Breton

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Ceci est une version archivée de cette page, en date du 12 mars 2006 à 15:47 et modifiée en dernier par Jm29 (discuter | contributions). Elle peut contenir des erreurs, des inexactitudes ou des contenus vandalisés non présents dans la version actuelle.

Fichier:Breton.gif

erreur du modèle {{langue}} : texte absent

Le breton (brezhoneg en breton) est une langue celtique insulaire du groupe brittonique.

Une personne qui le parle est dite « bretonnante », terme ancien en français. Cependant, est apparu depuis quelques années dans les médias le terme « brittophone », encore peu employé. Cette langue est parlée par une partie de la population dans la partie occidentale de la Bretagne (à partir de Saint-Brieuc au nord et de Vannes au sud). De nos jours, la Bretagne compte deux langues populaires en plus du français : le breton en Basse Bretagne et le gallo en Haute Bretagne.

Des controverses sur l'état de la langue bretonne existent, comme dans la plupart des langues, entre les partisans d'un breton populaire et les partisans d'une langue n'utilisant pas ou très peu d'emprunts au français. De plus, ces controverses portent aussi sur l'écriture de la langue (par exemple, entre l'écriture unifiée dite KLTG - ou Kerne, Leon, Treger, Gwened -, c.-à-d. cornouillais, léonard, trégorois, vannetais) et celle dite universitaire.

Histoire

Le breton est une langue celtique de la branche brittonique, en cela proche du gallois et plus encore du cornique.

À propos de breton et gaulois

Certains historiens, comme Léon Fleuriot dans son ouvrage Les Origines de la Bretagne, se basant sur César et Tacite, l'ont présenté comme également proche du gaulois disparu au milieu du VIIe siècle : plusieurs peuples vivaient des deux côtés de la Manche, et les échanges étaient courants. De plus la notion de Gaule et Gaulois, héritée de César, n'est peut-être pas adaptée à la situation politique linguistique des peuples et langues celtiques de l'époque. L'on peut admettre que le gaulois des côtes de la Manche était assez proche du breton des côtes opposées, et plus qu'il n'était du gaulois des bords de la Méditerranée. Mais on admet généralement que l'on connaît peu l’état du breton en Armorique à l’époque où des Bretons insulaires y migrèrent, et encore moins l’état de la langue gauloise à l'époque, ce qui rend hasardeux toute comparaison.

Dans les années 1940 et 1950, le chanoine Falc'hun avança que le breton aurait bénéficié d'un apport du gaulois (étant présupposé que le gaulois serait resté vivace en Armorique comme il l'était encore dans certaines parties de la Gaule). Pour lui, ceci expliquait ainsi la principale différence du vannetais, à savoir son accent sur la finale des mots et non la pénultième. Il n'utilisait aucun élément de la linguistique moderne et se basait uniquement sur l'état de la langue bretonne au XXe siècle pour émettre ses hypothèses. Celles-ci ont été réfutées scientifiquement par Kenneth Jackson dans son ouvrage sur l'histoire de la langue bretonne.

On sait aujourd'hui que :

  • le KLT (voir l'article ou les explications plus bas) comme le gallois sont accentués sur la pénultième,
  • le vieil irlandais était accentué sur la première syllabe,
  • le gaulois était accentué sur l'antépénultième, l'initiale ou la finale.

Cette diversité de la position de l'accent tonique dans les langues celtiques interdit toute supposition sur la place de l'accent en vieux celtique et ne permet pas d'expliquer par un substrat gaulois les spécificités du vannetais.

Par contre, la romanisation semble avoir été bien plus avancée dans le vannetais où les vestiges gallo-romains sont bien plus nombreux que dans le reste de la Bretagne. De plus, la palatalisation de /k/ et /g/ est un phénomène inhérent au bas-latin des IIe et IIIe siècles, donc avant les premières immigrations bretonnes. Enfin, le vannetais et le bas-cornouaillais ont effectué plus d'emprunt au roman que les autres dialectes surtout le long de la route Vannes-Quimper. Il convient tout de même de noter que l'accentuation du vannetais était celle du vieux-breton dans son ensemble. Son maintien peut être dû, lui, à l'influence romane.

Périodes

On distingue aujourd'hui différentes périodes dans l'évolution du breton :

À l'époque de la chute de l'empire romain, le breton était parlé de l'estuaire de la Loire à celui de la Clyde (rivière de Glasgow). C'est dans ce breton qu'écrivent les poètes Aneurin et Taliesin dans les royaumes bretons du sud de l'Écosse actuelle. Au XIXe siècle en France, on commence à appeler cette langue le « brittonique » pour le distinguer du breton armoricain.
c'est à cette époque que le breton est devenu une langue propre à la Bretagne armoricaine. Il a été étudié par Léon Fleuriot dans sa Grammaire et son Dictionnaire du Vieux Breton.
Fichier:Gallo and Breton.gif

Aujourd'hui, il est parlé et écrit à l’ouest d’une ligne reliant, grosso modo, Plouha et Vannes. À noter encore que des groupes de bretonnants existent dans toutes les les grandes villes de France, ainsi qu'au Royaume-Uni et en Amérique du Nord. Parler des élites de l'État breton jusqu'au XIIe siècle, il ne fut ensuite plus que celui du peuple de Bretagne occidentale ou Basse-Bretagne (Breizh Izel…) quand successivement la noblesse, puis la bourgeoisie bretonnes se francisèrent. Pour l'écrit, le duché de Bretagne employa le latin puis le français (XVe siècle).

Tentatives d'éradication du breton

Même après la réunion du duché à la France, l'Ancien Régime, faisant peu de cas des langues locales à de rares exceptions, accepta le breton comme il était : essentiellement une langue vernaculaire et utilisée pour le culte. Cependant son usage fut interdit dans l'administration, dans la ligne de l'ordonnance de Villers-Cotterêts qui prescrivait l'emploi du français dans les cours de justice et les actes officiels. Encore cette interdiction fut de portée symbolique, car le duché de Bretagne avait adopté le latin puis le français comme langue administrative plus d'un siècle avant le royaume de France.

Le véritable combat commença sous la Révolution. En 1794, Barrère effectue une présentation au Comité de salut public de son « rapport sur les idiomes » dans lequel il déclarait que « le fédéralisme et la superstition parlent bas-breton ». On cherchait alors à faire disparaître les langues autres que le français, les « langues régionales de France », dont le breton.

Le 19 juillet 1925 lors de l'inauguration du Pavillon de la Bretagne à l'Exposition Universelle de Paris, le ministre de l'Instruction Publique, Anatole de Monzie, résume sa politique : « pour l'unité linguistique de la France, la langue bretonne doit disparaître ! ».

Fin mars 1941, Joseph Barthélémy, ministre de la Justice du gouvernement de Vichy déclare : "Je m'opposerai à l'enseignement de la langue bretonne dans les écoles primaires". En 1972, Georges Pompidou, président de la République disait encore : « il n'y a pas de place pour les langues régionales dans une France destinée à marquer l'Europe de son sceau ».

L'influence catholique

L'Église et la langue bretonne

Un certain nombre de catholiques bretons prirent la défense de la langue et la culture bretonne. L'Église n'a pas toujours été indifférente à la spécificité bretonne. A tout le moins peut-on dire qu'elle n'a tenté à aucun moment, dans les siècles passés de faire adopter la langue et la culture française officielle aux Bretons qui parlaient leur langue et restaient attachés à leurs traditions.

Aux XVIIe et XVIIIe siècles, il a été publié, par les gens d'Église, quantité d'ouvrages religieux, ou même de divertissement honnête, destinés à la population des campagnes en breton.

La position au début du XXe siècle

Au début du XXe siècle. au moment du conflit entre l'Église et l'État sous la Troisième République, le clergé de l'évêché de Quimper, auquel les autorités avaient interdit de prêcher et de faire le catéchisme en breton [1], a mené, pendant un certain temps, un véritable combat pour la langue bretonne. Dans un port de pêche faisant à cette époque figure de petite ville, alors que le catéchisme, dans cette localité se faisait en breton et en français, le catéchisme en français étant réservé aux familles bourgeoises, les prêtres de la paroisse passaient dans les familles populaires pour demander aux parents d'envoyer leurs enfants au catéchisme en breton, la tendance des couches populaires étant de s'intégrer culturellement à la classe bourgeoise dominante; et donc d'envoyer leurs enfants au catéchisme français.

Mouvements et publications d'inspiration chrétienne avant guerre

Malheureusement, il ne s'est agi là que d'une réaction passagère du début du siècle dernier, suite au conflit entre l'Église et l'État. Pour réagir, il fallait mettre en place tout un système d'enseignement du breton. Il y eut quelques initiatives vers 1900-1914 dont le Bleun Brug créé en 1905 par l'abbé Perrot.

De nombreux mouvements d'inspiration chrétienne de défense de la langue bretonne, se sont fait jour en Bretagne occidentale :

  • Dans le Trégor, par exemple, sont parus pendant longtemps des hebdomadaires populaires entièrement rédigés en breton et inspirés par l'Église, plus ou moins directement :
  • Au pays de Vannes, l'évêché, bien qu'il y ait eut des publications chrétiennes en breton publiées par la librairie Galles-Lafolye (dont la revue Brediah er Fé), n'était pas intervenu pour créer ou soutenir un mouvement bretonnant d'inspiration catholique au début du siècle dernier, les manifestations bretonnes dans cette région étant organisées sous la responsabilité du "Bleun-Brug" du diocèse de Quimper.

Il faut citer aussi les ouvrages catholiques en langue bretonne et destinés aux fidèles. Ainsi les nombreux livres de cantiques et missels qui ont permis la conservation de cantiques anciens. Un des exemples les plus célèbres fut le livre "Buez ar Zent" (La Vie des Saints) écrit par le chanoine Morvan à la fin du XIXe siècle, qui décrit en breton et parfois de manière très romancée la vie des saints en suivant le calendrier catholique. Écrit en breton cornouaillais, ce livre était lu chaque jour dans toute la Bretagne bretonnante.

Mouvements et revues d'inspiration chrétienne après guerre

À la fin de la deuxième guerre mondiale, les revues catholiques populaires en breton répandues en Léon et Cornouaille disparurent :

Lesquelles furent remplacées pendant un certain temps par :

Dans les années 60-70, seront publiée :

  • une revue d'inspiration chrétienne pour les enfants "Wanig ha Wenig", au début sous la responsabilité de l'abbé Armand Le Calvez et de l'abbé Youenn Troal
  • la revue "Ar C'hrist d'an Indianed", ("Le Christ aux Indiens"), inspirée surtout par l'expérience missionnaire de l'abbé Youenn Troal sous l'égide du "Fidei Donum" au Pérou ; cette revue parut au cours des années 60. La revue "Imbourc'h" publia le journal de son second séjour parmi les Amérindiens à la fin des années 80. À son retour, il fut recteur de Plounéour-Ménez, dans la région de Morlaix, et fit paraître à cette époque des textes d'inspiration religieuse dans la revue "Ar Fulenn" ("L'Etincelle") dirigée par lui.
  • la revue d'étude mensuelle Imbourc'h, liée à une initiative laïque, qui paraît régulièrement depuis 1969, et qui a publié un grand nombre d'œuvres religieuses, comme la traduction des "Confessions de saint Augustin" ou des écrits autobiographiques de sainte Thérèse de l'Enfant Jésus, ainsi qu'une version en breton du Bréviaire Romain, en une dizaine de volumes.

Ouvrages liturgiques en breton

Plusieurs religieux bretons étaient en contact avec l'École biblique et archéologique française de Jérusalem et en avaient suivi les cours, avaient appris l'hébreu et formeront des groupes de travail bibliques. Ces prêtres se feront remarquer par des travaux de recherches et de traduction de la Bible qu'ils traduiront directement en breton à partir du texte original en hébreu ou du grec en breton pour le Nouveau Testament. La personnalité la plus éminente de ces groupes de travail était l'Abbé Loeiz Ar Floc'h. Il faut citer aussi l'abbé Guilherm Dubourg, l'abbé Job Lec'hvien, l'abbé Pipi Gall. Ces deux derniers fondèrent les Editions An Tour Tan à Kergrist-Moëlou.

Parmi les activités inspirées par la foi et s'exprimant en breton, il faut signaler :

  • les retraites prêchées par l'abbé Loeiz Ar Floc'h, ainsi les "carêmes" qui furent également prêchés plusieurs fois de suite en breton au cours des années 60-70, dans une des paroisses de la ville de Brest.
  • "Kenvreuriezh ar brezhoneg" ("Confrérie du Breton"), association fondée au séminaire de Quimper après la dernière guerre, et dirigée pendant un certain temps par Mgr. Favé, a publié des versions en breton de divers textes liturgiques, destinés plus spécialement au diocèse de Quimper ; certains membres de cette association ont publié récemment une nouvelle traduction en breton du Nouveau Testament, destinée elle aussi, plus spécialement au diocèse de Quimper. La "Kenvreuriezh ar Brezhoneg" avait d'ailleurs une sorte d'existence officielle au diocèse de Quimper.

Jusque récemment, il n'existait aucune œuvre bretonnante soutenue officiellement par aucun des évêchés bretons, sauf le centre de rencontre bretonnant de Minihi-Trelevenez, dirigé par l'abbé Job Irien, qui publie un bulletin ainsi que des traductions de textes liturgiques, particulièrement une partie de la "Prière du Temps Présent". Cependant l'ensemble des activités des bretonnants catholiques du diocèse de Quimper même soutenues par la hiérarchie, se situe actuellement au niveau d'une élite.

Depuis l'année 2000 il existe une commission permanente mise en place par les trois évêchés de la Bretagne occidentale pour établir de nouveaux textes liturgiques et un Missel à l'usage de ces trois évêchés, mais cette initiative des évêques de la Bretagne occidentale répondait à la demande formulée par une Congrégation romaine de présenter une version unique du Missel pour les trois évêchés, une des versions ayant été établie uniquement pour le diocèse de Quimper.

Enseignement du breton

Enseignement à Rennes

Histoire

Au milieu du XIXème siècle, selon François Vallée, il existait des écoles privées chrétiennes qui, entre autres choses, apprenaient à lire en breton et en latin, et enseignaient quelques rudiments de français littéraire. Un certain nombre d'évêques, également au XIXème siècle, en Basse-Bretagne, Mgr Graverand en particulier, ont essayé d'organiser un enseignement du breton et de l'histoire de la Bretagne, parfois en breton, comme le montre l'histoire de Bretagne en breton rédigée par Anna Mezmeur, religieuse de la congrégation du Saint-Esprit.

Les politiques anti-breton de l'Après-Révolution

En 1793, l’abbé Grégoire rédige pour la Convention un rapport intitulé « Rapport sur la nécessité et les moyens d’anéantir le patois et d’universaliser l’usage de la langue française ». Il se justifie en expliquant que « notre langue et nos cœurs doivent battre à l’unisson. »

Une politique linguistique impérialiste est alors mise en place. Les lois, les actes administratifs, les œuvres culturelles, les journaux, les écrits savants seront désormais en français. On tente également de valoriser la langue française tout en dévalorisant les autres « idiomes ».

Dans un rapport à la Convention daté du 1794, Barrère affirme que le français est « la plus belle langue d’Europe » alors que « le fédéralisme et la superstition parlent le bas-breton, l’émigration et la haine de la République parlent allemand, la contre-révolution parle italien et le fanatisme parle le basque. » Il propose de « [briser] ces instruments de dommage et d’erreurs ».

C’est l’école qui va être chargée de propager l’idéologie nouvelle en même temps que la langue française. L’institution scolaire sera donc utilisée à des fins politiques.

Le 21 octobre 1793, une loi institue des écoles primaires d’état où les élèves apprennent le français. Le 26 octobre, par décret, la Convention décide que « le français sera seul en usage à l’école. » Le 27 janvier 1794, un décret ordonne la nomination, dans chaque commune où on ne parle pas français, d’un instituteur francophone. Mais devant les difficultés de trouver des instituteurs parlant français, la Convention devra revenir sur ces textes d’application difficile.

Politique scolaire contre le breton, sous la IIIe République

Sous la IIIe République, les pouvoirs publics désirent assurer l'unité française et faciliter la promotion sociale au sein de la République. Pour ces raisons, les responsables de l'enseignement public commencent à proscrire l'usage de tous patois ou parlers régionaux à l'école. A partir du milieu du XIXe siècle, le pouvoir central réprime les langues dites régionales et les présente comme arriérées, rétrogrades, et facteurs de frein au progrès. A partir de la fin du XIXe, ces langues sont interdites dans l'enseignement, au grand dam d'une partie du corps enseignant qui se demande comment enseigner dans de telles conditions à des élèves non francophones.

Le français contre le breton ?

Ainsi en 1902, le ministère Combes promulgue par décret l'interdiction de « l'usage abusif du breton » .

Les écoles religieuses suivent rapidement et le breton n'est plus enseigné à partir du début du XXe mais continue à être transmis de génération en génération par voie orale.

Il faut noter quelques initiatives particulières tendant à promouvoir un certain enseignement de la langue bretonne dans les Ecoles chrétiennes, depuis celle du Frère Constantius au début du siècle, au pays de Léon principalement, jusqu'à celle du Frère Seité, après la dernière guerre.

La politique scolaire contre le breton date de la fin du XIXe siècle. Elle utilise alors deux méthodes :

  • d'une part, le breton n'est absolument plus enseigné à l'école,
  • d'autre part, le français doit être la seule langue utilisée dans les écoles républicaines, y compris dans les cours de récréation. Comme les autres locuteurs des langues parlées en France et dans les possessions françaises d'Outre-Mer, les élèves bretonnants subissent des persécutions officielles au moyen notamment de pratiques humiliantes. Ainsi se répand la pratique du « symbole », petit objet qui passe au cou d'élève à élève pendant la récréation à chaque fois que l'un d'entre eux parle breton, avec une punition pour le dernier élève à l'avoir.

Certains pensent que la politique française vise à imposer pour des motifs idéologiques la langue française comme langue unique de la République (« je ne veux voir qu'une seule tête, n'entendre qu'une seule langue »). Pour illustrer la vigueur de cette politique, ils s'appuient sur une phrase qui aurait été longtemps affichée dans certaines écoles primaires : « Il est interdit de cracher par terre et de parler breton », phrase qui juxtapose deux interdictions de nature différente, illustrant bien la nature des moyens employés pour parvenir à réaliser un linguicide en Bretagne.
L'exemple est-il bien choisi ? À ce jour, personne ne peut attester l'existence de cette affiche. Fañch Broudic qui a mené une étude sur le sujet conclut à une extrapolation :

« Autant le principe édicté en 1897 par l'Inspecteur d'Académie du Finistère, Dosimont, selon lequel pas un mot de breton ne devait être prononcé ni en classe ni dans les cours de récréation est couramment référencé, autant il est difficile de retrouver trace de l'interdiction « de cracher par terre et de parler breton »… Sous réserve d'inventaire complémentaire, il faut considérer que la phrase que l'on brandit désormais comme un contre-slogan est, historiquement, une extrapolation. »

Cependant, si cette phrase n'a pas existé telle quelle, elle résume bien la volonté du ministère de l'Éducation française ([2]). En effet, le même auteur cite le « Règlement pour les écoles primaires élémentaires de l'arrondissement de Lorient », adopté et arrêté par le Comité supérieur de l'arrondissement, en 1836 et approuvé par le recteur en 1842, qui stipule : « Art. 21. Il est défendu aux élèves de parler breton, même pendant la récréation et de proférer aucune parole grossière. Aucun livre breton ne devra être admis ni toléré. » S'exprimer en breton et parler « grossièrement » font l'objet de la même prohibition (dans « La pratique du breton de l'Ancien Régime à nos jours », chapitre 17).

L'émergence d'un enseignement du breton

Régulièrement, des voix s'élèveront en faveur d'un multi-culturalisme et d'un respect des autres cultures mais elles resteront minoritaires. En particulier, de grandes pétitions (Er Brezhoneg er skol dans les années 1930, la grande pétition populaire d'Emgleo Breiz en 1967) et des manifestations régulières demanderont l'enseignement du breton.

Yann Kerlann organise l'enseignement du breton à l'école publique de Plestin-les-Grèves en novembre 1942, non loin de Lannion, définitivement interrompu en 1944. Cette école est dirigée par Yann Kerlann qui après la mort de Yann Sohier a été le responsable d’Ar Falz, mouvement qui regroupait les instituteurs publics partisans de l’enseignement du breton.

En avril 1945, le Conseil de la faculté des lettres de Rennes émet un voeu en faveur de l'admission du breton à l'oral du baccalauréat. : "Les signataires tiennent à affirmer le loyal attachement à la France de tous les Bretons, attachement que garantiraient, s'il en était besoin, les quatre années de résistance acharnée soutenue par la Bretagne contre l'Allemagne et l'échec retentissant infligé aux tentatives de divison des complices de l'ennemi.". En 1945, Ar Falz propose de reprendre aux laïques de Bretagne la pétition interrompue par la guerre, en faveur de l'enseignement de la langue bretonne.

Dans les années 1940 et 1950, l'administration répond timidement par des mesures symboliques (« autorisation » d'enseigner les langues régionales quelques heures, ...) mais en pratique elles sont suivi de peu d'effets.

En 1951, est votée la loi Deixonne autorisant l'organisation de cours facultatifs pour quatre langues « locales », dont le breton. Mais l'impact en est réduit, non seulement en raison des dispositions limitées de la loi elle-même et de l'absence de décrets d'application (qui ne paraîtront que 30 ans plus tard), mais également à cause de l'application restrictive qui en est faite. De fait, même si l'enseignement était autorisé dans certaines conditions, il n'était possible presque nulle part. Et aucun enseignant n'étant formé, aucun diplôme n'existant, quasiment personne ne pouvait en assurer l'enseignement.

L'abbé Armand Le Calvez (revue d'étude pédagogique intitulée "Skol) est le fondateur et le directeur de la première école entièrement en breton, une école catholique, "Skol Sant-Erwan" ("Ecole Saint-Yves"), qui dura trois années, entre 1958 et 1961, à Plouezec, entre Saint-Brieuc et Paimpol. L'abbé dut renoncer à son entreprise à la suite des nouvelles lois qui réglaient les rapports des Ecoles privées et de l'État à partir de 1962 : ces lois ne lui laissaient plus la liberté de choisir son programme d'enseignement.

Cette politique, utilisée aussi au sein de l'armée, s'est poursuivie jusque dans les années 1960. Peu de bretonnants s'en inquiètent, persuadés que le breton n'est pas l'avenir pour leurs enfants ou, au mieux, que ceux-ci l'apprendront par le fait de vivre dans un milieu bretonnant. Mais dans les années 50-70, les enfants exclusivement bretonnants se sont raréfiés, ils sont soit bilingues français-breton soit monolingues français. Puis le bilinguisme s'est progressivement éteint chez les enfants, et au début des années 80, le pourcentage d'élèves parlant breton au début de leur scolarisation est marginal. Le breton est alors quasi-exclusivement parlé par des adultes qui très rarement savent l'écrire.

Diwan, et le changement des années 80

Signalisation bilingual dans les rues de Quimper

C'est au vu de cette situation qui rendait impossible l'enseignement du breton que furent créées en 1977, les écoles Diwan (le germe), qui pratiquent la méthode par immersion pour l'apprentissage du breton. Voir encore l'article Controverses sur le breton

En 1982, une circulaire Savary ouvre la possibilité d'une filière de classes bilingues dans l'enseignement. Se mettent alors en place des classes bilingues breton/français dans l'enseignement public à partir de 1983, et dans l'enseignement catholique à partir de 1990.

Les parents de ces élèves bilingues sont regroupés dans deux associations : Div Yezh (deux langues) créée en 1979 pour les écoles publiques, et Dihun (éveil) pour les écoles catholiques (1990 : Dihun-56 ; 1993 : Dihun Penn-ar-Bed et Dihun-Breizh).

À la rentrée scolaire 2005, les effectifs affichés par ces écoles, tous niveaux confondus, sont de :

  • 2896 dans les écoles Diwan
  • 3851 élèves dans les classes bilingues des écoles publiques
  • 3659 élèves dans les classes bilingues des écoles catholiques

Il s'agit essentiellement d'enfants en maternelle et en primaire.

Opposition actuelle à l’enseignement du breton

C’est pour les tenants de la langue bretonne généralement  :

  • le refus d'ouvrir de nouvelles classes bilingues, dans les écoles publiques, d’assurer la continuité de l'enseignement du breton dans les collèges ou lycées, ou d'assurer l’enseignement du breton comme deuxième langue vivante (légalement possible, pratiquement inexistente) ou comme troisième langue ;
  • l'interdiction aux élèves étudiant le breton de choisir certaines options (langues ou Sciences Économiques et Sociales, filière S) dans certains établissements, comme le lycée Zola à Rennes ;
  • les propositions répétées de regroupement des classes de breton en un seul établissement ;
  • la mutation des professeurs de breton malgré la signature d’un accord l’interdisant ;
  • le remplacement de professeurs par des cours par visio-conférence, à l’efficacité douteuse ;
  • la diminution du nombre de CAPES de breton.

C’est aussi les pressions de cercles qui se présentent comme "libres-penseurs", de groupes politiques, de personnalités médiatico-culturelles pour demander soit la fermeture des écoles Diwan comme à Saint-Nazaire ou Nantes, soit la suppression de l’enseignement du breton à l’Université, comme à Rennes et Nantes, soit la fin des subventions aux éditeurs en langue bretonne.

Situation du breton

Dans ce contexte, le breton est en voie de disparition rapide. Au début du XXe siècle, la moitié de la population de Basse-Bretagne ne connaissait que le breton, l'autre moitié étant bilingue breton-français.

Une partie des bretonnants passera au français dans les années 30 pour plusieurs raisons :

  • le français leur permet de communiquer entre eux : les différences entre les dialectes bretons ne permettent de se comprendre d'une région bretonnante à une autre qu'à condition d'avoir une connaissance du standard écrit. Le breton oral sert alors à s'exprimer avec ses proches, et le français est utilisé pour la communication plus formelle ;
  • c'était le moyen de communiquer avec les autres Français suite au brassage national accéléré par la première guerre mondiale.

Le passage au français sera plus rapide et plus définitif pour les citadins que dans le monde rural, du fait d'un environnement francophone plus présent (administration, école, journaux, etc.)

Le reste des bretonnants, après la deuxième guerre mondiale, passera au français pour plusieurs raisons :

  • l'idée que les opportunités de travail et la promotion sociale (par ex. pour les emplois administratifs et militaires) passe par la maîtrise obligée du français. A la volonté de sortir du sous prolétariat et de la paysannerie, si mal vue, le monoliguisme bretonnant apparaissait être un handicap. Ceci explique que de très nombreuses familles soient passées du monolinguisme breton, au bilinguisme puis au monolinguisme francophone par facilité. Ces familles étaient persuadées que savoir le breton "ne servait a rien..."
  • le chemin de fer a considérablement augmenté les brassages de population (venue de touristes, émigration massive de paysans sans terres vers les villes plus francophones) ; avec la généralisation des congés payés, on assiste, notamment en été, au retour des émigrés de deuxième génération (nés hors de Bretagne) qui ne parlent plus breton ou le parlent mal.

Ils n'étaient plus que 100 000 monolingues bretons en 1950, leur nombre est quasi-nul depuis les années 80. Environ 1 300 000 parlaient breton en 1930 ; aujourd'hui, le breton est encore parlé et compris par environ 300 000 personnes seulement, essentiellement des personnes âgées (64 % des locuteurs ont plus de 60 ans). L'UNESCO classe le breton parmi les langues gravement menacées. Dans son livre Qui parle breton aujourd'hui ? (voir bibliographie), Fañch Broudic analyse l'enquête de TMO réalisée en 1997 ; à cette date, il y avait très précisément 0,2% de jeunes de 15 à 19 ans capables de parler breton, soit moins de cinq cents personnes.

Renouveau de la langue bretonne

En 1805, l'Académie Celtique est fondée par Napoléon Ier, c'est la première association étudiant la langue et la culture bretonnes. Le président est Théophile Malo Corret de la Tour d'Auvergne.

En 1807, Jean-François Le Gonidec publie une Grammaire celto-bretonne dans laquelle il réforme l'orthographe du breton, puis en 1821 un Dictionnaire celto-breton.

En 1839, Villemarqué publie le Barzaz Breiz, recueil de chants traditionnels en breton, présentant une « Histoire poétique de la Bretagne ». On sait aujourd'hui que certains des textes collectés ont été revus et modifiés par l'auteur, comme le faisaient les auteurs de contes populaires tels Charles Perrault et Grimm, et certains autres textes ont été entièrement composés par lui. C'est de son œuvre que date le renouveau littéraire breton. En 1864, Charles de Gaulle, grand-oncle du futur Général de Gaulle lance son "Appel aux Celtes" pour le renaissance littéraire et linguistique de la Bretagne et des pays celtes frères.

À partir de 1925, grâce aux efforts du professeur Roparz Hemon, lançant le second Emzav (Mouvement Breton), la revue Gwalarn a vu le jour. Au cours de ses dix-neuf années d'existence, elle a tenté d'élever cette langue au niveau des autres grandes langues « internationales » en créant des œuvres originales couvrant tous les genres et en proposant des traductions du patrimoine littéraire de l'Humanité.

Cependant, l'œuvre d'Hémon suscite de nombreuses controverses.

En 1946, ce fut Al Liamm qui prit la suite de Gwalarn. D'autres revues existent et font de la langue bretonne une langue à littérature plutôt fournie pour une langue minoritaire. Skol Vreizh, Emgleo Breiz, Al Lanv, Ar Skol Vrezoneg, Mouladurioù Hor Yezh, An Here, Evit ar brezhoneg et d'autres encore.

Le 17 décembre 2004, le conseil régional de Bretagne reconnait officiellement et à l'unanimité le breton et le gallo comme « langues de la Bretagne, au côté de la langue française ». Par ce vote, la région « s'engage, en recherchant la plus large association de ses partenaires, et en particulier des cinq départements bretons [les 4 départements de la Bretagne administrative et la Loire-Atlantique], afin de permettre la pérennisation de la langue et de la culture bretonnes ». La région envisage la formation de 150 enseignants par an, et espère atteindre 20 000 élèves dans les filières bilingues en 2010. Elle demande de nouveau à la France de ratifier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires.

État actuel du breton

Certains poètes, linguistes et écrivains d'expression bretonne possèdent maintenant une renommée internationale, tels Yann-Ber Kalloc'h, Anjela Duval, Pierre-Jakez Hélias. Ces trois écrivains sont quelques uns des écrivains bretonnants du XXe siècle à avoir eu le breton comme langue maternelle.

Signalons aussi l'Abbé Barbotin dont les sermons en breton avaient un niveau remarquable.


La langue bretonne est aujourd'hui la seule langue celtique à ne disposer d'aucun statut.

La République française :

Voir l'article spécialisé sur le sujet : Politique linguistique de la France.

Chaque année, des rassemblements de plusieurs milliers de personnes demandent l'abrogation de cette loi unique en Europe et la ratification de la Charte européenne.

Dernièrement, l'association des écolesDiwan a déposé une plainte devant la Cour européenne des droits de l'homme pour obtenir des autorités publiques qu'elles respectent les droits linguistiques de la population bretonne.

Actuellement on assiste à des tentatives de déstabilisation de l'enseignement du breton dans les rares établissements où cet enseignement existe dans l'Education Nationale: remplacement des cours par des audio conférences, enseignants bilingues remplacés par des monolingues, refus d'ouverture de nouvelles classes bilingues pour assurer la continuité, déménagements prévus des sections bilingues... Mais la majorité des établissements scolaires ignorent totalement l'existence de la langue bretonne.

Histoire du recensement lexical breton

Le premier dictionnaire breton, le Catholicon, se trouve être aussi le premier dictionnaire du français. Il a été rédigé par Jehan Lagadec en 1464 et publié en 1499 ou avant. C'est un ouvrage trilingue breton, français et latin.

Les recensements suivants eurent lieu deux siècles plus tard par :

Une date importante a été celle du Dictionnaire Celto-Breton de Le Gonidec (1821), augmenté par La Villemarqué vers 1847 : pour la première fois, certains mots se rapprochant du français sont systématiquement écartés, et des mots gallois, ou de vieux breton, sont incorporés au lexique sans plus de précision (cf. Controverses sur le breton).

Le colonel Troude sera plus réaliste, en 1886, en ne retenant que des mots entendus réellement (ou sinon en indiquant que le terme n'est plus en usage). Par contre, le bannissement du lexique breton d'origine latine continue. Il faut cependant remarquer que cela résulte d'un état d'esprit de l'époque, dans lequel le breton est une langue secondaire dans la Basse-Bretagne, complémentaire au français : ces dictionnaires ne prétendent pas présenter une langue universelle, mais surtout recueillir des mots originaux.

Ce « purisme celtique », expression utilisée par les détracteurs de cette attitude, sera plus ou moins général jusqu'aux années 1990, à l'exception notable du dictionnaire que Émile Ernault constitue pour le vannetais en 1904.

  • "Vocabulaire breton-français" de Émile Ernault, 1927
  • Côté KLT mais incorporant de nombreux termes vannetais, le Grand dictionnaire français-breton de François Vallée, aidé de René Le Roux (Meven Mordiern) et Émile Ernault, en 1931, incorpore de nombreux néologismes en première publication. L'entreprise de François Vallée, ayant tout un réseau d'informateurs à travers la Bretagne, permettra de recueillir en outre dans les dialectes de nombreux mots et expressions inédits. Il s'agit du premier exemple d'un travail d'équipe en lexicographie bretonne, et reste, à ce jour le plus important et le plus riche dictionnaire français-breton, avec celui de René Le Gléau.

Parallèlement, Pierre Le Roux travaille à un Atlas linguistique de la Basse Bretagne, paraissant à partir 1924, mais ne se focalisant que sur les variantes des vocables les plus communs.

L'après-deuxième guerre mondiale est une période douloureuse pour la culture bretonne : le mouvement nationaliste breton, pour avoir collaboré avec les occupants nazis, se trouve décrédibilisé aussi bien en France qu'en Bretagne. Paraîtront depuis cette époque, entre autres :

  • Les Nouveau dictionnaire Français-Breton, puis Breton-Français de Roparz Hemon, 1970,
  • "Dictionnaire historique du breton" de Roparz Hemon, 36 tomes et 3232 pages. Donne la première occurrence lexicale dans le contexte,
  • Le Dictionnaire breton des Éditions Garnier, sous la direction de Pierre-Jakez Hélias, 1986,
  • "Dictionnaire classique français-breton" de René Le Gléau, 1983-1994, 10 tomes et 4064 pages, surtout basé sur la production écrite entre 1850 et 1950, avec, en outre, des mots recueillis dans sa région natale de Saint-Renan, ou à l'écoute de la radio.

Enfin, à partir de 1992 paraît le Geriadur ar Brezhoneg a-vremañ de Francis Favereau aux éditions Skol Vreizh, sous forme papier et CD-ROM. Cet ouvrage ne rejette pas systématiquement les néologismes et les mots sortis de l'usage, mais les signale comme tels, soit par un signe « - » pour les mots rares, soit par des guillemets quand il s'agit de créations maladroites ou fautives ; il reprend des termes issus des dictionnaires précédents, ainsi les mots d'origine française du Catholicon par exemple ou issus d'autres ouvrages, et les emprunts populaires (ce sont quelquefois les mêmes). Il faut noter que ce dictionnaire est le fruit de vingt années de travail et de collectage dans le Poher et autour de Poullaouen particulièrement, aire où portait la thèse de l'auteur, soutenue avant qu'il ne se décide à publier son dictionnaire.

Favereau a produit le plus complet des dictionnaires bretons jamais créés, avec pas moins de 50 000 entrées et le double de mots composés. Malgré le manque de soutien financier pour sa création, le dictionnaire s'est tout de même bien vendu et a eu plusieurs réimpressions.

Aujourd'hui, d'autres dictionnaires bilingues anglais / breton, allemand / breton, espagnol / breton montrent bien la volonté de la nouvelle génération de bretonnants d'inscrire la langue dans le paysage linguistique international.

D'autres travaux lexicographiques plus savants sont en cours, notamment un Dictionnaire sanskrit / breton, à l'initiative de Pascal Geneste, linguiste peu connu. Tous ces travaux se font quasiment de façon bénévole.

Chose nouvelle pour la langue bretonne, il est paru deux dictionnaires unilingues édités par An Here, le Geriadur brezhoneg (13 000 entrées) paru en 1995 sous la direction de Jean-Yves Lagadeg et Martial Ménard et le Geriadur Brezhoneg An Here (20 000 entrées) paru en 2002 sous la direction de Martial Ménard et Iwan Kadoret. Ils visent à extraire des textes littéraires reflétant ou non un langage populaire, les termes de la langue écrite et orale contemporaine. Ce dictionnaire sera l'objet d'une polémique : affaire du dictionnaire breton, de la part du journal Le Canard enchaîné. Ils incluent un certain nombre de néologismes (rarement empruntés au gallois, plus souvent créés à partir des racines du vieux-breton, voir Controverses sur le breton).

De même, les éditions Preder publient des dictionnaires plurilingues spécialisés par domaine : psychanalyse, économie, etc. Certains parlent de Dictionnaire entre guillemets car les mots proposés sont en général des néologismes dont c'est la première apparition sur papier, ou des mots qui ne sont connus que d'une centaine de locuteurs. Cependant d'autres estiment que là réside leur intérêt : faire découvrir des mots nouveaux et étendre le champ lexical du breton à des domaines où il est traditionnellement peu présent.

Par ailleurs les éditions Sav-Heol ont publié en 2004 un lexique bilingue de locutions et tournures populaires sous le titre Teurel Blaz war ar Yezh.

En 2005 paraît une nouvelle collecte lexicale nommée Tammoù Gwaskin "Au cœur du breton légitime" par Jean-Yves Plourin qui fait découvrir au lecteur pas moins de 2000 mots inédits collectés au nord-ouest et au sud-est et plus de 6000 acceptions ainsi que des notes grammaticales.

  • La collection "Teñzor ar brezhoneg" (Trésor de la langue bretonne) chez An Alarc'h a édité des vocabulaires de domaines lexicographiques jusque-là délaissés, comme un vocabulaire des argots bretons ("argot" au sens strict du terme) (2003), ou celui du breton enfantin et des tout-petits (2005).

Dialectes

Comme nombre de langues (notamment occidentales: allemand, anglais, basque, gallois, gaélique, mais également le chinois, le coréen, ... et à l'exception notable du français scolaire qui a subi une unification depuis le XVIIe), la langue bretonne varie d'un endroit à l'autre. En breton, ces différences dialectales touchent avant tout la prononciation et une faible partie du vocabulaire. Certains dialectes présentent aussi une syntaxe un peu différente. Les différences sont généralement faibles de proche en proche, mais plus on s'éloigne d'un point, plus le breton est différent. En règle générale, il n'y a pas de frontière nette entre dialectes, mais un changement progressif.

Traditionnellement, on liste les dialectes bretons en fonction des anciens évêchés (on ignore si ceux-ci ont suivi les coutumes linguistiques ou s'ils ont favorisé localement une certaine cohérence) :

Le vannetais est bien différencié des autres dialectes, à de nombreux points de vue, et on peut le distinguer d'un ensemble KLT (abréviation de Kerne, Leon, Treger : Cornouaille, Léon, Trégor).

Ce découpage doit cependant être relativisé. En pratique, le domaine bretonnant est constitué de deux centres de prestige archaïsant (Saint-Pol-de-Léon et le vannetais), une troisième zone archaïsante autour de Quimperlé et une vaste zone centrale ou un breton « moyen » s'est formé. Il est fortement probable que ce sont les carrefours de route et les échanges économiques qui ont conduit à cette évolution. Ce breton est parfois appelé « breton de Carhaix ». Ce breton moyen s'est progressivement étendu, isolant le breton du Goëlo (qui par certains traits est proche des archaïsmes léonais), mordant dans le domaine du vannetais en s'infiltrant par les routes.

La très grande majorité des innovations linguistiques se sont opérés dans cette zone centrale.

Le découpage du breton en quatre dialectes, une division religieuse et politique jusqu'à la Révolution, est contestée du point de vue linguistique. On peut en effet considérer que le breton se présente sous deux formes parlées principales, celle du nord-ouest (NO) et celle du sud-est (SE) :

  • NO : Cet ensemble se situe au nord-ouest de l'isoglosse séparant la région à accent pénultième quasi-exclusif, de la zone à « accent variable ».

Cette ligne de fracture se confond presque avec l'autre isoglosse majeure, celle qui sépare les parlers NO, où la palatalisation n'affecte les plosives qu'après les voyelles i et e, de ceux du SE, où la palatalisation est générale en présence de toutes les voyelles d'avant, le chuintement de - s systématique dans st et sk, etc... .

Depuis le milieu du XVIIe siècle, la séparation entre parler vannetais et KLT a conduit à la coexistence de deux langues littéraires et à deux conventions orthographiques bien disjointes. Le léonard a servi de langue véhiculaire pour le KLT et le vannetais a adopté des conventions orthographiques différentes. Elles ont fait l'objet d'une tentative d'unification graphique, qui a donné naissance à l'écriture « zedacheg » ou BZH (abréviation de BREIZH, unification des mots 'Breiz' en KLT et 'Breih' en vannetais).

Conventions orthographiques

Le breton s'écrit avec l'alphabet latin. Il n'utilise la lettre c mais y ajoute des lettres accentuées ñ, ù, é, â, ê et à, les digraphes ch et c'h, ainsi que l'apostrophe. N'ayant jamais bénéficié du statut de langue officielle, le breton n'a toutefois pas d'orthographe vraiment officielle.

Ordre alphabétique et valeur des graphèmes

A B CH C'H D E F G H I J K L M N O P R S T U V W Y Z
a b ch c'h d e f g h i j k l m n o p r s t u v w y z

La prononciation des lettres varie selon le contexte. Le digramme c'h, notamment, a une prononciation qui varie depuis le simple h aspiré jusqu'au son de la jota espagnole.

Histoire

Ce n'est qu'à partir du début du XVIIe siècle que des linguistes, grammairiens et écrivains ont essayé de normaliser l'écriture du breton. Plusieurs graphies ont été successivement mises au point dans ce but, dont trois sont encore utilisées :

L'orthographe peurunvan est la plus employée aujourd'hui.

Usages

La graphie zh est utilisée dans des mots où la prononciation est différente entre vannetais d'une part et KLT d'autre part. La prononciation est [h], [ɣ], [x] ou [] en vannetais, [z] ou [s] sinon. En vérité, il a deux interprétations :

  • en peurunvan, il indique que la lettre était « z » dans la graphie KLT, et « h » dans la graphie vannetaise,
  • en interdialectal, il indique que la lettre provient d'un ancien « th » (/θ/).

Les deux systèmes se suivent, sauf dans quelques mots.

L'apostrophe est utilisée à trois fins :

  • comme signe diacritique dans le digraphe c'h
  • pour noter la contraction, par exemple : da ar -> d'ar
  • pour noter l'absence d'un mot dans le registre parlé, par exemple : me a vo -> me 'vo

Le tréma est parfois utilisé pour marquer certaines diérèses. Dans certains cas cela résoud des homonymies : par exemple entre maerïoù /mè'riju/ (des mairies) de maerioù /'mèrju/ (des maires). D'autres diérèses sont indiquées par un accent circonflexe : on peut ainsi distinguer trôad /troad-t/ (circuit, virée) de troad /trwad-t/ (pied).

L'accent circonflexe et l'accent grave sont également utilisées pour distinguer des homonymies.

Caractéristiques grammaticales notables

Aspect duratif / non duratif

Comme en gaélique ou en anglais, il existe en breton deux formes par temps verbal, qui se distinguent par l'aspect selon que l'action est habituelle ou non. Ainsi au présent distingue-t-on la forme d'habitude de la forme progressive :

  • Me zo o komz gant ma amezeg (« Je suis en train de parler avec mon voisin ») ;
  • Me a gomz gant ma amezeg (bep mintin) (« Je parle avec mon voisin (tous les matins) ») ;


Le verbe ‘’être’’ et le verbe ‘’avoir’’ en revanche présentent deux formes distinctes sans périphrase « verbe être + o/é + nom verbal » :

  • Skuizh on hiriv (« je suis fatigué aujourd’hui »)
  • Skuizh e vezan d’ar gwener (« je suis fatigué le vendredi »)
  • Naon am eus fenoz (« j’ai faim ce soir »)
  • Naon am bez bemnoz (« j’ai faim tous les soirs »).

Prépositions « conjuguées »

Comme dans les autres langues celtiques modernes, le breton « conjugue » les prépositions selon la personne (prépositions fléchies), c’est-à-dire que les pronoms fusionnent avec la préposition qui les précède. Si l'on regarde rapidement les pronoms :


On peut comparer avec les prépositions. Là où l’irlandais emploiera :

  • tá leabhar agam (« J'ai un livre » ; mot à mot « est livre à-moi ») ;
  • tá deoch agat (« Tu as une boisson ») ;
  • tá ríomhaire aige (« Il a un ordinateur ») ;
  • tá páiste aici (« Elle a un enfant ») ;
  • tá carr againn (« Nous avons une voiture ») ;
  • tá teach agaibh (« Vous avez une maison ») ;
  • tá airgead acu (« Ils ont de l'argent »).


Le breton emploie respectivement :

  • ul levr zo ganin (mot à mot « Un livre est avec-moi ») ;
  • ur banne zo ganit ;
  • un urzhiataer zo gantañ ;
  • ur bugel zo ganti ;
  • ur c'harr zo ganeomp ;
  • un ti zo ganeoc'h ;
  • arc'hant zo ganto.

Mutations consonantiques

Comme toutes les langues celtiques modernes, le breton connaît le phénomène de la mutation consonantique.

Quelques mots bretons

Emprunts lexicaux bretons en français

francisés

Ils sont assez peu nombreux, ce qui, pour une langue limitrophe, est l'indice d'un manque de prestige.

  • balai, de balan, « genêt », les colporteurs bretons allant vendre leurs balais au Moyen Âge ;
  • baragouin, baragouiner : « parler de façon inaudible ou peu compréhensible », en référence, dit l'étymologie populaire, au parler incompréhensible des Bretons pour les Français, qui ne retenaient que les mots bara (pain) et gwin (vin). Cette étymologie est contestée : en effet la consommation de vin est relativement récente en Bretagne.
  • bijou, de biz « doigt », dont le pluriel, bizou, signifie « anneau » ;
  • biniou, pluriel de benveg, instrument ; est devenu un singulier en français ;
  • darne, de darn, en gallois darn, morceau, partie ;
  • goéland du breton gouelan, en gallois gwylan ;
  • goémon ;
  • mine, « aspect », de min, « museau, visage », à moins que ce mot vienne d'un terme gaulois semblable ;
  • plouc, ou plouk, équivalent moderne du manant, sur la racine plou-, du latin plebs, « la plèbe », est le terme méprisant dont les citadins désignent les campagnards, plus particulièrement bretons ; dérivé : le Ploukistan, la Bretagne ;
  • sonneur, de soner, joueur de biniou ou de bombarde. Le mot est d'abord passé du français au breton avec le sens de joueur d'instrument de musique, puis est tombé en désuétude ; il est resté vivace en breton.

conservés dans leur forme initiale

  • Aber, délaissé pour le galicien ria, ce mot reste d'usage local ;
  • Ankou, personnification de la mort ;
  • bagad, troupe ou meute, est passé en français pour désigner un ensemble musical de binious, de bombardes et de percussions, proche du « pipe band » écossais ; à noter qu'en français, on peut trouver ce mot au pluriel dans la forme correcte du breton : bagadoù.
  • chouchen ou chouchenn, nom local de l'hydromel (autre nom : chufere, chupites) ;
  • fest-noz, littéralement la fête de nuit ;
  • korrigan, sur la racine korr, nain, est une sorte de lutin,
  • corgi, mot gallois, en breton korrgi, chien nain, est une race de chien prisée dans une cour royale d'outre-Manche ;
  • kouign amann, gâteau fait à base d'une pâte feuilletée et de beurre ;
  • Morbihan du breton mor bihan, petite mer, qui désigne ici le golfe du Morbihan ;
  • petra, « quoi », attesté dans les anciens dictionnaires est un sobriquet dont on affuble les Bas-Bretons ;
  • Traou Mad (bonnes choses), nom déposé de petits gâteaux au beurre, fabriqués à Pont-Aven.
  • pillig (ar billig), large plateau métallique circulaire sur lequel on fait cuire les crêpes et les galettes.

Les mots qui ne viennent pas du breton

  • cromlech signifie en gallois « pierre courbe » ou « cercle de pierres » (même sens en français) ;
  • la forme dolmen introduite par Théophile Malo Corret de la Tour d'Auvergne au XVIII s est fautive, mais les formes taol-maen et maen-hir menhir existent bien en breton, en toponymie par exemple, et ceci bien avant La Tour d'Auvergne;
  • mouette et varech viennent du normand ;
  • pote : une étymologie fait venir ce mot de paotr, « garçon », volontiers employé amicalement en breton ; il provient plus sûrement de l'abréviation de « poteau », « ami sur lequel on peut s'appuyer », usage attesté dès le Moyen Âge.

Exemples

Mot Traduction Prononciation standard
terre douar 'duar
ciel oabl wabr
eau dour du:r
feu tan tã:n
homme den de:n
femme maouez mowəs
manger debriñ 'dibi
boire evañ 'e:və
grand bras bra:s
petit bihan 'bijən
nuit noz no:s
jour deiz de:

Voir aussi Nombres dans le monde.

Voir aussi

Consulter le Wiktionnaire rédigé en breton.

Liens internes

Bibliographie

Méthodes d'apprentissage du breton

Dictionnaires

  • Albert Deshayes, Dictionnaire étymologique du breton, Editions le Chasse-Marée
  • Francis Favereau, Dictionnaire du breton contemporain, Editions Skol Vreizh
  • Jules Gros, Dictionnaire breton-français des expressions figurées, Editions Emgleo Breiz/Brud Nevez
  • Jules Gros, Le trésor du breton parlé: dictionnaire français-breton des expressions figurées, Editions Emgleo Breiz/Brud Nevez
  • Roparz Hemon, Geriadur istorel ar brezhoneg, Editions Preder
  • COLLECTIF, Dictionnaire français-breton et breton-français, Editions Garnier
  • COLLECTIF, Geriadur brezhoneg, Editions An Here
  • Émile Ernault, Dictionnaire breton-français du dialecte de Vannes, Editions Emgleo Breiz/Brud Nevez
  • G.L. Guilloux Grand dictionnaire français-breton du dialecte de Vannes, Editions Hor Yezh (3 volumes).

Histoire de la langue

  • Kenneth Jackson, A Historical Phonology of Breton, Dublin, The Dublin Institute for Advanced Studies, 1967, 904 p.
  • Fañch Broudic, Histoire de la langue bretonne, Editions Ouest-France, 1999, 64 p. Suivre le lien pour une présentation détaillée
  • Hervé Abalain, Histoire de la langue bretonne, Editions Gisserot, 2000
  • Claude An Du, Histoire d’un interdit, le breton à l’école, Editions Hor Yezh, Lannuon, 2000

Étude sociologique de la langue

  • Qui parle breton aujourd'hui ? Qui le parlera demain ?, Fañch Broudic, éd° Brud Nevez, Brest, 1999, 153 p. Étude réalisée à partir du sondage effectué en 1997 par l'Institut TMO-Régions. Suivre le lien pour le sommaire
    • Une première étude de l'ensemble du sondage a été publiée en breton dans la revue Brud Nevez : Ar brezoneg hag ar vrezonegerien e 1997. Eun enklask bet kaset da benn gand « TMO-Régions ». - BRUD NEVEZ, n° 207, genver 1998, p. 5-59.
  • La pratique du breton de l'Ancien Régime à nos jours, thèse de Fañch Broudic, extraits à cette adresse

Liens externes

Dictionnaires

Échantillons de breton parlé par des locuteurs natifs

Échantillons de breton par des néo-bretonnants

Notes et références

  1. On trouve la même tentative d'éradication en Morbihan, quand en 1902 l'inspecteur d'académie Dantzer demande « Que l'Église n'accorde la première communion qu'aux seuls enfants parlant français. »
  2. Quelques instructions concernant l'enseignement

Modèle:Duo portail [[Image:[[Image:]]]]