Concept (philosophie)

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Un concept est une idée abstraite, donc séparée de la réalité d'une chose, d'une situation, d'un phénomène. Un concept se distingue aussi bien de la chose désignée par ce concept, que du mot ou de l'énoncé verbal, qui est le signifiant de ce concept.

Les différents philosophes ne sont pas nécessairement d'accord sur ce qu'est exactement un concept, au-delà de cette définition générale, bien que des lignes centrales puissent être dessinées. Ainsi, un concept est souvent une idée générale (le concept de chien rassemble tous les chiens existants et possibles), mais pas nécessairement (chez Leibniz, la notion complète exprime la substance individuelle et ne correspond qu'à elle ; par ailleurs, un nom propre peut être considéré, selon certaines théories philosophiques, comme exprimant le concept d'un individu[1]).

Un concept n'est pas une notion car plus abstrait (par exemple, la notion de table, le concept de liberté)[réf. nécessaire]. Le terme concept vient du latin conceptus qui signifie « contenir, tenir ensemble », dérivé du verbe concipere signifiant « concevoir »[2].

Le concept dans la philosophie du langage

Le concept a très souvent été assimilé à la signification d'un terme, au sens de l'intension, ou dénotation de ce terme. Ainsi, les concepts des objets serait l'ensemble des prédicats qui lui appartiennent, ou qui sont, en langage aristotélicien, prédiqués d'un sujet. On pourrait peut-être dire qu'Aristote considère qu'un bon concept est un concept qui se réfère à l'essence, et non au propre: ainsi, le concept d'homme n'est pas « l'animal capable de rire » (car le rire est le propre de l'homme: seul l'homme rit; ce n'est pas son essence), mais un « animal raisonnable » ou un « animal politique » (zoon politikon) [3]. Autrement dit, le concept devrait exprimer la quiddité de la chose.

Assimilé à l'intension d'un terme, le concept a ainsi été considéré, par la philosophie médiévale, comme une entité mentale. Le nominalisme considère qu'ils n'ont pas d'existence réelle: c'est la querelle des universaux, les réalistes considérant, au contraire, que les universaux (l'homme, par exemple) ont une existence réelle, idéelle (au sens platonicien); les nominalistes soutiennent qu'ils n'ont d'existence que mentale, et que seuls les individus concrets existent réellement.

Au XXe siècle, Frege et Carnap, opposés au « psychologisme », préféraient considérer les concepts comme des entités abstraites[4].

Il n'est toutefois pas évident qu'un concept s'identifie à la signification d'un terme, au sens d'intension ou de dénotation: Hilary Putnam considère en effet, dans son expérience de la Terre jumelle, ceci comme douteux[4]. Selon Putnam, le concept de « hêtre » et d'« orme » ne dépend en effet pas seulement de la signification que je lui donne (ces deux arbres peuvent être indiscernables pour moi), mais de ce qu'ils dénotent, indépendamment de la signification subjective que je lui accorde: il y a une « division du travail linguistique » indispensable au concept, qui fait qu'un garde forestier sait très bien ce qui est dénoté lorsque je dis « hêtre ».

Philosophie

On appelle le plus souvent un « concept » une idée ou représentation de l'esprit qui abrège et résume une multiplicité d'objets empiriques ou mentaux par abstraction et généralisation de traits communs identifiables. Le concept est ainsi, selon Kant, ce qui unifie le divers de la sensation [réf. nécessaire]. Il est dénoté dans le langage par un terme qui le désigne : le concept est nommé signifié, le terme le désignant est nommé signifiant [réf. nécessaire].

Il existe plusieurs conceptions relatives au statut d'existence du concept. Ce statut est central pour toute philosophie, non seulement dans le domaine de la connaissance (comment se forment les concepts ? le concept indique-t-il une essence ? etc.), mais également dans le domaine de la morale (peut-on prouver des lois de la morale d'après des concepts ? quelle est l'origine du concept de bien ? etc.) [réf. nécessaire]. Selon Gilles Deleuze, la philosophie se définit comme la création de concepts, et non comme la contemplation passive des choses ou la simple réflexion[5].

Voici les statuts conceptuels fondamentaux [réf. nécessaire]:

Citations

  • « de pareils instants, d'un seul mot prononcé en temps opportun dépend parfois toute une vie, mais les gens ne savent rien et ils s'écrasent les uns les autres – parfois au nom des idéaux – dans le marais de la réalité distordue, déformée par un filet de faux concepts jeté sur elle. La réalité laisse échapper sa quintessence sous l'influence des concepts. Mais c'est de la qualité de ceux-ci que dépend le fait qu'elle sera un poison ou la plus nutritive des vitamines. » (Stanislaw Ignacy Witkiewicz, L'Inassouvissement, Paris, L'Âge d'Homme, 1970, p. 69)
  • « Former des concepts, c'est une manière de vivre et non de tuer la vie ; c'est une façon de vivre dans une relative mobilité et non pas une tentative pour immobiliser la vie ; c'est manifester, parmi ces milliards de vivants qui informent leur milieu et s'informent à partir de lui, une innovation qu'on jugera comme on voudra, infime ou considérable : un type bien particulier d'information. [...] au niveau le plus fondamental de la vie, les jeux du code et du décodage laissent place à un aléa qui, avant d'être maladie, déficit ou monstruosité, est quelque chose comme une perturbation dans le système informatif, quelque chose comme une « méprise ». À la limite, la vie – de là son caractère radical – c'est ce qui est capable d'erreur. [...] Et si on admet que le concept art, c'est la réponse que la vie elle-même a donné à cet aléa, il faut convenir que l'erreur est la racine de ce qui fait la pensée humaine et son histoire. L'opposition du vrai et du faux, les valeurs qu'on prête à l'un et à l'autre, les effets de pouvoir que les différentes sociétés et les différentes institutions lient à ce partage, tout cela n'est peut-être que la réponse la plus tardive à cette possibilité d'erreur intrinsèque à la vie. » (Michel Foucault, « La vie : l'expérience et la science », Dits et écrits, t. 4, Paris, Gallimard, 1994, p. 774-775)

Références

  1. Voir la théorie de Bertrand Russell du nom propre logique.
  2. Informations lexicographiques et étymologiques de « concept » dans le Trésor de la langue française informatisé, sur le site du Centre national de ressources textuelles et lexicales
  3. Voir Aristote, Topiques, I, 5, et Catégories pour distinction du propre et de l'essence).
  4. a et b Hilary Putnam, « The meaning of "meaning" », in Mind, Language and Reality, Cambridge University Press, 1975, p.218 à 227 (traduit par Pascal Ludwig dans Le langage, Flammarion (GF Corpus), 1997.
  5. Gilles Deleuze et Félix Guattari, Qu'est-ce que la philosophie ?, Paris, 1991, 206 p.

Voir aussi

Articles connexes