viewpoint : Weak Versus Strong Sustainability », Tinbergen Institute.</ref>.

Devant la difficulté d'intégrer la contrainte environnementale dans le fonctionnement global de l'économie, sont apparus deux [[paradigme]]s [[écologique]]s<ref>{{en}} [http://www.tinbergen.nl/discussionpapers/98103.pdf ''Viewpoint : weak versus strong sustainability''] {{pdf}}</ref>.


==== La durabilité faible ====
==== La durabilité faible ====
Dans cette hypothèse, compatible avec les économistes néoclassiques et défendue par Hartwick (1977), il y a substitution entre capital artificiel (richesse créée) et capital naturel ([[ressource naturelle]]). On parle aussi de ''substituabilité''.
Dans l'hypothèse de durabilité faible, compatible avec les [[Économiste|économistes]] [[École néoclassique|néoclassiques]] et défendue par John M. Hartwick (1977), il y a substitution entre capital artificiel ([[richesse]] créée) et [[capital naturel]] (ressource naturelle). On parle aussi de substituabilité.


Cette conception de la durabilité est celle qui prévaut dans beaucoup d'organisations internationales (Nations unies, Banque mondiale, WBCSD), mais aussi, selon des chercheurs tels que S. Baker, J. Barry, et C. Rootes, dans l'Union européenne<ref>[[Institut européen des hautes études internationales]], [http://www.ie-ei.eu/bibliotheque/memoires/MemoireHalacheva.pdf Plamena Halacheva, ''Vers une nouvelle politique de développement durable de l'Union européenne ? Le défi régional''], 2006/2007, p. 16.</ref>.
Cette conception de la durabilité est celle qui prévaut dans beaucoup d'[[Organisation internationale|organisations internationales]] ([[Organisation des Nations unies|Nations unies]], [[Banque mondiale]], {{lang|en|[[World Business Council for Sustainable Development]]}}), mais aussi, selon des chercheurs tels que Susan Baker, John Barry et Christopher Rootes, dans l'[[Union européenne]]<ref>Plamena Halacheva, ''[https://www.ie-ei.eu/IE-EI/Ressources/file/memoires/2007/MemoireHalacheva.pdf Vers une nouvelle politique de développement durable de l'Union européenne ? Le défi régional]'', mémoire de master, Nice, [[Centre international de formation européenne]], 2007, {{p.|16}} et 18.</ref>{{refins|date=octobre 2023}}.


L'indicateur proposé par la [[Commission Stiglitz]], l'épargne nette ajustée, rend interchangeables les trois formes de capital : « économique » (issu de la production), « humain » (abordé via les seules dépenses d’éducation), « naturel » (limitant les dommages écologiques aux seuls aspects climatiques)<ref>Collectif [[Forum pour d'autres indicateurs de richesse]] (FAIR)[https://www.lesoir.be/art/carte-blanche-au-dela-du-pib-un-sujet-qui-merite_t-20090624-00NRYU.html « Carte blanche : Au-delà du PIB : un sujet qui mérite débat »], ''[[Le Soir]]'', le 24 juin 2009.</ref>. Cet indicateur se place donc dans un modèle de durabilité faible.
L'[[Indicateur économique|indicateur]] proposé par la [[Commission Stiglitz]], l'épargne nette ajustée, rend interchangeables les trois formes de capital : « économique » (issu de la production), « [[Capital humain|humain]] » (abordé au travers des seules dépenses d’éducation), et « naturel » (limitant les dommages écologiques aux seuls aspects climatiques)<ref>Collectif [[Forum pour d'autres indicateurs de richesse]] (FAIR), « [https://www.lesoir.be/art/carte-blanche-au-dela-du-pib-un-sujet-qui-merite_t-20090624-00NRYU.html Carte blanche : Au-delà du PIB : un sujet qui mérite débat] », ''[[Le Soir]]'', 24 juin 2009.</ref>. Cet indicateur se place donc dans un modèle de durabilité faible.


==== La durabilité forte ====
==== La durabilité forte ====
Cette hypothèse est défendue par [[Herman Daly]] (1990). Selon lui, seuls les flux matériels de l’économie qui remplissent les trois conditions suivantes peuvent être considérés comme durables sur les plans matériel et énergétique<ref>{{en}} [[Herman Daly]], « Institutions for a Steady-State Economy » Institutions pour une économie stable »], ''Steady State Economics'', {{lien|Island Press}}, Washington DC, 1991.</ref> :
L'hypothèse de durabilité forte est défendue par [[Herman Daly|Herman E. Daly]] (1990). Selon lui, seuls les flux matériels de l’économie qui remplissent les trois conditions suivantes peuvent être considérés comme durables sur les plans [[Matière|matériel]] et [[Énergie|énergétique]]<ref>{{en}} [[Herman Daly|Herman E. Daly]], « Institutions for a Steady-State Economy », in ''Id''., ''Steady State Economics'', Washington, Island Press, 1991 (1977).</ref> :
* le rythme de consommation des ressources renouvelables ne doit pas excéder le rythme de régénération de ces mêmes ressources ;
* le rythme de [[consommation]] des [[Ressource renouvelable|ressources renouvelables]] ne doit pas excéder le rythme de régénération de ces mêmes ressources ;
* le rythme de consommation des ressources non renouvelables ne doit pas excéder le rythme auquel des substituts renouvelables et durables peuvent être développés ;
* le rythme de consommation des [[Ressource non renouvelable|ressources non renouvelables]] ne doit pas excéder le rythme auquel des substituts renouvelables et durables peuvent être développés ;
* le rythme d’émission de pollution ne doit pas excéder la capacité de l’environnement à absorber et assimiler cette pollution.
* le rythme d’émission de pollution ne doit pas excéder la capacité de l’environnement à absorber et assimiler cette pollution.


Dans cette hypothèse, le stock de [[capital naturel]] ne doit pas baisser. Daly soutient que [[capital naturel]] et capital artificiel sont complémentaires et non substituables.
Dans cette hypothèse, le stock de [[capital naturel]] ne doit pas baisser. Daly soutient que capital naturel et capital artificiel sont complémentaires et non substituables.


=== Notion de « capital naturel » ===
=== Notion de capital naturel ===
Afin d'avoir une visibilité globale du point de vue économique, certains experts ont donc parlé de « [[capital naturel]] », qui devrait compléter d'autres formes de capital.
Afin d'avoir une visibilité globale du point de vue économique, certains experts ont donc parlé de « capital naturel », qui devrait compléter d'autres formes de capital.


Pour les [[Physiocratie|physiocrates]], la [[terre]] était la seule source de richesse. Ce point de vue les distingue de leurs successeurs de l'[[école classique]], qui ne distingue que les [[facteurs de production]] [[capital]] et travail.
Pour les [[Physiocratie|physiocrates]], la terre était la seule source de richesse. Ce point de vue les distingue de leurs successeurs de l'[[école classique]], qui ne dénombrent comme [[facteurs de production]] que le capital et le travail.


Du point de vue de l'[[histoire de la pensée économique]], il semble que l'omission des aspects environnementaux se soit produite au {{s-|XIX}}, lorsque les économistes ont laissé de côté le [[facteur de production]] « [[Sol (pédologie)|terre]] et sous-sol ».
Du point de vue de l'[[histoire de la pensée économique]], il semble que l'omission des aspects environnementaux se soit produite au {{s-|XIX}}, lorsque les économistes ont laissé de côté le facteur de production « [[Sol (pédologie)|terre]] et sous-sol ».


En effet, dans la [[école néoclassique|théorie économique néoclassique]], le capital peut être accru par l'[[investissement]]. Or, la terre est alors considérée comme immuable, l'action de l'homme sur l'environnement négligeable et les contraintes d'approvisionnement de matières premières étaient alors ignorées. Le capital naturel est aujourd'hui dans la théorie néoclassique une composante du capital global pouvant être remplacée par le [[capital productif|capital technique]] et le [[capital humain]].
En effet, dans la théorie économique néoclassique, le capital peut être accru par l'[[investissement]]. Or, la terre est alors considérée comme immuable, l'action de l'homme sur l'environnement négligeable et les contraintes d'approvisionnement de [[Matière première|matières premières]] étaient alors ignorées. Le capital naturel est aujourd'hui dans la théorie néoclassique une composante du capital global pouvant être remplacée par le [[capital productif|capital technique]] et le capital humain.


Toutefois, cette expression de capital naturel dénature la conception initiale de [[facteur de production]] des économistes classiques.
Toutefois, cette expression de capital naturel dénature la conception initiale de [[facteur de production]] des économistes classiques.
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=== Nouveaux concepts environnementaux ===
=== Nouveaux concepts environnementaux ===
Sous d'autres termes, les préoccupations environnementales, qui étaient représentées par le facteur de production terre et sous-sol, est en train de revenir depuis les années 1970 dans les débats d'experts :

* l'empreinte écologique est plutôt un concept [[macroéconomie|macroéconomique]], susceptible d'être intégré dans les agrégats économiques ([[Produit intérieur brut|PIB]]{{etc.}}) ;
Sous d'autres termes, les préoccupations environnementales, qui étaient représentées par le [[facteur de production]] [[Terre (homonymie)|terre]] et sous-sol, est en train de revenir depuis les années 1970 dans les débats d'experts :
* l'[[éco-efficacité]] est quant à elle un concept [[microéconomie|microéconomique]], qui peut se traduire dans la conception des [[Produit (économie)|produits]] [[industrie]]ls par des [[analyses de cycle de vie]] multidimensionnelles, utilisant un ensemble de critères ;
* l'[[empreinte écologique]] est plutôt un concept [[macroéconomie|macroéconomique]], susceptible d'être intégré dans les [[indicateur économique|agrégats économiques]] ([[Produit intérieur brut|PIB]]...) ;
* le facteur 10, qui correspond à la possibilité de créer des [[Produit (économie)|produits]] et [[Services (économie)|services]] qui ont une intensité de consommation de ressource naturelle très inférieure aux méthodes conventionnelles ; il a été créé sur une initiative de l'institut allemand de Wuppertal ;
* l'[[éco-efficacité]] est quant à elle un concept [[microéconomie|microéconomique]], qui peut se traduire dans la conception des [[Produit (économie)|produits]] industriels par des [[analyses de cycle de vie]] multidimensionnelles, utilisant un ensemble de critères ;
* le {{anglais|material intensity per service unit}}, un concept d'[[écologie industrielle]].
* le [[facteur 10]], qui correspond à la possibilité de créer des [[Produit (économie)|produits]] et [[Services (économie)|services]] qui ont une intensité de consommation de [[ressource naturelle]] très inférieure aux méthodes conventionnelles ; il a été créé sur une initiative de l'institut allemand de Wuppertal ;
* le MIPS, ''Material Intensity per Service Unit'', concept d'[[écologie industrielle]].


La difficulté s'accroît lorsqu'il s'agit d'intégrer concrètement ces préoccupations dans la gestion publique et dans celle des entreprises.
La difficulté s'accroît lorsqu'il s'agit d'intégrer concrètement ces préoccupations dans la gestion publique et dans celle des entreprises.


=== Réduction de l'émission de gaz à effet de serre ===
=== Réduction de l'émission de gaz à effet de serre ===
La prise en compte des questions environnementales du point de vue de l'émission de [[gaz à effet de serre]] est prévue dans le [[protocole de Kyoto]]. Des [[quota d'émission de gaz à effet de serre |quotas d'émission de gaz à effet de serre]] sont inscrits dans le protocole, mais ne sont pas respectés par tous les pays.

La prise en compte des questions environnementales du point de vue de l'émission de [[gaz à effet de serre]] est prévue dans le [[Protocole de Kyoto]]. Des [[quota d'émission de gaz à effet de serre |quotas d'émission de gaz à effet de serre]] sont inscrits dans le protocole, mais ne sont pas respectés par tous les pays.


Cependant, on se heurte à deux écueils principaux :
Cependant, on se heurte à deux écueils principaux :
* les [[gaz à effet de serre]] ne représentent qu'une partie du pilier environnemental, soit quelques indicateurs de [[développement durable]] dans le GRI ;
* les [[gaz à effet de serre]] ne représentent qu'une partie du pilier environnemental, soit quelques indicateurs de [[développement durable]] dans le [[Global Reporting Initiative]] (GRI) du [[Global Compact|Pacte mondial]] de l'ONU, qui regroupe les trois piliers et la [[gouvernance]] ;
* ces quotas ne prennent pas en compte le pilier social ;
* ces quotas ne prennent pas en compte le pilier social ;
* ils prennent en compte la dimension économique avec un croisement incomplet avec le pilier environnemental.
* ils prennent en compte la dimension économique avec un croisement incomplet avec le pilier environnemental.


Il est donc difficile de généraliser cet outil à tous les aspects de la vie économique, d'autant plus que les services sont aujourd'hui majoritaires dans les économies contemporaines.
Il est donc difficile de généraliser cet outil à tous les aspects de la vie économique, d'autant plus que les [[Service (économie)|services]] sont aujourd'hui majoritaires dans les économies développées.


=== Création d'indicateurs ===
=== Création d'indicateurs ===
L'[[évaluation environnementale]]{{Quoi}} inclut souvent une évaluation de la soutenabilité, qui prend en compte les trois piliers du [[développement durable]], au travers d'[[Indicateur du développement durable|indicateurs]] de [[gestion environnementale|gestion]] et de protection ou restauration des ressources naturelles. Elle peut s'appuyer sur des [[Label environnemental|labels environnementaux]], certifications ou normes telles que :
L'[[évaluation environnementale]] inclut souvent une évaluation de la soutenabilité, qui prend en compte les trois piliers du développement durable, au travers d'[[Indicateur du développement durable|indicateurs]] de [[gestion environnementale|gestion]] et de protection ou restauration des ressources naturelles. Elle peut s'appuyer sur des [[Label environnemental|labels environnementaux]], certifications ou normes telles que :
* la norme [[ISO 14000]] pour l'environnement ;
* la série de normes [[ISO 14000]] pour l'environnement ;
* le standard [[SA 8000]] pour les fournisseurs ;
* le standard [[SA 8000]] pour les fournisseurs ;
* la spécification [[OHSAS 18001]] pour l'hygiène, la santé, et la sécurité au travail.
* la norme [[OHSAS 18001]] pour l'hygiène, la santé et la sécurité au travail.


Les entreprises emploient également des batteries d'[[indicateur]]s s'inspirant du [[Global Reporting Initiative]] (GRI) du [[Global Compact]], qui regroupe les trois piliers et la [[gouvernance]].
Les entreprises emploient également des batteries d'[[indicateur]]s s'inspirant du GRI.


=== Modèle pression-état-réponse ===
=== Modèle pression-état-réponse ===
{{Article détaillé|Pression-état-réponse}}
{{Article détaillé|Pression-état-réponse}}
Le [[Pression-état-réponse|modèle pression-état-réponse]] (PER) de l'[[Organisation de coopération et de développement économiques|OCDE]] a l'avantage, pour chaque [[indicateur environnemental]], de distinguer la pression, l'état et la réponse.
{{...}}

Le [[Pression-état-réponse|modèle PER]] de l'[[Organisation de coopération et de développement économiques|OCDE]] a l'avantage, pour chaque [[indicateur environnemental]], de distinguer la pression, l'état, et la réponse.


=== Dans le domaine de la finance ===
=== Dans le domaine de la finance ===
La notion de ''soutenabilité'' peut avoir dans ce domaine un sens particulier. On parle de :
La notion de soutenabilité peut avoir dans le domaine [[Finance|financier]] un sens particulier. On parle de :
* ''soutenabilité d'une dette'' : elle est dite « soutenable » tant qu'elle est compensée par un flux de ressources (recettes publiques, exportations, PNB, etc.) qui reste stable. La soutenabilité n'est pas synonyme de [[solvabilité]], mot qui indique que la dette peut être remboursée à court ou moyen-terme<ref>M. Raffinot & EURIsCO DIAL, [http://bibliotheque.pssfp.net/livres/SOUTENABILITE_DE_LA_DETTE_DES_PAYS_PAUVRES_TRES_ENDETTES.pdf Soutenabilité de la dette des pays pauvres très endettés], Université Paris Dauphine, Cahier de Recherche, 2004.</ref> ;
* « soutenabilité d'une [[dette]] » : elle est dite soutenable tant qu'elle est compensée par un flux de ressources ([[Imposition (fiscalité)|recettes publiques]], [[exportation]]s, [[Produit national brut|PNB]]{{etc.}}) qui reste stable. La soutenabilité n'est pas synonyme de [[solvabilité]], dans laquelle la dette peut être remboursée à court ou moyen terme<ref>Marc Raffinot, « Quel développement durable pour les pays en développement ? : Soutenabilité de la dette des pays pauvres très endettés », ''Cahier du Groupement d'intérêt scientifique pour l'étude de la mondialisation et du développement'' (GEMDEV), {{n°|30}}, Paris, université Paris Dauphine, Eurisco, Dial, 2004, 74 p.</ref>. Ainsi de la [[soutenabilité de la dette publique]] ;
* ''soutenabilité d'un régime de change'' (taux de change) : expression utilisée dans le cadre de l'application de la [[théorie des zones monétaires optimales]] et du profil ''ex ante'' du pays qui est entré dans une [[union monétaire]] où il ne peut plus fixer sa monnaie seul, ce qui lui confère des avantages, mais peut (dans le cas d'un pays pauvre) limiter sa capacité ou sa vitesse de résilience face à des chocs économiques ou financier asymétriques et d'origine externe (qui autrement peuvent parfois être atténués simplement en ajustant le taux de change et le taux d’intérêt alors utilisés comme variables d'ajustement, d'après l'économiste Robert P. Flood (1979)<ref>{{en}} R. Flood, « Capital Mobility and the Choice of Exchange Rate System », International Economic Review, 1979, n°2, vol. 2, {{p.|4053416}} ([https://www.jstor.org/stable/2526488 résumé]).</ref>.
* « soutenabilité d'un [[régime de change]] » ([[taux de change]]) : expression utilisée dans le cadre de l'application de la théorie des [[Zone monétaire|zones monétaires]] optimales et du profil ''ex ante'' du pays qui est entré dans une [[union monétaire]]. Il ne peut alors plus fixer sa [[monnaie]] seul, ce qui lui confère des avantages, mais peut (dans le cas d'un pays pauvre) limiter sa capacité ou sa vitesse de [[Résilience (économie)|résilience]] face à des chocs économiques ou financiers asymétriques et d'origine externe (qui autrement peuvent parfois être atténués simplement en ajustant le taux de change et le [[taux d'intérêt]] alors utilisés comme variables d'ajustement, d'après l'économiste Robert P. Flood (1979)<ref>{{en}} Robert P. Flood, « ''[https://www.jstor.org/stable/2526488 Capital Mobility and the Choice of Exchange Rate System]'' », ''International Economic Review'', 20, 1979.</ref>.


== Notes ==
== Notes et références ==
=== Notes ===
{{Références|groupe=alpha}}
{{Références|groupe=alpha}}


== Références ==
=== Références ===
{{Références}}
{{Références}}


== Voir aussi ==
== Voir aussi ==
=== Bibliographie ===
* Valérie Boisvert (propos recueillis par Leslie Carnoy et Rémy Petitimbert), « [https://journals.openedition.org/developpementdurable/13837 La durabilité forte : enjeux épistémologiques et politiques, de l'économie écologique aux autres sciences sociales] », ''Développement durable et territoires'', 10, 2019, 17 p.
* Hervé Devillé, ''Économie et politiques de l'environnement : principe de précaution, critères de soutenabilité, politiques environnementales'', Paris, L'harmattan, 2010, 297 p.
* [[Geneviève Férone]] {{et al.}}, ''Le développement durable, des enjeux stratégiques pour l'entreprise'', Paris, D'organisation, 2002, 344 p.
* Sabine Garabedian et Jean-François Hoarau, « [https://www.cairn.info/revue-d-economie-regionale-et-urbaine-2011-4-page-651.htm?contenu=article Un indicateur de développement humain soutenable pour les petits espaces insulaires en développement] », ''Revue d'économie régionale et urbaine'', 2011, {{p.|651-680}}.
* Jean-Marc Lorach et Étienne de Quatrebarbes, ''Guide du territoire durable, l'Agenda 21 territorial pour les collectivités locales et leurs partenaires'', Paris, Village mondial, 2003, 416 p.
* [[Christian de Perthuis]], ''La génération future a-t-elle un avenir ?'', Paris, Belin, 2003, 191 p.
* [[Yvette Veyret]] et [[Paul Arnould]], ''Atlas du développement durable. Société, économie, environnement : un monde en transition'', Paris, Autrement, 2022, 96 p.

=== Articles connexes ===
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=== Liens externes ===
* [https://journals.openedition.org/developpementdurable/13837 Valérie Boisvert, Leslie Carnoye et Rémy Petitimbert, « La durabilité forte : enjeux épistémologiques et politiques, de l’économie écologique aux autres sciences sociales »]
* {{doc}} [http://perso.univ-rennes1.fr/daniel.mirza/developpement_durable.doc Développement durable, synthèse par un spécialiste de statistiques descriptives à l'université de Rennes]

=== Bibliographie ===
* Hervé Devillé, ''Économie et politiques de l'environnement : principe de précaution, critères de soutenabilité, politiques environnementales'', Paris, L'Harmattan, 2010, 297 p.
* [[Geneviève Férone]], Charles-Henri d'Arcimoles, Pascal Bello et Najib Sassenou, ''Le développement durable, des enjeux stratégiques pour l'entreprise'', Paris, D'organisation, 2002, 344 p.
* Sabine Garabedian et Jean-François Hoarau, « [https://www.cairn.info/revue-d-economie-regionale-et-urbaine-2011-4-page-651.htm?contenu=article Un indicateur de développement humain soutenable pour les petits espaces insulaires en développement] », ''Revue d'économie régionale et urbaine'', 2011, p. 651-680.
* Jean-Marc Lorach et Étienne de Quatrebarbes, ''Guide du territoire durable, l'Agenda 21 territorial pour les collectivités locales et leurs partenaires'', Paris, Village mondial, 2003, 416 p.
* [[Christian de Perthuis]], ''La génération future a-t-elle un avenir ?'', Paris, Belin, 2003, 191 p.
* [[Yvette Veyret]] et [[Paul Arnould]], ''Atlas du développement durable. Société, économie, environnement : un monde en transition'', Paris, Autrement, 2022, 96 p.


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Une représentation des concepts du développement durable : gérer, restaurer et protéger des ressources plus ou moins renouvelables.

Les termes durabilité ou soutenabilité[a] sont utilisés depuis les années 1990 pour désigner une configuration de la société humaine qui lui permet d'assurer sa pérennité. Une telle organisation humaine repose sur le maintien d'un environnement vivable, permettant le développement économique et social à l'échelle planétaire et, selon les points de vue, sur une organisation sociale équitable. La période de transition vers la durabilité peut se faire par le développement durable, en particulier à travers la transition énergétique et la transition écologique.

En 1987, le rapport Brundtland définissait le développement durable comme l'objectif de développement compatible avec les besoins des générations futures. Il repose sur trois piliers : économique, environnemental et d'équité sociale.

Étymologie[modifier | modifier le code]

La durabilité est la qualité d'un bien qui dure[1]. Dans le domaine de la sûreté de fonctionnement, c'est l'aptitude d'un bien à accomplir une fonction jusqu'à ce qu'un état limite soit atteint[2], ce qu'on appelle couramment la solidité d'un objet ou d'un équipement, par opposition à l'obsolescence.

Appliqué à l'environnement naturel, les termes de « durabilité » et de « développement durable », qui prend le sens de pérennité des ressources, se sont imposés dans les années 1990.

Le verbe « soutenir » (qui correspond au verbe anglais to sustain) existait en revanche en vieux français dans ce même sens. La première formulation du concept date en effet de 1346, dans l'ordonnance de Brunoy édictée par le roi de France Philippe VI de Valois pour préserver les ressources forestières[3],[4]. En allemand, le terme nachhaltig, que l'on traduit actuellement en français par « durable », a été utilisé dans ce contexte pour la première fois en 1713 par Hans Carl von Carlowitz dans Sylvicultura oeconomica, oder haußwirthliche Nachricht und Naturmäßige Anweisung zur wilden Baum-Zucht, premier traité allemand complet sur l'économie forestière.

Origine du problème[modifier | modifier le code]

Équilibre environnemental[modifier | modifier le code]

Les questions environnementales et d'accès aux ressources naturelles constituent depuis les années 1970, du fait des chocs pétroliers et de la pollution, une préoccupation croissante des sociétés occidentales.

On observe en effet que, selon les études d'experts en écologie, l'empreinte écologique de l'humanité dépasse depuis le milieu des années 1970 la capacité de la Terre à régénérer de nouvelles ressources naturelles et à absorber les déchets de toutes sortes de l'activité économique. Le phénomène de changement climatique n'est que l'un des aspects de ce problème, dont l'origine est une plus grande concentration de gaz à effet de serre d'origine anthropiques dans l'atmosphère.

Les ressources halieutiques et l'énergie sont les deux domaines où l'épuisement des ressources est le plus à craindre[5].

C'est donc surtout le problème environnemental qui apparaît aujourd'hui au grand jour dans les sociétés occidentales contemporaines.

Équité sociale[modifier | modifier le code]

Dans les pays développés, on s'est rendu compte dans la deuxième moitié du XIXe siècle, lors de la révolution industrielle, de la nécessité de veiller au respect des intérêts des travailleurs dans les entreprises, avec les syndicats de salariés, le droit de grèveetc. D'où des expressions communément employées comme « économique et social », « capital / travail », qui ont fortement marqué les esprits et les institutions.

Les inégalités de revenu dans le monde sur les aspects sociaux existent cependant :

Recherche de modèles économiques durables[modifier | modifier le code]

Durabilité faible/forte[modifier | modifier le code]

Devant la difficulté d'intégrer la contrainte environnementale dans le fonctionnement global de l'économie, sont apparus deux paradigmes écologiques[6].

La durabilité faible[modifier | modifier le code]

Dans l'hypothèse de durabilité faible, compatible avec les économistes néoclassiques et défendue par John M. Hartwick (1977), il y a substitution entre capital artificiel (richesse créée) et capital naturel (ressource naturelle). On parle aussi de substituabilité.

Cette conception de la durabilité est celle qui prévaut dans beaucoup d'organisations internationales (Nations unies, Banque mondiale, World Business Council for Sustainable Development), mais aussi, selon des chercheurs tels que Susan Baker, John Barry et Christopher Rootes, dans l'Union européenne[7][source insuffisante].

L'indicateur proposé par la Commission Stiglitz, l'épargne nette ajustée, rend interchangeables les trois formes de capital : « économique » (issu de la production), « humain » (abordé au travers des seules dépenses d’éducation), et « naturel » (limitant les dommages écologiques aux seuls aspects climatiques)[8]. Cet indicateur se place donc dans un modèle de durabilité faible.

La durabilité forte[modifier | modifier le code]

L'hypothèse de durabilité forte est défendue par Herman E. Daly (1990). Selon lui, seuls les flux matériels de l’économie qui remplissent les trois conditions suivantes peuvent être considérés comme durables sur les plans matériel et énergétique[9] :

  • le rythme de consommation des ressources renouvelables ne doit pas excéder le rythme de régénération de ces mêmes ressources ;
  • le rythme de consommation des ressources non renouvelables ne doit pas excéder le rythme auquel des substituts renouvelables et durables peuvent être développés ;
  • le rythme d’émission de pollution ne doit pas excéder la capacité de l’environnement à absorber et assimiler cette pollution.

Dans cette hypothèse, le stock de capital naturel ne doit pas baisser. Daly soutient que capital naturel et capital artificiel sont complémentaires et non substituables.

Notion de capital naturel[modifier | modifier le code]

Afin d'avoir une visibilité globale du point de vue économique, certains experts ont donc parlé de « capital naturel », qui devrait compléter d'autres formes de capital.

Pour les physiocrates, la terre était la seule source de richesse. Ce point de vue les distingue de leurs successeurs de l'école classique, qui ne dénombrent comme facteurs de production que le capital et le travail.

Du point de vue de l'histoire de la pensée économique, il semble que l'omission des aspects environnementaux se soit produite au XIXe siècle, lorsque les économistes ont laissé de côté le facteur de production « terre et sous-sol ».

En effet, dans la théorie économique néoclassique, le capital peut être accru par l'investissement. Or, la terre est alors considérée comme immuable, l'action de l'homme sur l'environnement négligeable et les contraintes d'approvisionnement de matières premières étaient alors ignorées. Le capital naturel est aujourd'hui dans la théorie néoclassique une composante du capital global pouvant être remplacée par le capital technique et le capital humain.

Toutefois, cette expression de capital naturel dénature la conception initiale de facteur de production des économistes classiques.

Prise en compte de la nécessité de durabilité[modifier | modifier le code]

Nouveaux concepts environnementaux[modifier | modifier le code]

Sous d'autres termes, les préoccupations environnementales, qui étaient représentées par le facteur de production terre et sous-sol, est en train de revenir depuis les années 1970 dans les débats d'experts :

  • l'empreinte écologique est plutôt un concept macroéconomique, susceptible d'être intégré dans les agrégats économiques (PIBetc.) ;
  • l'éco-efficacité est quant à elle un concept microéconomique, qui peut se traduire dans la conception des produits industriels par des analyses de cycle de vie multidimensionnelles, utilisant un ensemble de critères ;
  • le facteur 10, qui correspond à la possibilité de créer des produits et services qui ont une intensité de consommation de ressource naturelle très inférieure aux méthodes conventionnelles ; il a été créé sur une initiative de l'institut allemand de Wuppertal ;
  • le material intensity per service unit, un concept d'écologie industrielle.

La difficulté s'accroît lorsqu'il s'agit d'intégrer concrètement ces préoccupations dans la gestion publique et dans celle des entreprises.

Réduction de l'émission de gaz à effet de serre[modifier | modifier le code]

La prise en compte des questions environnementales du point de vue de l'émission de gaz à effet de serre est prévue dans le protocole de Kyoto. Des quotas d'émission de gaz à effet de serre sont inscrits dans le protocole, mais ne sont pas respectés par tous les pays.

Cependant, on se heurte à deux écueils principaux :

Il est donc difficile de généraliser cet outil à tous les aspects de la vie économique, d'autant plus que les services sont aujourd'hui majoritaires dans les économies développées.

Création d'indicateurs[modifier | modifier le code]

L'évaluation environnementale inclut souvent une évaluation de la soutenabilité, qui prend en compte les trois piliers du développement durable, au travers d'indicateurs de gestion et de protection ou restauration des ressources naturelles. Elle peut s'appuyer sur des labels environnementaux, certifications ou normes telles que :

  • la série de normes ISO 14000 pour l'environnement ;
  • le standard SA 8000 pour les fournisseurs ;
  • la norme OHSAS 18001 pour l'hygiène, la santé et la sécurité au travail.

Les entreprises emploient également des batteries d'indicateurs s'inspirant du GRI.

Modèle pression-état-réponse[modifier | modifier le code]

Le modèle pression-état-réponse (PER) de l'OCDE a l'avantage, pour chaque indicateur environnemental, de distinguer la pression, l'état et la réponse.

Dans le domaine de la finance[modifier | modifier le code]

La notion de soutenabilité peut avoir dans le domaine financier un sens particulier. On parle de :

  • « soutenabilité d'une dette » : elle est dite soutenable tant qu'elle est compensée par un flux de ressources (recettes publiques, exportations, PNBetc.) qui reste stable. La soutenabilité n'est pas synonyme de solvabilité, dans laquelle la dette peut être remboursée à court ou moyen terme[10]. Ainsi de la soutenabilité de la dette publique ;
  • « soutenabilité d'un régime de change » (taux de change) : expression utilisée dans le cadre de l'application de la théorie des zones monétaires optimales et du profil ex ante du pays qui est entré dans une union monétaire. Il ne peut alors plus fixer sa monnaie seul, ce qui lui confère des avantages, mais peut (dans le cas d'un pays pauvre) limiter sa capacité ou sa vitesse de résilience face à des chocs économiques ou financiers asymétriques et d'origine externe (qui autrement peuvent parfois être atténués simplement en ajustant le taux de change et le taux d'intérêt alors utilisés comme variables d'ajustement, d'après l'économiste Robert P. Flood (1979)[11].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Néologisme dont l'équivalent anglais est sustainability.

Références[modifier | modifier le code]

  1. « durable », dictionnaire Larousse.
  2. Norme NF X60-500, d'octobre 1988. Terminologie relative à la fiabilité, maintenabilité et disponibilité.
  3. Anne Jégou, Territoires, acteurs, enjeux des dynamiques de durabilité urbaine : le cas de la métropole parisienne, thèse de doctorat de géographie, Paris, Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2011, p. 35.
  4. Vincent Clément, « Le développement durable : un concept géographique ? », Géoconfluences, 2004.
  5. « Thèmes »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), Organisation de coopération et de développement économiques.
  6. (en) « Viewpoint : Weak Versus Strong Sustainability », Tinbergen Institute.
  7. Plamena Halacheva, Vers une nouvelle politique de développement durable de l'Union européenne ? Le défi régional, mémoire de master, Nice, Centre international de formation européenne, 2007, p. 16 et 18.
  8. Collectif Forum pour d'autres indicateurs de richesse (FAIR), « Carte blanche : Au-delà du PIB : un sujet qui mérite débat », Le Soir, 24 juin 2009.
  9. (en) Herman E. Daly, « Institutions for a Steady-State Economy », in Id., Steady State Economics, Washington, Island Press, 1991 (1977).
  10. Marc Raffinot, « Quel développement durable pour les pays en développement ? : Soutenabilité de la dette des pays pauvres très endettés », Cahier du Groupement d'intérêt scientifique pour l'étude de la mondialisation et du développement (GEMDEV), no 30, Paris, université Paris Dauphine, Eurisco, Dial, 2004, 74 p.
  11. (en) Robert P. Flood, « Capital Mobility and the Choice of Exchange Rate System », International Economic Review, 20, 1979.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]