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Dust Bowl

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Front d'une tempête de poussière dans le Texas. 18 avril 1935.
Dust Bowl près de Mills, Nouveau-Mexique, mai 1935

Le Dust Bowl (« bassin de poussière ») est une région à cheval sur l'Oklahoma, le Kansas et le Texas, touchée dans les années 1930 par la sécheresse et une série de tempêtes de poussière provoquant une catastrophe écologique et agricole. On nomme la période correspondante les Dirty Thirties.

Ces tempêtes de poussière sont issues de pratiques agricoles mécanisées, mais avec des années de sècheresses exceptionnelles, qui ont gravement endommagé l'écologie et l'agriculture des prairies américaines et canadiennes au cours des années 1930. Cette série de sécheresses et une incapacité à appliquer des méthodes agricoles en zones arides pour empêcher les processus éoliens (érosion éolienne) ont provoqué ce phénomène. La sécheresse s'est produite en trois vagues : 1934, 1936 et 1939-1940, mais certaines régions des Hautes Plaines ont connu des conditions de sécheresse jusqu'à huit ans.

Ce phénomène s'est surajouté aux conséquences de la Grande Dépression, après le krach de 1929, et avec l'exode rural qui avait commencé au cours des années précédentes, suite à l'usage massif de l'agriculture mécanisée sur des exploitations agricoles de grande taille.

Contexte écologique et économique

Tempête de poussière arrivant sur Spearman (Texas). 14 avril 1935.
Fermier et ses enfants, pris dans une tempête de poussière dans le comté de Cimarron (Oklahoma). Avril 1936
Ensevelissement dû à une tempête de poussière à Dallas (Dakota du Sud). Mai 1936

« Une nation qui détruit ses sols s'autodétruit (“A nation that destroys its soils destroys itself”) »

— président américain Franklin Delano Roosevelt, 1937[1]

À l'origine, les plaines du Sud (Southern Plains (en)) étaient des prairies où paissaient les bisons et vivaient des Amérindiens nomades. L'irrégularité des précipitations, les sols légers et les vents forts ne se prêtent pas aux activités agricoles. Mais, dans les années 1900, le faible coût de la terre, des chutes de pluie importantes, le progrès du machinisme agricole[2],[3] y attirent des immigrants. La récession d'après la Première Guerre mondiale a conduit les agriculteurs au début des années 1920 à essayer de nouvelles techniques agricoles mécanisées, dont le tracteur Fordson F (en) dès 1918 ou le McCormic Farmall dès 1923[4] et qui pouvaient tirer des disques et des charrues. Beaucoup vont ainsi acheter des charrues et d'autres équipements agricoles, et entre 1925 et 1930, plus de 2 000 000 acres (809 000 ha) de terres auparavant non cultivées (une prairie d'herbes naturelles résistantes à la sécheresse) ont été labourées pour céder la place à des champs de céréales, faisant de la région le cœur agricole des États-Unis[5].

Là-dessus survient la Grande Dépression qui fait suite au krach de 1929. Les masses populaires américaines sont alors souvent jetées dans la grande pauvreté, leur consommation alimentaire est extrêmement réduite. Fâcheux concours de circonstances, les agriculteurs ont produit des récoltes record au cours de la saison 1931, mais avec la crise elles se transforment en surproduction[6],[7]. Pour compenser cette baisse de leurs recettes les agriculteurs[8] augmentent encore leurs surfaces cultivées[9].

Les récoltes ont commencé à baisser avec le début de la sécheresse fin 1931, exposant les terres agricoles nues et sur-labourées après les récoltes. Sans herbes de prairie profondément enracinées pour maintenir le sol en place, il a commencé à s'envoler. Ainsi l'agriculture basée sur la charrue dans cette région fait qu'en 1932, 14 tempêtes de poussière, connues sous le nom de blizzards noirs (black blizzards) emportent une grande partie de la couche arable fertile, laissant la terre vulnérable à la sécheresse et appauvrie, alors que les cultures étaient en pleine croissance. Malheureusement de 1931 à 1937[10],[11], la région est ravagée par la sécheresse[12],[13],[14] qui laisse les terres à nu, exposées au soleil et aux vents[5]. Et, en un an seulement, le nombre de tempêtes de poussière est passé à près de 40.

Ces blizzards noirs détruisent récoltes et pâturages et ensevelissent habitations et matériel agricole[15]. La région concernée[16] englobe les panhandles (« queues de poêlon ») de l'Oklahoma et du Texas, ainsi que le sud-ouest du Kansas, le sud-est du Colorado et le nord-est du Nouveau-Mexique[17].

Des millions de personnes ont fui les régions touchées. Le gouvernement met alors en place des programmes d'aide pour les aider. En 1937, un bulletin de la Works Progress Administration (WPA) a indiqué que 21% de toutes les familles rurales des Grandes Plaines recevaient une aide d'urgence fédérale, mais ce n'est qu'en 1939, lorsque la pluie est revenue, que les secours sont effectivement arrivés. La sécheresse des années 1930 et ses impacts associés ont finalement commencé à s'atténuer au printemps 1938. En 1941, la plupart des régions du pays recevaient des précipitations proches de la normaleErreur de référence : Balise fermante </ref> manquante pour la balise <ref>. Dans Les Raisins de la colère, la Route 66 y est The Mother Road (la « route-mère »), toutes les routes secondaires débouchant sur elle[18].

De nombreux autres auteurs évoquent la migration vers l'Ouest de milliers d'ouvriers agricoles itinérants pauvres (les Okies) fuyant le Dust Bowl : Deserts on the March de l'écologue Paul Sears (en) (1935), Plowman's Folly (la folie des laboureurs) d'un pionnier du semis direct Edward H. Faulkner (1943)[19].

Le roman graphique Jours de sable d'Aimée de Jongh, paru en 2021, traite également du sujet[20].

Cinéma

Deux documentaires ont été réalisés sur le sujet par Pare Lorentz :

En 1940 sort au cinéma Les Raisins de la Colère, film réalisé par John Ford à partir du roman de John Steinbeck portant le même nom. Ce film fort raconte l'histoire de la famille Joad fuyant la crise économique et le Dust Bowl pour gagner la Californie.

Musique

Les immigrants de l'Oklahoma et de l'Arkansas apportèrent avec eux en Californie leur musique country. Dans les années 1950, cela donna naissance au Bakersfield sound, en opposition au Nashville sound.

L'œuvre de Woody Guthrie est fortement marquée par sa propre expérience du Dust Bowl. Il a également consacré une chanson à Tom Joad, l'un des protagonistes des Raisins de la Colère.

Le groupe Mumford and Sons a également produit une chanson, Dust Bowl Dance, dans leur album Sigh no More en 2009.

Dans la culture de masse

Le film de science-fiction Interstellar sorti en 2014 montre une Amérique ravagée par des tempêtes de poussière. Le voyage interstellaire, pour trouver une planète habitable pour sauver l’humanité, peut être mis en parallèle avec les migrations pour fuir le Dust Bowl et l'espoir que représente la Californie[Passage problématique]. Le film reprend des interviews du film documentaire de Ken Burns The Dust Bowl (en), sorti en 2012.

L'auteur américain Dan Simmons évoque ce phénomène dans son roman Collines noires (Black Hills) paru en 2010. Une gigantesque tempête de poussière y est décrite de manière spectaculaire et avec réalisme.

Un album de Joe Bonamassa, chanteur et guitariste de blues rock américain, porte le nom de Dust Bowl.

Notes et références

  1. Marc-André Selosse, L'origine du monde. Une histoire naturelle du sol à l'intention de ceux qui le piétinent, Actes Sud Nature, , p. 55.
  2. Dans les années 1918-29 le nombre de tracteurs était passé de 80 000 à 852 000, entrainant déjà un puissant mouvement d'exode rural : Ph. Arbos, « Le mécanisme et l'évolution agricole aux États-Unis », Annales de géographie, no 239,‎ , p. 554-555 (lire en ligne, consulté le ), et le labour de terres fragiles, promptes à retourner à l'état de poussière par temps de sécheresse. Voir aussi : (en) « What caused the Dust Bowl? », sur HowStuffWorks, (consulté le )
  3. (en) « NASA - Top Story - SOURCE OF 1930s 'DUST BOWL' DROUGHT IN TROPICAL WATERS, NASA FINDS - March 18, 2004 », sur www.nasa.gov (consulté le )
  4. (en + fr) Dorothea Lange & Paul Schuster Taylor et (nouvelle édition établie par Sam Stourdzé), An American Exodus : A Record of Human Erosion, Éditions Jean-Michel Place, (1re éd. 1939 ( Reynal and Hitchcock)), 221 p., 26 cm (ISBN 2-85893-513-0, SUDOC 048999156), p. 72.
  5. a et b Dust Bowl. Une tragédie environnementale contée par Ken Burns, sur le site À la Maison-Blanche, 7 décembre 2012.
  6. (en) « Dust Bowl | Facts & Definition », sur Encyclopedia Britannica (consulté le )
  7. (en-US) « Dust Bowl - Topics on Newspapers.com », sur Topics, (consulté le )
  8. (en-US) « The Dust Bowl of the 1930s », sur livinghistoryfarm.org (consulté le )
  9. (en) History.com Editors, « Dust Bowl: Cause and impact on Great Depression », History,‎ 2020 (updated), 2009 (original) (lire en ligne, consulté le ).
  10. (en) « Timeline: The Dust Bowl | American Experience | PBS », sur www.pbs.org (consulté le )
  11. « Dust storms in the 1930s Dust Bowl », sur ocp.ldeo.columbia.edu (consulté le )
  12. Futura, « Dust Bowl », sur Futura (consulté le )
  13. (en-US) « About The Dust Bowl », sur www.english.illinois.edu (consulté le )
  14. « Dust Bowl et la dégradation des sols - IS@DD Information sur le développement durable », sur ise.unige.ch (consulté le )
  15. (en) Rubrique Dustbowl, sur le site History.
  16. (en-US) « Home », sur drought.unl.edu (consulté le )
  17. (en) Kimberly Amadeo, « Why Another Dust Bowl Is Likely », sur The Balance (consulté le )
  18. Articles « Dust Bowl » et « Route 66 » dans What's What, Dictionnaire culturel du monde anglophone, ss la dir. de Gérard Hocmard, Ellipses, 2004, p. 184 et 529
  19. (en) Philip Conford, The Origins of the Organic Movement, Floris Books, , p. 110.
  20. Aurélien Lachaud, « Jours de sable d’Aimée de Jongh : dans la poussière et ses tempêtes », sur lacroix.fr, (consulté le )

Annexes

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Bibliographie

  • Christophe Masutti, Les faiseurs de pluie. Dust Bowl, écologie et gouvernement (États-Unis, 1930-1940), DHVS/Université de Strasbourg, sous licence CC-By-Sa, 2012. Page web
  • (en) Donald Worster, Dust Bowl: The Southern Plains in the 1930s, OUP USA, , 290 p.
  • (en) Dayton Duncan, Ken Burns, The Dust Bowl: An Illustrated History, Chronicle Books LLC, , 232 p.

Articles connexes

Liens externes