Mouvement Travail-Études

Le mouvement Travail-Etudes a été créé en 1912 par le Chinois Li Shizeng. Philanthrope et admirateur de la culture française, il avait étudié à l'école agricole du Chesnoy, à Montargis.

Li était un ami de Sun Yat-Sen, qui fut brièvement président de la jeune République chinoise et surtout un des idéologues les plus influents de la Chine du XXème siècle. Comme Sun, Li est convaincu qu'il faut s'inspirer des modèles occidentaux pour développer la Chine. En effet, la Chine est alors en crise et dans une période de mutation profonde. Les famines et les guerres intestines entre seigneurs de guerre ravagent le pays. Les puissances étrangères, notamment le Japon, le Royaume-Uni, la France, ainsi que d'autres nations occidentales se partagent des zones d'influence. En ces temps difficiles, les fondements de la Chine traditionelle sont remis en cause et des idées nouvelles fleurissent pour doter la Chine d'un système qui lui permettrait de se débarasser de la présence étrangère et la remettre au devant de la scène mondiale.

Ainsi, dans l'espoir de former une certaine élite intellectuelle, le mouvement Travail-Etudes favorise le départ vers la France de jeunes étudiants Chinois peu fortunés. Le mouvement prend de l'ampleur après la première guerre mondiale. Jusqu'en 1927, 4000 jeunes chinois viendront étudier et travailler en France dans le cadre du mouvement.

Parmi eux se trouve notamment un groupe de jeunes intellectuels, originaires du Hunan, qui ont découvert avec enthousiasme les idées nouvelles du socialisme. Embarquant pour la France en 1919, ce groupe compte la plupart des amis de Mao Zedong : Cai Hesen, Chen Yi, Li Fuchun, la jeune Xiang Jinyu, et la soeur de Cai Hesen, Chang. Pourtant, le jeune Mao, lui, se contente d'accompagner ses amis sur le quai. Il ne fait pas partie du voyage. Mao, ne quittera d'ailleurs jamais le sol chinois.

Le groupe s'installe à Montargis. Les garçons étudient dans le collège, sous la tutelle du professeur Chapeau, et les filles suivent les cours de Mme Dumont (mère de l'agronome René Dumont) à l'école du Chinchon. Cai correspond fréquemment avec son ami Mao et lui envoie des lettres enthousiastes. Décrivant leur vie en France, Cai se réjouit de constater que la vie n'y est pas si chère, et l'immobilier même parfois moins. Donnant l'exemple de certains amis, il montre que l'on peut facilement s'établir en montant un restaurant ou une boutique artisanale, et enjoint ceux qui sont restés à les retrouver. Mais c'est avant tout de politique que s'entretiennent Cai Hesen, brillant théoricien, et Mao Zedong, qui en admire la sagesse.

En France aussi, au sein du groupe, des joutes se poursuivent au jardin Durzy de Montargis. Il y a ceux qui, autour de Cai, veulent suivre la voie de la révolution russe, et ceux qui prônent une réforme des institutions existantes. Venu de Paris, Zhou Enlai se joint parfois au groupe, entre deux parties de tennis chez des amis français.

Le 13 août 1920, soit quatre mois avant le congrès de Tours qui divise la gauche française, Cai écrit une nouvelle lettre à Mao. Il lui propose la création du Parti communiste chinois (PCC), afin de constituer ce qu'il pense être "l'avant-garde et le commandement de la révolution". Le 1er décembre, Mao lui envoie son accord. Le PCC est créé en juillet 1921 dans la concession française de Shanghaï.

Un an après l'arrivée du groupe de Hunan, Deng Xiaoping débarque, en compagnie de 80 camarades, au port de Marseille le 20 octobre 1920. Il n'est âgé que de 16 ans. (voir l'article sur Deng Xiaoping pour connaître ce passage sur sa vie en France). Comme beaucoup d'autres, il rejoint bientôt le cercle de ces jeunes intellectuels qui constitueront le noyau des cadres du PCC.

Le mouvement travail-études prend fin en 1927, alors que des heurts éclatent à shanghaï entre de jeunes militants Chinois et des soldats des concessions françaises, anglaises et japonaises.

Source

• Article du journal Le Monde : "Montargis, berceau de la Chine nouvelle", le 09/09/06