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Asperge

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Asparagus officinalis

L'asperge est une plante de la famille des Asparagaceae originaire de l'est du bassin méditerranéen. Connue des Romains, elle est cultivée comme plante potagère en France depuis le XVe siècle. Le terme désigne aussi ses pousses comestibles, qui proviennent de rhizomes d'où partent chaque année les bourgeons souterrains ou turions qui donnent naissance à des tiges s'élevant entre 1 et 1,5 mètre.

Description

fleurs d'Asparagus officinalis.
baies d'Asparagus officinalis.

L'asperge est une plante vivace aux nombreuses racines charnues rayonnant en étoile (l'ensemble est appelé « griffe »), aux tiges droites pouvant atteindre 1,5 mètre de hauteur, et au feuillage fin et ramifié.

C'est une espèce dioïque : les pieds mâles donnent des fruits stériles tandis que les pieds femelles portent de petites baies rouges contenant plusieurs graines noires. Le coût métabolique pour produire ces graines épuise les pieds femelles, aussi emploi-t-on plutôt les plants mâles dans les aspergeraies[1].

Origine

Cette espèce est originaire de régions tempérées de l'Eurasie : Europe centrale et méridionale, Afrique du Nord, Asie centrale et occidentale. Elle pousse dans les terrains sablonneux à l'état sauvage. Elle est cultivée depuis l'Antiquité mais la mise au point des variétés date du XVIIIe siècle. À partir de 1805, elle fait la réputation d'Argenteuil, où elle n'est plus cultivée. Elle est aujourd'hui largement cultivée dans de nombreux pays sur tous les continents, bien que le premier exportateur mondial d'asperges en conserves soit la Chine[2]. Le Chili et le Pérou demeurent des producteurs importants[2].

À l'état sauvage il en existe douze espèces en Europe, dont cinq en France selon Tela Botanica : Asparagus officinalis, Asparagus acutifolius très commune dans le midi, Asparagus maritimus, Asparagus albus et Asparagus tenuifolius. Toutes sont comestibles mais l'asperge maritime est très amère.

Bottes d'asperges blanches et vertes.

Historique

Les asperges sont depuis longtemps utilisées comme légumes et plantes médicinales, en raison de leur saveur délicate et leurs propriétés diurétiques. Une fresque égyptienne datant de 3000 ans av. J.C.la montre en offrande aux dieux. Elle est également appréciée pour son goût délicat par les Grecs et les Romains qui la cultivent dans des fosses et la mangent fraîche en saison de récolte et sèche en hiver[3].

Elle est révérée comme aphrodisiaque, en raison de sa forme, dans le conte arabe Les Mille et Une Nuits. Cultivée dès le XIe siècle à Byzance, l'Europe occidentale semble avoir ignoré l'asperge pendant quelques siècles et ce n'est que vers le XVe siècle qu'on trouve des traces de culture de l'asperge verte en France. Les producteurs mettent au point une nouvelle technique : ils recouvrent les pousses par des coiffes pour les protéger des parasites et retenir la chaleur, découvrant ainsi l'asperge blanche, puis remplacent bientôt les coiffes par le buttage. On la considère comme la reine des légumes depuis au moins le XVIe siècle tant elle est appréciée à la cour de France où elle est appelée le « légume royal », le « printemps en tiges » ou l'« ivoire à manger ». Prisées par Madame de Pompadour pour cette réputation d’aphrodisiaque, ses extrémités sont appelées « pointes d’amour » à son époque[4],[1].

Au début du XVIIIe siècle, la « Gewone Hollandse », une grosse variété venant des Pays-Bas et de Pologne est introduite en France. Cette « asperge violette de Hollande », dite aussi « de Pologne », supplante progressivement la petite asperge commune. En 1750, des cultivateurs d'Argenteuil mettent au point la variété d'Argenteuil. Au XIXe siècle, plusieurs villages autour de Paris se spécialisent dans la culture de variétés, Aubervilliers, Bezons, Épinay ou Sannois. Les travaux de sélection menés à l'INRA à partir des années 1960 ont conduit à la commercialisation de variétés hybrides choisies selon leur productivité, leur précocité, leur tolérance aux maladies, leur mode cultural (asperge verte au goût plus prononcé et plus concentrée en vitamines, asperge blanche plus fine et plus tendre, asperge violette plus fruitée), leur présentation (qualité de la pointe) ou leur qualité gustative et nutritionnelle (amertume et fibrosité, richesse en rutine)[5].

L'asperge en cuisine

En cuisine, on utilise les pousses vertes ou blanches ou rouges : la fraîcheur des tiges se juge selon plusieurs critères (asperges fermes et cassantes, de même épaisseur, avec des pointes resserrées) et ces qualités permettent d'obtenir une cuisson homogène[6].

Lors de l'achat, l'asperge doit exhaler une agréable senteur d'épi de blé mûr, le toucher doit être à la fois ferme et souple sous le doigt et résistant à la rupture (test du crissement entre les doigts), le talon ne doit pas être trop sec (lorsqu'il est pressé, le jus qui en ressort ne doit pas être amer), ce qui dénotera une cueillette récente.

  • L'asperge blanche a poussé entièrement sous terre, en l'absence de lumière, ce qui lui donne un goût délicat et très fin.
  • L'asperge violette est très fruitée. C'est une asperge blanche qu'on a laissé échapper de sa butte et dont la pointe devient mauve sous l'effet de la lumière. Elle prend une légère amertume.
  • L'asperge verte a poussé à l'air libre et doit sa coloration au processus normal de synthèse chlorophyllienne qui se développe à la lumière du soleil. Elle offre une saveur marquée et un bourgeon presque sucré. C'est la seule asperge qu'il est inutile d'éplucher.

La cuisson des asperges

Dans tous les cas, il faut enlever les extrémités ligneuses (le talon) soit en les coupant, ou, mieux, en les cassant pour les rafraîchir, puis éplucher la partie blanche du haut vers le bas, jusqu'à quatre centimètres sous le bourgeon, des asperges les plus vieilles et les plus grosses. L'asperge verte ayant une peau plus fine, l'épluchage du tiers inférieur est suffisant. Les épluchures et le talon peuvent être utilisés pour composer une soupe

Pour conserver leur couleur et leur texture, il faut les faire cuire aussi peu de temps que possible.

La cuisson des asperges doit de préférence se faire dans un cuit-vapeur pour conserver toute leur délicatesse. Elle peut se faire aussi dans un faitout étroit et haut, au mieux doublé d'un panier perforé. Sinon, placez les asperges liées en botte, debout, l'eau devant affleurer légèrement en dessous des pointes afin qu'elles cuisent à la vapeur.

Utiliser de l'eau bien salée, faire bouillir à vive allure, pour une cuisson rapide qui préservera au mieux la texture et la saveur des asperges. Une fois l'eau à ébullition, prolonger la cuisson de douze à dix-huit minutes, selon la grosseur des tiges.

La meilleure cuisson des asperges blanches est de loin la cuisson dans un blanc (eau + farine + vinaigre blanc ou citron), sans sel, qui préservera leur blancheur et leur saveur douce et subtile.

Astuce : pour conserver leur belle couleur aux asperges vertes, les arroser d'eau glacée juste après les avoir retirées de l'eau de cuisson.

Quelques idées de préparation

Asperges vertes au beurre blanc.
Asperges au jambon de pays
  • Les servir de façon classique accompagnées d'une vinaigrette à la moutarde, d'une sauce mousseline ou d'une sauce beurre blanc.
  • Avec la même sauce, asperges présentées en petits buissons enroulées dans une fine tranche de jambon de pays.
  • Préparer les tiges en mousse ou en velouté et les pointes en salade tiède.
  • Servir les asperges vertes accompagnées d'une sauce maltaise ou d'une vinaigrette au jus de citron et à l'huile d'olive.
  • Si elles sont fines, les faire sauter avec des champignons des bois, et les servir en accompagnement d'une viande blanche type pintade. Elles peuvent aussi accompagner des poissons.
  • Les asperges à la flamande sont servies parsemées d'œuf dur coupé fin après les avoir fait revenir dans du beurre, que l'on rajoute sur le tout après.
  • Après une cuisson rapide à l'eau bouillante, elles peuvent être assaisonnées de fromage blanc, de crème fraîche, de sel, de poivre et/ou de jus de citron.

La production d'asperges

Ramassage des asperges en Allemagne
Pointe d'asperge sortant de terre

L'asperge se cultive en plein champ ou sous châssis dans une aspergeraie. L'aspergiculture utilise deux techniques :

  • Par semis de mars à juin dans une terre riche et meuble en les éclaircissant d'environ dix centimètres, puis en repiquant les griffes obtenues.
  • Par repiquage de griffes, sur un sol bien drainé, sans humidité.

Les rhizomes peuvent atteindre six mètres de longueur en terrain sablonneux. De ces racines jaillissent chaque printemps des rejets charnus appelés turions : recouverts d'écailles serrées, ces pousses peuvent croître de 10 cm/jour. S'ils ne sont pas coupés, les turions donnent des tiges ramifiées de deux mètres de hauteur et qui portent des cladodes. Une aspergeraie peut produire dès la deuxième ou troisième année, et durant une dizaine d'années. La production est de soixante à cent kilogrammes l'are (100 m2)[7].

Production mondiale

Culture d'asperges aux Pays-Bas (Reusel).
Culture plein champ vallée du Danube.

Production en tonnes
Données de FAOSTAT (FAO)

2001 2003 2004
Drapeau de la République populaire de Chine Chine 3 508 000 83 % 5 506 325 88 % 5 806 200 88 %
Drapeau du Pérou Pérou 181 000 4,30 % 187 178 3 % 186 000 3 %
Drapeau des États-Unis États-Unis 103 000 2,45 % 122 020 2 % 122 020 2 %
Drapeau du Mexique Mexique 55 000 1,30 % 67 247 1 % 67 247 1 %
Drapeau de l'Espagne Espagne 57 000 1,35 %
Autres pays 404 381 6 % 390 465 6 %
Total 4 226 000 100 % 6 287 151 100 % 6 571 932 100 %



La France, qui produisait 58,4 Mt d'asperges en 1988, n'en produisit plus que 23,1 Mt en 2001. Ceci est dû, en partie, à ce que la région de production principale, le Languedoc-Roussillon, qui représentait 40 % de la production du pays, avait été frappée par une très importante épidémie de fusariose.

Propriétés médicinales

Illustration botanique allemande.

De la même famille que l'ail et l'oignon, l'asperge a des composantes communes avec ces deux plantes : richesse en vitamines A, B9 et PP, phosphore et manganèse.

Elle contient aussi de l'asparagine et de l'acide asparagusique, une substance dont certains dérivés soufrés donnent une odeur spéciale à l'urine[8]. Plus précisément, deux composants - la S-méthylméthionine et l'acide asparagusique - sont présumés être métabolisés en au moins six composés soufrés odorants dont le méthanethiol (ou méthyl-mercaptan) à l'origine de l'odeur caractéristique de l'urine apparaissant dans les 15 minutes après la consommation d'asperges[9],[10]. Une partie de la population ne métabolise pas ces deux précurseurs en composés odorants, une autre partie est dépourvue des terminaisons olfactives lui permettant de les déceler[11]. Ceci explique que certaines personnes ne perçoivent pas cette odeur particulière. À noter que la proportion des personnes ayant une métabolisation en composés soufrés odorants peut-être très variable d'une population à l'autre. Alors que deux publications donnent une proportion comprise entre 40 et 45 % pour la population britannique, une autre donne 100 % (sur 103 personnes) en France[12].

Elle est diurétique, dépurative, légèrement laxative et galactagogue.

Ce sont les racines qui étaient un peu utilisées en herboristerie. Les turions contiennent un grand nombre de vitamines (A et C), d'acides aminés et d'oligo-éléments.

Pline l'Ancien les conseillait comme aphrodisiaque.

Phytopathologie

Les maladies principales de l'asperge sont la fusariose, le rhizoctone violet, la rouille, la brûlure des aiguilles et la maladie des grains pourpres.

L'asperge est la cible de quelques ravageurs comme la mouche de l'asperge, le criocère de l'asperge, la mouche grise des semis et le puceron de l'asperge (brachycorynella asparagi). Cet aptère de 1,2 à 1,7 mm de couleur vert bleu grisâtre très répandu aux États-Unis est découvert en France en 1989 dans le Languedoc. Par ses piqures il provoque des déformations de la plante. La synthèse des sucres bloquée entraine l'année suivante un nanisme. En outre un champignon fusarium moniliforme (fusariose) peut entrainer en mode opportuniste le dépérissement des plantes affaiblies par le puceron. L'arrachement devient dès lors inévitable[13].

Représentation dans l'art

Botte d'asperges d'Édouard Manet (1880).

Les représentations picturales les plus célèbres sont celles d'Édouard Manet, Botte d'asperges et L'asperge, peintes toutes deux en 1880[14]. Le premier tableau, Botte d'asperges, est vendu à Charles Ephrussi, le célèbre critique et collectionneur d'art russe vivant à Paris, au prix de 800 francs. L'acheteur est si content du tableau qu'il le lui règle 1 000 francs. En retour, Manet réalise alors pour lui un second tableau, représentant cette fois une seule asperge : L'asperge.

Divers

Dans le calendrier républicain français, le 3e jour du mois de germinal, est officiellement dénommé jour de l'Asperge.

Notes et références

  1. a et b Michel Pitrat et Claude Foury, Histoires de légumes, Editions Quae, (lire en ligne), p. 183-184
  2. a et b « Les tomates de Provence passées au chinois »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?) (consulté le ), Commerce international, 2 juillet 2004.
  3. (en) Pam Brunning, « Asparagus », Food & Wine, vol. 3,‎ , p. 6 (lire en ligne)
  4. (en) Greg Frazier, Beverly Frazier, Aphrodisiac cookery, ancient & modern, Troubador Press, , p. 67
  5. Claire Doré, F. Varoquaux, Histoire et amélioration de cinquante plantes cultivées, Éditions Quae, (lire en ligne), p. 86-92
  6. Martine Lizambard, Cuisine, Place Des Editeurs, , p. 7
  7. Jean-Marie Pelt, Des légumes (Livre numérique Google), Fayard, , p. 201
  8. (en) S.C. Mitchell, « Food Idiosyncrasies: Beetroot and Asparagus », Drug Metabolism and Disposition, vol. 29, no 4 Pt 2,‎ , p. 539–534 (PMID 11259347, lire en ligne, consulté le ).
  9. Skinny On : Discovery Channel
  10. Waring RH, Mitchell SC, Fenwick GR. The chemical nature of the urinary odour produced by man after asparagus ingestion, Xenobiotica. Nov;17(11):1363-71,1987
  11. Marcia Levin Pelchat, Cathy Bykowski, Fujiko F. Duke and Danielle R. Reed. Excretion and Perception of a Characteristic Odor in Urine after Asparagus Ingestion: a Psychophysical and Genetic Study « http://chemse.oxfordjournals.org/content/early/2010/09/27/chemse.bjq081.abstract »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?) (consulté le ). Chem. Senses (2010) doi: 10.1093/chemse/bjq081.
  12. Richer, Decker, Belin, Imbs, Montastruc, Giudicelli : "Odorous urine in man after asparagus", British Journal of Clinical Pharmacology, May 1989 « http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC1379934/?page=1 »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?) (consulté le )
  13. M.Hullé, E.Turpeau, Y.Robert, Y.Monet les pucerons des plantes maraichères 1999 éd. INRA p. 66
  14. [pidLi=509&tx_commentaire_pi1[from]=841&cHash=e056157ae1 L'Asperge] D'Édouard Manet au musée d'Orsay.

Voir aussi

Bibliographie

  • Guide des plantes sauvages comestibles et toxiques, François Couplan Eva Styner, Les guides du naturaliste, Delachaux et Niestlé. (ISBN 2-603-00952-4)
  • Pascale Goulin, Mooon plat préféré, Ed. Haleine de tueur, 2012

Articles connexes

Liens externes

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