Principe d'équivalence temps-température

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Le principe d’équivalence temps-température permet de préciser la dépendance à la température des fonctions viscoélastiques linéaires telles E (t), E' (f) et E'' (f).

L’effet de la fréquence de sollicitation sur les grandeurs viscoélastiques d’un polymère est inverse à celui de la température. Les effets de la fréquence et de la température sont donc dépendants. Ce phénomène est à l’origine du principe d’équivalence temps-température en viscoélasticité linéaire.

Après avoir réalisé une série d’essais dynamiques (par exemple en analyse mécanique dynamique), il peut être utilisé pour corréler les grandeurs viscoélastiques intrinsèques d’une matière (module de Young E* ou module de cisaillement G* complexes, facteur de perte tan δ, etc.) pour toutes les températures et fréquences mesurées.

Ce principe et la loi de Williams-Landel-Ferry (WLF) permettent de déterminer les coefficients intrinsèques C1 et C2 d’un polymère.

Principe physique

Fig. 1. Mesures (par DMA) : module de conservation E' (f, T) et facteur d’amortissement tan δ (f, T)

Un polymère (corps viscoélastique) est soumis à une sollicitation dynamique. Si la fréquence d’excitation est suffisamment basse (temps très supérieur au temps caractéristique τ appelé aussi temps de relaxation, fonction de la masse moléculaire), le comportement visqueux est prépondérant et toutes les chaînes ont le temps de « répondre » au cours d’une période de contrainte. Par contre, à plus haute fréquence, les chaînes n’ont pas le temps de répondre totalement et le blocage artificiel qui en résulte se traduit par une augmentation du module.

D’autre part, à fréquence constante, une augmentation de la température se traduit par une diminution du module, suite à l’augmentation des volumes libres et des mouvements de chaînes.

Les composantes M' et M'' d’un module complexe M* (par exemple E* ou G*) expérimental dépendent notamment de la fréquence et de la température.

Principe d’équivalence temps-température

Fig. 2. Tracé de E = f (t, T)

On considère le module d’élasticité E à deux températures T et T0 telles que T > T0. La contrainte relaxe plus vite à la température la plus élevée (voir figure 2).

Le principe d’équivalence temps-température stipule que le passage de T à T0 revient à multiplier l’échelle des temps par un facteur constant aT→T0 uniquement fonction des deux températures T et T0.

Ce qui peut se formuler par :

E (t, T) = E (t*aT→T0, T0)

en considérant le module d’élasticité comme une fonction des deux variables temps et température.

aT→T0 est appelé facteur de décalage ou facteur de glissement (shift factor en anglais).

Si T > T0 ⇒ aT→T0 > 1 (voir fig. 2).

Si T < T0 ⇒ aT→T0 < 1.

Si T = T0 ⇒ aT→T0 = 1 (voir fig. 3).

La forme du principe d’équivalence (t, T) pour les modules dynamiques s’obtient de manière similaire :

M' (f, T) = M' (f/aT→T0, T0)
M'' (f, T) = M'' (f/aT→T0, T0).

Une diminution de température augmente les temps caractéristiques et diminue les fréquences caractéristiques.

Relation entre le facteur de décalage et les viscosités limites

On montre la relation entre les viscosités en écoulement continu (sur le plateau newtonien) :

.

Loi de Williams-Landel-Ferry

Fig. 3. Tracé du facteur de décalage pour une température de référence T0[1]

La loi WLF, associée au principe d’équivalence temps-température, permet de rendre compte des variations de la viscosité limite de polymères amorphes en fonction de la température, pour des températures proches de la température de transition vitreuse Tg. L’équation de Williams-Landel-Ferry empirique exprime également la variation avec la température du facteur de décalage.

Un traitement mathématique calcule le facteur de décalage pour chacune des composantes M' et M'' du module complexe mesuré M*. Une bonne corrélation entre les deux facteurs de décalage donne les valeurs des coefficients C1 et C2 caractéristiques de la matière. La loi WLF n’est vérifiée que dans la plage approximative de température [Tg, Tg + 100 °C]. L’équation WLF de variation du facteur de décalage est :

Les coefficients (ou constantes) et (positifs) dépendent de la température de référence T0.

Pour Tréf = Tg :

( est le coefficient C1 à Tg)

et :

.

et sont les coefficients de l’équation WLF.

Ferry a proposé des « constantes » (pour un polymère donné) dans un tableau[2]. Elles sont approximativement identiques pour un grand nombre de polymères :

.

Mais on observe expérimentalement des écarts aux valeurs du tableau. Ces ordres de grandeurs (utiles) sont à respecter : ils sont un bon indicateur de la qualité d’une corrélation.

Application : construction de courbes maîtresses

Le principe de superposition temps-température permet, à partir d’une fenêtre spectrale initiale [f1, f2] et d’une série d’isothermes dans cette fenêtre, un calcul des courbes maîtresses d’un matériau qui s’étendent sur une plage de fréquence plus large. Une température (T0) est prise comme référence pour fixer l’échelle des fréquences (la courbe à cette température ne subit aucun décalage).

Dans la fenêtre [f1, f2], si la température augmente par rapport à T0, E' (f) diminue (voir fig. 4), cela revient à explorer une partie de la courbe maîtresse correspondant à des fréquences inférieures à f1, en restant à T0. Inversement, baisser la température revient à explorer une partie de la courbe correspondant à des fréquences élevées.

En choisissant une température de référence T0, les translations (horizontales) de T à T0 ont pour amplitude lg aT→T0 suivant l’axe des fréquences (fig. 4).

Dans la zone de transition vitreuse, le facteur de décalage est décrit par une fonction homographique de la température.

Le comportement viscoélastique est ainsi modélisé et permet une extrapolation au-delà de la plage de fréquences expérimentales qui s’étend typiquement de 0,01 à 100 Hz.

Fig. 4. Courbe maîtresse de E' (f1=1 Hz, f2=1 000 Hz) pour une température T0
Fig. 5. Courbes maîtresses de E' et tan δ pour une température T0

Limites

L’échantillon amorphe doit être sollicité dans sa zone de comportement linéaire (application d’un faible taux de déformation, par exemple 0,01 %, pour se situer dans la zone élastique) et dans la plage de température approximative [Tg, Tg + 100 °C].

L’étude permettant de déterminer aT→T0 ainsi que les coefficients C1 et C2 nécessite de nombreux essais (double balayage fréquence/température, ce qui représente au minimum une centaine de points de mesure).

Notes et références

  1. Courbe générée par logiciel à partir des données d’un essai comportant un double balayage fréquence/température sur une grandeur viscoélastique.
  2. Intitulé : Parameters characterizing temperature dependence of aT for various polymer systems ; ce tableau donne, pour Tréf = Tg, les valeurs et de plusieurs dizaines de polymères.

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie