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Économie de l'Union soviétique

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L'économie de L'Union Soviétique était basée sur la propriété étatique et la planification centralisée.

Pour la période antérieure à 1928, voir : NEP.

A partir d'une économie très peu développée à l'époque de la Révolution d’Octobre, l'URSS est devenue une puissance économique majeure. De 1928 à 1991, le développement économique fut guidé par une série de plans quinquennaux. L’URSS devint une des trois premières productrices d'un grand nombre de produits industriels, mais restait en retard dans l'industrie légère et les biens de consommation.

L’organisation économique

L'économie soviétique était gérée par le Gosplan (la Commission de Planification d'État), la Gosbank (la Banque d'État) et le Gossnab (Commission d'État pour la fourniture en Matériaux et Équipements).

Le Gosplan

Combinant les objectifs larges donnés par le Conseil des Ministres avec les données fournies par les niveaux administratifs inférieurs concernant l'état courant de l'économie, le Gosplan donnait, par essai et erreurs, un ensemble d'objectifs du plan préliminaires. Parmi plus de vingt comités d'État, le Gosplan était à la tête de l'appareil de planification du gouvernement et était de loin l'agence la plus importante de l'administration économique. La tâche des planificateurs était d'équilibrer les ressources et les besoins pour s'assurer que les entrées nécessaires étaient fournies pour les sorties planifiées. L'appareil de planification seul était une vaste organisation constituée de conseils, commissions, officiels gouvernementaux, etc. chargés de l'exécution et de la surveillance de la politique économique.

L'agence de planification d'État était subdivisée en ses propres départements industriels, tels que charbon, fer ou construction de machines. Elle possédait aussi des départements transversaux tels que la finance. A l'exception d'une brève expérience avec la planification régionale pendant le période Khrouchtchev dans les années 50, la planification soviétique était faite de manière sectorielles plutôt que régionale. Les départements de l'agence de planification d'État assistaient le développement d'un ensemble complet de cibles du plan en accord avec les besoins d'entrée, un processus impliquant une négociation entre les ministères et leurs supérieurs.

Ministères

Les ministères économiques (fondoderzhateli) jouaient un rôle clé dans la structure de l'organisation soviétique. Chaque ministère englobait l'ensemble d'un secteur productif, et géraient les entreprises et les groupes d'entreprises de ce secteur.

Les entreprises

Les entreprises en URSS étaient plus que de simples lieux de travail. Elles étaient responsables d'un large panel de fonctions de protection sociale ; elles géraient la construction et l'entretien de logements pour leurs employés, d'infrastructures de santé, de loisirs, d'instruction, etc.

Chaque entreprise avait un nom, un compte à la Gosbank, et un directeur responsable de la réalisation du plan. Sa capacité d'investissement était limitée par le plan. Les grandes entreprises offraient généralement plus d'avantages sociaux et de sécurité que les entrprises plus petites.

La grande entreprise est divisée en départements : ateliers, administration, bureaux d'études, approvisionnement, planification, regroupés sous l'autorité du directeur général.

Les formes de propriété

Outre la propriété d’État, il existait plusieurs autre formes juridiques de propriété dites « collectives » telles que le kolkhoze et la coopérative.

Les formes les plus courantes de propriété coopérative étaient les coopératives d'habitation (жилищные кооперативы) dans les zones urbaines, les coopératives de consommateurs (потребительская кооперация, потребкооперация), et les sociétés de consommateurs ruraux (сельские потребительские общества, сельпо).

Le droit soviétique faisait la distinction entre la propriété privée (частная собственность, chastnaya sobstvennost) et la propriété personnelle (личная собственность, lichnaya sobstvennost). La première concernait le propriété individuelle de moyens de production, qui avait été abolie, alors que la seconde décrivait la possession personnelle.

L’industrie

L’industrie était entièrement nationalisée depuis la Révolution d’Octobre.

L'industrie était focalisée après 1928 sur la production lourde : métallurgie, machines, industrie chimique, etc. Dans la terminologie soviétique, il s'agissait des « biens du groupe A », ou « moyens de production ». Cette stratégie était basée sur la nécessité reconnue d'une industrialisation et d'une modernisation très rapide de l'URSS. Le taux d'investissement était très élevé.

Après la mort de Staline en 1953, les biens de consommation (« bien du groupe B ») reçurent plus d'attention.

Avec l’effort de guerre et l’industrialisation intensive, un puissance complexe militaro-industriel se mit en place. Il comprenait la production d’armes mais aussi l’ensemble de l’industrie lourde. Ce secteur économique était privilégié : les travailleurs avaient plus d’avantages sociaux et les dirigeants avaient plus d’influence politique.

L’agriculture

A la suite de la collectivisation des années 30, l'agriculture était organisée en un système de fermes collectives (kolkhozes) et de fermes d'État (sovkhoze s).

Les kolkhozes étaient des entreprises agricoles détenues et gérées par un ensemble de paysans propriétaires des outils de production, mais non du sol, propriété de l'État. La terre était mise à disposition perpétuelle des kolkhoziens. Les paysans cultivaient en commun la terre, vendaient la production à l'État, et se partageaient les profits. Ils disposaient en outre d'un lopin de terre individuel (0,25 à 0,5 hectares en 1934).

Les sovkhozes étaient des grandes entreprises agricoles d'État. Les travailleurs y étaient des ouvriers agricoles. Dans les kolkhozes et les sovkhozes il y avait une pratique pour échanger les champs individuels avec les champs collectifs.

Il y avait un nombre extrêmement petit de fermes individuelles restantes (khutor, хутор), situés dans des zones rurales isolées dans les pays baltes, l'Ukraine, la Sibérie et les régions cosaques.

Organisée à grande échelle et hautement mécanisée, l'Union Soviétique était l'un des plus grands producteurs de céréales au monde, bien que de mauvaises récoltes (comme en 1972 et 1975) nécessitèrent des importations et ralentirent l'économie. Le plan quinquennal de 1976-1980 transféra des ressources à l'agriculture et 1978 connut des récoltes record. Le coton, les betteraves à sucre, les pommes de terre, et le lin étaient aussi des cultures importantes.

Cependant, en dépit d'immenses ressources territoriales, d'une mécanisation extensive, des industries chimiques, et d'une grande force de travail rurale, l'agriculture soviétique était relativement improductive, entravée dans de nombreux zones par le climat (seulement 10 % du territoire de l'URSS était cultivable), et une mauvaise productivité du travail. Dans les années 30, l’agriculture, réserve de main-d’œuvre et source excédent, était au service de l’industrialisation. L’État réquisitionnait des céréales pour l’exportation et l’approvisionnement des villes. Cela entraîna la famine dans les campagnes en 1932-1933.

La planification

En 1928, sous la tutelle de Staline, la NEP fut abandonnée et un système complexe de planification quinquennale fut développé. Jusqu'à la fin des années 80 et le début des années 90, lorsque les réformes économiques soutenues par le [Mikhaïl Gorbatchev]] introduirent des changements importants dans le système traditionnel (voir Perestroïka), l'allocation des ressources était dirigée par un appareil de planification plutôt que par le jeu des forces du marché.

Le Comité Central du PCUS et plus particulièrement son Bureau Politique, donnait les lignes générales de la planification. Le Politburo déterminait la direction générale de l'économie sur la base des indicateurs de contrôle (objectifs préliminaires), des projets d'investissement majeurs, et de la politique économique générale. Ces directives étaient soumises comme rapport du Comité Central au Congrès du PCUS pour y être approuvées. Les périodes des plan quinquennaux coïncidaient avec celles séparant les Congrès du PCUS.

La liste des priorités pour le plan quinquennal était ensuite transmise au Conseil des Ministres, le gouvernement de l'URSS. Le Conseil était composé de ministres industriels, de présidents de divers comités d'État, et de présidents d'agences avec statut ministériel. Ce comité était au sommet d’une vaste administration économique, comprenant l'appareil de planification d'État, les ministères industriels, les trusts (niveau intermédiaire entre les ministères et les entreprises), et finalement les entreprises d'État. Le Conseil des Ministres élaborait ses directives et les envoyait au Gosplan, qui rassemblait les données sur le Plan.

Le Gosplan définissait des objectifs et les transmettait aux ministères économiques, qui détaillaient les parties du plan correspondantes et diffusaient les données aux entreprises subordonnées (besoins en main d’œuvre, en matières premières, agenda de production, tous les prix de gros et presque tous les prix de détail). Les planificateurs effectuent des enquêtes régulières pour connaître les besoins de la population (En 1967, 62 000 familles sondées).

Les entreprises devaient développer des plans plus détaillés, couvrant tous les aspects de leurs opérations, afin qu'elles puissent juger de la faisabilité des objectifs. Une intense phase de négociation suivait. Les directeurs d'entreprises et même les ouvriers participaient souvent au processus de planification à ce niveau. Selon des rapports soviétiques, environ 110 millions de travailleurs soviétiques prenaient part aux discussions dans la période finale de la planification d'État à la fin des années 80 et au début des années 90 (même cela se limitait le plus souvent au tamponnage de déclarations préparées pendant d'immenses réunions préparatoires).

Les plans des entreprises étaient ensuite renvoyées aux ministères pour vérification. Cela impliquait une intense négociation, toutes les parties cherchant à faire correspondre au mieux les objectifs et les ressources avec leurs intérêts.

Après ce processus, le Gosplan centralisait les estimations révisées. Le plan révisé était ensuite envoyé au Conseil des Ministres, au Politburo et au Secrétariat du Comité Central pour approbation. Le Conseil des Ministres soumettait le Plan au Soviet Suprême et le Comité Central soumettait le plan au Congrès du Parti, pour une l’approbation finale. Dès lors, la plan devenait loi.

Les objectifs finaux étaient enfin distribués à tous les secteurs économiques concernés. La mise en oeuvre commençait à ce moment. C’étaient les directeurs d’entreprises qui en avait surtout la responsabilité. Les différents objectifs de l'entreprise étaient souvent incompatibles. Il devait donc faire des choix et privilégier certaines priorités. L'avancement du directeur dépendait grandement de son aptitude à réaliser le plan.

L’emploi

Le chômage était inexistant en URSS. Le plein emploi était garanti explicitement par l'article 40 de la Constitution.

La plupart des ouvriers et des spécialistes étaient recrutés soit par les entreprises, soit par un bureau central de l'emploi dans les grandes villes.

La concurrence entre les entreprises pour l'embauche était la base du marché de l'emploi. Dans les années 60-70, la mobilité des travailleurs était importante : un sur cinq changeait d'emploi chaque année.

La grève était interdite.

Rémunérations

Le Comité d'État décidait des barêmes de rémunération.

Tableau des revenus moyens par catégorie sociale en 1970 : (revenu moyen = 100)

directeurs, cadres sup 136
techniciens, spécialistes 146
employés 81
ouvriers industriels 107
travailleurs du bâtiment 123
ouvriers agricoles (sovkhoz) 81
paysans kolkhoziens 59


De plus, en considérant les avantages en nature, les écarts entre les salaires du directeur et de l'ouvrier d'une même entreprise pouvait aller de 1 à 50.

Les syndicats n'avaient pas le pouvoir de négocier les rémunérations. Leur rôle était plutôt d'ordre administatif et culturel. Il s'occupait entre autres de la gestion de la Sécurité Sociale.

Structure sociale

La prolétarisation des masses paysannes a accéléré à partir de la fin de la NEP, en raison de l'industrialisation rapide. L'urbanisation fut très intense dans les premières décennies de l'époque stalinienne.

Structure de la population active (%):

1940 1973
Industrie 23 37
Agriculture 54 26
Services 13 37

Le commerce international

Largement auto-suffisante, l'URSS commerçait peu par rapport à sa force économique. Cependant le commerce avec les pays extérieurs au « bloc communiste » augmenta dans les années 70, alors que le gouvernement cherchait à compensait les faiblesses de la production domestique grâce aux importations.

Le Comecon fut créé le 25 janvier 1949, en réponse au lancement du plan Marshall, entre l’URSS et cinq pays de l’Europe de l’Est (Bulgarie, Hongrie, Pologne, Roumanie et Tchécoslovaquie). La même année, l’Albanie rejoignit l’organisation, pour la quitter de fait en 1961. La RDA est devenue membre en 1950, après avoir accédé au statut d’État ; l’entrée, en 1962, de la Mongolie, en 1972, de Cuba et, en 1978, du Vietnam ouvrait le Comecon à des membres non européens.

De manière générale, les hydrocarbures, les métaux, et le bois étaient exportés. Les machines, les biens de consommation et parfois les céréales étaient importés. Dans les années 80, le commerce avec les membres du Comecon comptaient pour la moitié du volume commercial.

Dans les années 80, l'URSS était pleinement intégrée au marché mondial et en subit les oscillations. En particulier la baisse des cours des hydrocarbures eut une forte incidence sur la crise de 1989.

Commerce de l'URSS avec les pays du « camp capitaliste » (indice 100 en 1965):

1965 100
1974 418

La politique monétaire

La devise d'URSS (le rouble) était non convertible en 1932 (lorsque le commerce en « czervonetz » convertibles en or, introduit par Lénine dans les années de la NEP, fut suspendu) jusqu'à la fin des années 80. Il était impossible (pour les citoyens et les entreprises d'État) d'acheter ou de vendre librement des devises étrangères bien que le taux de change soit fixé et publié régulièrement.

Acheter ou vendre des devises sur le marché noir était un crime grave jusqu'aux années 80. Les individus payés de l'étranger devaient normalement dépenser leurs devises dans une chaîne de magasins d'État (« Beryezka ») où les devises étrangères étaient acceptées. Lorsque la conversion libre du rouble fut autorisée, le taux de change dégringola de sa valeur officielle d'un facteur 10.

Sur le marché monétaire mondial, le rouble n'a jamais concurrencé le dollar. La faiblesse du rouble était le reflet de la relative faiblesse économique de l'URSS.

Dans l'ensemble, le système bancaire était hautement centralisé et contrôlé par une unique banque d'État, la Gosbank, responsable de l'accomplissement des plans économiques du gouvernement. Les banques soviétiques fournissaient des crédits de court terme aux entreprises d'État.

Évolution de l'économie soviétique

A partir de 1928, les plans quinquennaux construisirent rapidement une base d'industrie lourde dans une économie principalement agraire sans attendre l’accumulation du capital à travers l’expansion de l'industrie légère, et sans dépendre du financement extérieur. Le pays devient industrialisé à un rythme extrêmement rapide, surpassant peut-être le rythme de l'Allemagne au XIXe siècle et le Japon au début du XXe siècle.

Après la reconstruction de l'économie (après les destructions causées par la Guerre civile), et après la réussite des plans initiaux, la croissance explosive ralentit, mais dépassait généralement encore la plupart des autres pays en terme de production matérielle globale (PNB) jusqu'à la période de la stagnation brejnévienne dans la seconde moitié des années 70. L'industrialisation arriva avec l'extension des services médicaux, ce qui augmenta la productivité du travail. Des campagnes de soin furent menées contre le typhus, le choléra, et la malaria. Le nombre de physiciens augmenta aussi rapidement que les infrastructures et l'instruction le permirent. le taux de mortalité général et la mortalité infantile décrurent régulièrement.

La planification économique conduisit à de bons résultats pendant les années 30, la mobilisation de la période de la seconde guerre mondiale, et pendant les deux première décennies de l'après-guerre. L'économie soviétique devint la plus grande et la plus forte après celle des États-Unis. L'URSS devint le plus grand producteur mondial de pétrole, charbon, minerai de fer, ciment, et acier. Elle était un des plus grands producteurs de manganèse, or, gaz naturel et d'autres minerais.

La croissance déclina dans les années 1960. La prolétarisation des paysans se terminait. La découverte de nouveaux gisements de matières premières était plus rare. Cependant les ministères de planification ne relâchèrent pas leur contrôle sur le niveau des entreprises alors que l'économie connut une stagnation prolongée dans les années 70 et 80.

La nouvelle ligne politique s’orienta vers une « croissance intensive », c’est-à-dire une augmentation de la productivité du travail.

Le secteur de la consommation demeura toujours secondaire. Le poids politique et économique du complexe militaro-industriel faisait que ce secteur restait prioritaire.

L'économie planifiée soviétique n'était pas à même de répondre aux exigences d'une économie moderne et complexe qu'elle avait permis de construire.

Alors que l'économie croissait, le volume de décisions à prendre par les planificateurs de Moscou devient énorme. Les lourdes procédures de l'administration bureaucratique ne permettaient pas de communication libre et une réponse flexible requises au niveau des entreprise pour gérer les revendications salariales, l'innovation, les clients et les fournisseurs.

Depuis la dissolution de l’URSS, presque toutes les 15 anciennes républiques soviétiques abolirent la planification centralisée et la propriété d’État, avec des résultats mitigés.

Les plans quinquennaux

  • Ier plan : 1928-1932
  • IIe plan : 1933-1937
  • IIIe plan : 1938-1942

Interrompu par la guerre

  • IVe plan : 1946-1950
  • Ve plan : 1951-1955
  • VIe plan : 1956-1960
  • VIIe plan : 1959-1965

Seul plan septennal

  • VIIIe plan : 1966-1970
  • XIXe plan : 1971-1975
  • Xe plan : 1976-1980

Lectures

  • Paul Gregory et Robert Stuart, Soviet and Post Soviet Economic Structure and Performance 7ème édition (Boston: Addison Wesley, 2001)
  • Marshall Goldman, What Went Wrong With Perestroika (New York: Norton, 1991)
  • Marshall Goldman, Lost Opportunity: Why Economic Reforms in Russia Have Not Worked (New York: W. W. Norton, 1994)
  • Moshe Lewin, The Making of the Soviet System (New Press, 1994)
  • Mary McCauley, Soviet Politics 1917-1991 (Oxford University Press, 1992)

Références

  • S. Kara-Murza, Soviet Civilization : from the great victory till our time, 2004.
  • Basile Kerblay, La société soviétique contemporaine, Armand Colin, 1977

Liens externes