« Libéral-conservatisme » : différence entre les versions

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[[Fichier:EdmundBurke1771.jpg|vignette|[[Edmund Burke]] : père du libéral-conservatisme.]]


Le '''libéral-conservatisme''' est une [[idéologie]] [[politique]], [[Économie (discipline)|économique]] et [[social]]e qui combine et défend des préoccupations [[Libéralisme|libérales]] et [[Conservatisme|conservatrices]], en particulier pour les [[tradition]]s établies, le respect pour l'[[autorité]], l'[[ordre public]], la [[sécurité]], l'[[identité nationale]], l'héritage [[Religion|religieux]], la [[famille]]. Le penseur emblématique de ce courant [[Droit|juridique]], [[Philosophie|philosophique]] et [[politique]] est [[Edmund Burke]]. Il est possible également d'ajouter [[Georg Wilhelm Friedrich Hegel|George Wilhelm Friedrich Hegel]], [[François Guizot|Francois Guizot]], [[Frédéric Le Play|Frederic Le Play]], [[Wilhelm Röpke|Wilhelm Ropke]], [[Friedrich von Wieser|Friedrich Von Wieser]] et [[Joseph Schumpeter]], comme figures de proue du libéral-conservatisme. Le libéral-conservatisme fait référence à une droite acceptant le changement, mais s'opposant aux idées du [[libéralisme classique]]. En effet, les libéraux-conservateurs défendent les libertés civiles, individuelles et religieuses comme les [[Libéralisme classique|libéraux classiques]], mais refusent, contrairement à ces derniers, de confondre [[État|l'État]] avec la [[société civile]]. Les libertés pour les conservateurs sont acquises au sein d'une communauté grâce à la [[coutume]] et à une histoire commune ; elles ne seraient pas innées et attachées à l'individu, contrairement à ce que pensent les [[Libéralisme classique|libéraux classiques]]. Les libéraux-conservateurs rejettent donc le [[pacifisme]], [[Individualisme|l'individualisme]], [[Universalisme (philosophie)|l'universalisme]] des [[Lumières (philosophie)|Lumières]], les [[droits de l'homme]], le [[cosmopolitisme]] et le [[contractualisme]].
Le '''libéral-conservatisme''' est une [[idéologie]] [[politique]], [[Économie (discipline)|économique]] et [[social]]e qui combine et défend des préoccupations [[Libéralisme|libérales]] et [[Conservatisme|conservatrices]], en particulier pour les [[tradition]]s établies, le respect pour l'[[autorité]], l'[[ordre public]], la [[sécurité]], l'[[identité nationale]], l'héritage [[Religion|religieux]], la [[famille]]. Le penseur emblématique de ce courant [[Droit|juridique]], [[Philosophie|philosophique]] et [[politique]] est [[Edmund Burke]].


Il est possible également d'ajouter [[François Guizot]], [[Frédéric Le Play]], [[Wilhelm Röpke]], [[Friedrich von Wieser]] et [[Joseph Schumpeter]], comme figures de proue du libéral-conservatisme. Le libéral-conservatisme fait référence à une droite acceptant le changement, mais s'opposant aux idées du [[libéralisme classique]]. En effet, les libéraux-conservateurs défendent les libertés civiles, individuelles et religieuses comme les [[Libéralisme classique|libéraux classiques]], mais refusent, contrairement à ces derniers, de confondre [[État|l'État]] avec la [[société civile]].
Le libéralisme conservateur représente l'idéologie dominante des partis [[Europe|européens]] de droite comme l'[[Union chrétienne-démocrate d'Allemagne]] (CDU), le [[Parti conservateur (Royaume-Uni)|Parti conservateur]] au [[Royaume-Uni]], le parti [[Les Républicains]] en [[France]], [[Forza Italia (2013)|Forza Italia]] en [[Italie]] ou encore le [[parti populaire (Espagne)|Parti populaire]] (PP) en [[Espagne]]. Ces derniers sont regroupés au sein du [[Parti populaire européen]]. Le libéral-conservatisme domine également au sein de grands partis de droite en dehors de l'[[Union européenne]]. C'est le cas par exemple du [[Parti républicain (États-Unis)|Parti républicain]] aux [[États-Unis]] ou encore du [[Parti conservateur du Canada]]{{Référence nécessaire}}.

Les libertés pour les conservateurs sont acquises au sein d'une communauté grâce à la [[coutume]] et à une histoire commune ; elles ne seraient pas innées et attachées à l'individu, contrairement à ce que pensent les [[Libéralisme classique|libéraux classiques]]. Les libéraux-conservateurs rejettent donc le [[pacifisme]], l'[[individualisme]], l'[[Universalisme (philosophie)|universalisme]] des [[Lumières (philosophie)|Lumières]], les [[droits de l'homme]], le [[cosmopolitisme]] et le [[contractualisme]].{{Référence nécessaire}}

Le libéral-conservatisme représente l'idéologie dominante des partis [[Europe|européens]] de droite comme l'[[Union chrétienne-démocrate d'Allemagne]] (CDU), le [[Parti conservateur (Royaume-Uni)|Parti conservateur]] au [[Royaume-Uni]], [[Forza Italia (2013)|Forza Italia]] en [[Italie]] ou encore le [[parti populaire (Espagne)|Parti populaire]] (PP) en [[Espagne]]. Ces derniers sont regroupés au sein du [[Parti populaire européen]]. Le libéral-conservatisme domine également au sein de grands partis de droite en dehors de l'[[Union européenne]]. C'est le cas par exemple du [[Parti républicain (États-Unis)|Parti républicain]] aux [[États-Unis]] ou encore du [[Parti conservateur du Canada]]{{Référence nécessaire}}.


== Présentation générale ==
== Présentation générale ==
Les libéraux-conservateurs sont pour la [[propriété privée]] et une [[économie de marché]] modérée. Ces [[Conservatisme|conservateurs]] rejettent résolument les idées [[Modernité|modernes]], à savoir la défense de [[Droit subjectif|droits individuels]], de [[Isonomie|l'égalité des droits]], du [[Du contrat social|contrat social]] et d'une [[Distinction entre liberté positive et liberté négative|liberté négative]]. Au [[libéralisme]] des [[Modernité|modernes]], potentiellement despotique<ref>{{Ouvrage|auteur1=Friedrich Hayek|titre=Vrai et faux individualisme}}</ref>, [[Relativisme|relativiste]], [[Conventionnalisme|conventionnaliste]] et [[Utilitarisme|utilitariste]], ils opposent un [[libéralisme]] ancien, [[Républicanisme|républicain]]<ref>{{Lien web |langue=fr|titre=Le libéralisme antique et moderne de Leo Strauss |url=https://vudailleurs.com/le-liberalisme-antique-et-moderne-de-leo-strauss/ |site=Vu d'ailleurs |date=2015-02-16 |consulté le=2020-06-14}}</ref>. Ce faisant, ils s'imposent aux idées du [[libéralisme classique]]. Ainsi, les libéraux conservateurs se référent à [[Alexis de Tocqueville]]<ref>{{Ouvrage|prénom1=Lamberti,|nom1=Jean-Claude.|titre=La notion d'individualisme chez Tocqueville|éditeur=Presses universitaires de France|date=1970|oclc=220451380}}</ref>. Pour ce dernier, [[Individualisme|l'individualisme]] doit être vu comme la mise en place de la "petite société". Il s'agit de la défense de la "[[famille]]" dans le sens que les anciens [[Grecs]] et [[Rome antique|Romains]] donnent à ce terme. Les parents et les amis constituent cette petite [[Société (sciences sociales)|société]] créée à la mesure de [[Individu|l'individu]]. Aussi, les libéraux conservateurs sont considérés comme appartenant à une famille [[Philosophie antique|ancienne]] du [[libéralisme]]<ref>{{Article|prénom1=Adrien |nom1=Louis |titre=Voir et comprendre la politique moderne |périodique=Archives de Philosophie |volume=79 |numéro=3 |date=2016 |issn=0003-9632 |issn2=1769-681X |doi=10.3917/aphi.793.0485 |lire en ligne=http://dx.doi.org/10.3917/aphi.793.0485 |pages=485 }}</ref>.

Les libéraux-conservateurs sont pour la [[propriété privée]] et une [[économie de marché]] modérée. Ces [[Conservatisme|conservateurs]] rejettent résolument les idées [[Modernité|modernes]], à savoir la défense de [[Droit subjectif|droits individuels]], de [[Isonomie|l'égalité des droits]], du [[Du contrat social|contrat social]] et d'une [[Distinction entre liberté positive et liberté négative|liberté négative]]. Au [[libéralisme]] des [[Modernité|modernes]], potentiellement despotique<ref>{Friedrich Hayek, Vrai et faux individualisme</ref>, [[Relativisme|relativiste]], [[Conventionnalisme|conventionnaliste]] et [[Utilitarisme|utilitariste]], ils opposent un [[libéralisme]] ancien, [[Républicanisme|républicain]]<ref>{{Lien web |langue=fr-FR |prénom=16 Fév 2015 {{!}} |nom=International |prénom2=Levée de |nom2=Fonds |titre=Le libéralisme antique et moderne de Leo Strauss |url=https://vudailleurs.com/le-liberalisme-antique-et-moderne-de-leo-strauss/ |site=Vu d'ailleurs |date=2015-02-16 |consulté le=2020-06-14}}</ref>. Ce faisant, ils s'imposent aux idées du [[libéralisme classique]]. Ainsi, les libéraux conservateurs se référent à [[Alexis de Tocqueville]]<ref>{{Ouvrage|prénom1=Lamberti,|nom1=Jean-Claude.|titre=La notion d'individualisme chez Tocqueville|éditeur=Presses universitaires de France|date=1970|oclc=220451380|lire en ligne=http://worldcat.org/oclc/220451380|consulté le=2021-04-15}}</ref>. Pour ce dernier, [[Individualisme|l'individualisme]] doit être vu comme la mise en place de la "petite société". Il s'agit de la défense de la "[[famille]]"dans le sens que les anciens [[Grecs]] et [[Rome antique|Romains]] donnent à ce terme. Les parents et les amis constituent cette petite [[Société (sciences sociales)|société]] créée à la mesure de [[Individu|l'individu]]. Aussi, les libéraux conservateurs sont considérés comme appartenant à une famille [[Philosophie antique|ancienne]] du [[libéralisme]]<ref>{{Article |auteur1= |prénom1=Adrien |nom1=Louis |titre=Voir et comprendre la politique moderne |périodique=Archives de Philosophie |volume=79 |numéro=3 |date=2016 |issn=0003-9632 |issn2=1769-681X |doi=10.3917/aphi.793.0485 |lire en ligne=http://dx.doi.org/10.3917/aphi.793.0485 |pages=485 }}</ref>.


=== Le conservatisme libéral : défense du droit naturel classique ===
=== Le conservatisme libéral : défense du droit naturel classique ===
Ce qui oppose les libéraux-conservateurs aux [[Libéralisme classique|libéraux classiques]], c'est un désaccord sur ce que doit être le [[droit naturel]]<ref>{{Lien web|langue=fr-FR|titre=Quatre conceptions du droit naturel (1)|url=https://www.contrepoints.org/2014/04/09/162198-quatre-conceptions-du-droit-naturel-1|site=Contrepoints|date=2014-04-09}}</ref>{{,}}<ref>{{Lien web|langue=fr-FR|titre=Quatre conceptions du droit naturel (2)|url=https://www.contrepoints.org/2014/04/10/162392-quatre-conceptions-du-droit-naturel-2|site=Contrepoints|date=2014-04-10}}</ref>. Pour les premiers, le [[droit]] ne doit en aucun cas être confondu avec la [[loi]], même s'il doit être découvert par la [[raison]], mais consiste à dire ce qui est juste; c'est le [[droit]] des [[Philosophie antique|classique]]<ref>{{Lien web|langue=fr-FR|titre=La justice selon Aristote|url=https://1000-idees-de-culture-generale.fr/justice-aristote/|site=1000 idées de culture générale|date=2015-12-31}}</ref>. Cela suppose un travail de réflexion de la part des [[Juriste|juristes]], des [[Philosophe|philosophes]] et [[Politologue|politologues]] sur la nature de la [[vérité]], du souverain [[Summum bonum|bien]], de la bonne société. Le [[droit]] n'est pas connu de prime abord, aussi il doit être recherché et adapté selon les situations. Les divergences entre [[Philosophie antique|classiques]] et [[Modernité|modernes]] se situent sur le plan [[Droit|juridique]].
Ce qui oppose les libéraux-conservateurs aux [[Libéralisme classique|libéraux classiques]], c'est un désaccord sur ce que doit être le [[droit naturel]]<ref>{{Lien web|langue=fr|titre=Quatre conceptions du droit naturel (1)|url=https://www.contrepoints.org/2014/04/09/162198-quatre-conceptions-du-droit-naturel-1|site=Contrepoints|date=2014-04-09}}</ref>{{,}}<ref>{{Lien web|langue=fr|titre=Quatre conceptions du droit naturel (2)|url=https://www.contrepoints.org/2014/04/10/162392-quatre-conceptions-du-droit-naturel-2|site=Contrepoints|date=2014-04-10}}</ref>. Pour les premiers, le [[droit]] ne doit en aucun cas être confondu avec la [[loi]], même s'il doit être découvert par la [[raison]], mais consiste à dire ce qui est juste ; c'est le [[droit]] des [[Philosophie antique|classique]]<ref>{{Lien web|langue=fr|titre=La justice selon Aristote|url=https://1000-idees-de-culture-generale.fr/justice-aristote/|site=1000 idées de culture générale|date=2015-12-31}}</ref>. Cela suppose un travail de réflexion de la part des [[juriste]]s, des [[philosophe]]s et [[politologue]]s sur la nature de la [[vérité]], du souverain [[Summum bonum|bien]], de la bonne société. Le [[droit]] n'est pas connu de prime abord, aussi il doit être recherché et adapté selon les situations. Les divergences entre [[Philosophie antique|classiques]] et [[Modernité|modernes]] se situent sur le plan [[Droit|juridique]].


Les [[Conservatisme|conservateurs]] reprochent aux [[Modernité|modernes]] d'avoir osé penser le [[droit]] comme émanant de l'individu. Ils accusent également les [[Libéralisme classique|libéraux classiques]], les premiers [[Modernité|modernes]], d'avoir ouvert la porte au [[positivisme juridique]] en affirmant que le [[droit]] se trouve dans des [[Loi|lois]] rationnelles<ref>{{Lien web|langue=fr-FR|titre=Du Droit naturel au positivisme juridique|url=https://www.contrepoints.org/2013/06/05/126700-du-droit-naturel-au-positivisme-juridique|site=Contrepoints|date=2013-06-05}}</ref> et à [[Utilitarisme|l'utilitarisme]] en pensant la société à partir des passions individuelles. Le conservateur libéral rejette également le [[Relativisme|relativisme des valeurs]] et le [[progressisme]] épousés par le [[Modernité|moderne]]. Contrairement au [[Libéralisme classique|libéral classique]] et au [[Jacobinisme|jacobin]], il préfèrera le [[droit romain]] aux [[Droits de l'homme|Droits de l'Homme]]<ref>{{Lien web|langue=fr-FR|nom1=Schnebel|prénom1=Vincent|titre=Les droits de l’homme, une œuvre critiquée par Edmund Burke|url=https://chevaliersdesgrandsarrets.com/2011/11/01/les-droits-de-lhomme-une-oeuvre-critiquee-par-edmund-burke/|site=Les Chevaliers des Grands Arrêts|date=2011-11-01}}</ref>. A contrario, le [[Libéralisme classique|libéral classique]] défend une conception [[Individualisme|individualiste]] et [[Égalitarisme|égalitaire]] du [[droit naturel]]. La [[Distinction entre liberté positive et liberté négative|liberté négative]], [[Modernité|moderne]], que le [[Libéralisme|libéral]] défend a pu effectivement conduire au [[relativisme]] et au [[positivisme]], car celui-ci sépare les [[Fait|faits]] des [[Valeur morale|valeurs]], opposant la [[raison]] à la [[tradition]]<ref>"Nous pouvons nier la vérité, si nous avons en vue d'affirmer par là notre liberté", Descartes, ''Lettre au Père Mesland'', 1645</ref>.
Les [[Conservatisme|conservateurs]] reprochent aux [[Modernité|modernes]] d'avoir osé penser le [[droit]] comme émanant de l'individu. Ils accusent également les [[Libéralisme classique|libéraux classiques]], les premiers [[Modernité|modernes]], d'avoir ouvert la porte au [[positivisme juridique]] en affirmant que le [[droit]] se trouve dans des [[loi]]s rationnelles<ref>{{Lien web|langue=fr|titre=Du Droit naturel au positivisme juridique|url=https://www.contrepoints.org/2013/06/05/126700-du-droit-naturel-au-positivisme-juridique|site=Contrepoints|date=2013-06-05}}</ref> et à [[Utilitarisme|l'utilitarisme]] en pensant la société à partir des passions individuelles. Le conservateur libéral rejette également le [[Relativisme|relativisme des valeurs]] et le [[progressisme]] épousés par le [[Modernité|moderne]]. Contrairement au [[Libéralisme classique|libéral classique]] et au [[Jacobinisme|jacobin]], il préfèrera le [[droit romain]] aux [[Droits de l'homme|Droits de l'Homme]]<ref>{{Lien web|langue=fr|nom1=Schnebel|prénom1=Vincent|titre=Les droits de l’homme, une œuvre critiquée par Edmund Burke|url=https://chevaliersdesgrandsarrets.com/2011/11/01/les-droits-de-lhomme-une-oeuvre-critiquee-par-edmund-burke/|site=Les Chevaliers des Grands Arrêts|date=2011-11-01}}</ref>. A contrario, le [[Libéralisme classique|libéral classique]] défend une conception [[Individualisme|individualiste]] et [[Égalitarisme|égalitaire]] du [[droit naturel]]. La [[Distinction entre liberté positive et liberté négative|liberté négative]], [[Modernité|moderne]], que le [[Libéralisme|libéral]] défend a pu effectivement conduire au [[relativisme]] et au [[positivisme]], car celui-ci sépare les [[fait]]s des [[Valeur morale|valeurs]], opposant la [[raison]] à la [[tradition]]<ref>"Nous pouvons nier la vérité, si nous avons en vue d'affirmer par là notre liberté", Descartes, ''Lettre au Père Mesland'', 1645</ref>.


=== Concordances, convergences et oppositions des diverses doctrines et systèmes politiques ===
=== Concordances, convergences et oppositions des diverses doctrines et systèmes politiques ===
Le [[conservatisme]] apparaît comme une alternative au [[libéralisme|libéralisme moderne]]<ref>{{Lien web |auteur1=Thibaut Gress |titre=Entretien avec Philippe Raynaud : autour des Trois Révolutions de la liberté |url=http://www.actu-philosophia.com/spip.php?article210#nh4 |site=actu-philosophia.com |date=17 mars 2010}}.</ref>. C'est toute son ambiguïté : comme les hommes ont besoin à la fois d’enracinement et d'émancipation, il peut vouloir accompagner plus largement les bienfaits du libéralisme, le rendre plus protecteur à l'égard de l'émancipation sans prudence ou encore le considérer comme vicié, donc vouloir le renverser. Sauf dans ce dernier cas, le [[conservatisme]] est donc prêt à composer avec le [[libéralisme]]. De même, il ne suffit pas qu'une société soit « ouverte », économiquement parlant, pour qu'y règne la liberté. Celle-ci suppose, outre la liberté de choisir des biens de consommation, celle de peser sur les destinées collectives. Contrairement aux [[Libéralisme|libéraux]], les conservateurs libéraux ne croient pas que l'égalité et la [[liberté]] soient compatibles<ref>{{Lien web|langue=fr|titre=Le conservatisme, contrairement au libéralisme, considère qu’il y a incompatibilité absolue entre la liberté et l’égalité|url=https://www.atlantico.fr/decryptage/2809198/le-conservatisme-contrairement-au-liberalisme-considere-qu-il-y-a-incompatibilite-absolue-entre-la-liberte-et-l-egalite-qu-est-ce-que-le-conservatisme-jean-philippe-vincent-editions-les-belles-lettres-|site=Atlantico.fr|date=}}</ref>.


Le libéral-conservatisme s'oppose également au [[centralisme]]. La [[décentralisation]], conjuguée avec le [[fédéralisme]] et le [[principe de subsidiarité]], permet d'initier les [[Citoyenneté|citoyens]] à la vie politique et éviter le despotisme de l’[[État]]<ref>Voir essentiellement les écrits de référence. Pour le régime fédéral, il faut évoquer ici par Hamilton. Pour la décentralisation : ''De la démocratie en Amérique'', vol. II, {{IIe}} partie, chap. IV, Éd. Garnier-Flammarion, 1981, {{p.|133}} ({{1re}} éd., 1840)</ref>{{,}}<ref>{{Ouvrage |auteur1=[[Chantal Delsol]] |titre=Principe de subsidiarité |éditeur=[[Presses universitaires de France|PUF]] |année= |isbn=}}</ref>. Ainsi, il s'oppose logiquement aux régimes [[Totalitarisme|totalitaires]], le [[communisme]] par exemple, c'est-à-dire lorsqu’un [[État]] contrôle tous les pouvoirs, notamment économique, religieux, médiatique, etc. Le libéral-conservateur rejoint le [[Libéralisme classique|libéral classique]] sur le rejet de la [[tyran]]nie et du [[droit positif]]. Il soutient la [[propriété privée]] et une [[Libre-échange|liberté de commerce]] modérée, mais se méfie de la [[démocratie représentative]] et du [[progressisme]] défendus par des penseurs [[Modernité|modernes]] comme [[Benjamin Constant]]<ref>[[De la liberté des Anciens comparée à celle des Modernes]]</ref>.
Le [[conservatisme]] apparaît comme une alternative au [[libéralisme|libéralisme moderne]]<ref>{{Lien web |auteur1=Thibaut Gress |titre=Entretien avec Philippe Raynaud : autour des Trois Révolutions de la liberté |url=http://www.actu-philosophia.com/spip.php?article210#nh4 |site=actu-philosophia.com |date=17 mars 2010}}.</ref>. C'est toute son ambiguïté : comme les hommes ont besoin à la fois d’enracinement et d'émancipation, il peut vouloir accompagner plus largement les bienfaits du libéralisme, le rendre plus protecteur à l'égard de l'émancipation sans prudence ou encore le considérer comme vicié, donc vouloir le renverser. Sauf dans ce dernier cas, le [[conservatisme]] est donc prêt à composer avec le [[libéralisme]]. De même, il ne suffit pas qu'une société soit « ouverte », économiquement parlant, pour qu'y règne la liberté. Celle-ci suppose, outre la liberté de choisir des biens de consommation, celle de peser sur les destinées collectives. Contrairement aux [[Libéralisme|libéraux]], les conservateurs libéraux ne croient pas que l'égalité et la [[liberté]] soient compatibles<ref>{{Lien web|langue=fr|titre=Le conservatisme, contrairement au libéralisme, considère qu’il y a incompatibilité absolue entre la liberté et l’égalité|url=https://www.atlantico.fr/decryptage/2809198/le-conservatisme-contrairement-au-liberalisme-considere-qu-il-y-a-incompatibilite-absolue-entre-la-liberte-et-l-egalite-qu-est-ce-que-le-conservatisme-jean-philippe-vincent-editions-les-belles-lettres-|site=Atlantico.fr|date=}}</ref>.

Le libéral-conservatisme s'oppose également au [[centralisme]]. La [[décentralisation]], conjuguée avec le [[fédéralisme]] et le [[principe de subsidiarité]], permet d'initier les [[Citoyenneté|citoyens]] à la vie politique et éviter le despotisme de l’[[État]]<ref>Voir essentiellement les écrits de référence. Pour le régime fédéral, il faut évoquer ici par Hamilton. Pour la décentralisation : ''De la démocratie en Amérique'', vol. II, {{IIe}} partie, chap. IV, Éd. Garnier-Flammarion, 1981, {{p.|133}} ({{1re}} éd., 1840)</ref>{{,}}<ref>{{Ouvrage |auteur1=[[Chantal Delsol]] |titre=Principe de subsidiarité |éditeur=[[Presses universitaires de France|PUF]] |année= |isbn=}}</ref>. Ainsi, il s'oppose logiquement aux régimes [[Totalitarisme|totalitaires]], le [[communisme]] par exemple, c'est-à-dire lors qu’un [[État]] contrôle tous les pouvoirs, notamment économique, religieux, médiatique, etc. Le libéral-conservateur rejoint le [[Libéralisme classique|libéral classique]] sur le rejet de la [[Tyran|tyrannie]] et du [[droit positif]]. Il soutient la [[propriété privée]] et une [[Libre-échange|liberté de commerce]] modérée, mais se méfie de la [[démocratie représentative]] et du [[progressisme]] défendus par des penseurs [[Modernité|modernes]] comme [[Benjamin Constant]]<ref>[[De la liberté des Anciens comparée à celle des Modernes]]</ref>.


== Usage du terme ==
== Usage du terme ==
Dans de nombreux pays, les partis d'idéologie conservatrice ont, avec le temps, adopté des arguments [[Modernité|modernes]]. Le terme « conservateur » plutôt que « libéral-conservateur » est souvent employé pour qualifier les personnes concernées. Dans les pays où les idées libérales sont considérées comme relevant de la [[tradition]], comme les [[États-Unis]], le [[conservatisme]] est aussi une notion englobant la défense du [[conservatisme]] classique et du [[libéralisme classique]]. Dans d'autres pays où les mouvements libéraux-conservateurs sont devenus des courants politiques dominants, les termes « libéral » et « conservateur » peuvent devenir synonymes (comme en [[Australie]], en [[Italie]] et en [[Espagne]]). En revanche, aux [[États-Unis]] et au [[Royaume-Uni]], ces deux termes sont antinomiques, radicalement opposés. Des idées [[Libéralisme|libérales]] et [[Modernité|modernes]] se sont imposées dans certaines franges conservatrices des États-Unis (le [[Paléo-libertarianisme|paléolibertarianisme]], le [[Paléo-conservatisme|paléoconservatisme]] et le [[Tea Party (mouvement politique)|Tea Party]] sont des doctrines conservatrices défendant une posture [[Individualisme|individualiste]]). Il s'agit d'une particularité américaine consistant à combiner l'[[individualisme méthodologique]] du [[libéralisme classique]] à une certaine forme de [[conservatisme]] (les écrits de [[Russell Kirk]] renseignent sur cette tendance). Inversement, le [[Néo-conservatisme|néoconservatisme]], dominant au [[Parti républicain (États-Unis)|parti républicain]], souhaite redécouvrir le [[droit naturel]] des [[Philosophie antique|classiques]]<ref>{{Ouvrage|langue=en|nom1=Norton, Anne.|titre=Leo Strauss and the politics of American empire|éditeur=[[Yale University Press]]|année=2004|isbn=0-300-10436-7|isbn2=978-0-300-10436-3|isbn3=0-300-10973-3|oclc=55146163}}</ref>. Les libéraux-conservateurs français rejoignent les [[Néo-conservatisme|néoconservateurs]] américains sur ce point et refusent d'accorder du crédit au [[libéralisme classique]]<ref>{{Lien web|langue=fr|nom1=Beigbeder|prénom1=Charles|titre=Peut-on être libéral et conservateur? La réponse de Charles Beigbeder à Gaspard Koenig|url=https://www.lefigaro.fr/vox/economie/2015/04/21/31007-20150421ARTFIG00133-peut-on-etre-liberal-et-conservateur-la-reponse-de-charles-beigbeder-a-gaspard-koenig.php|site=Le Figaro.fr|date=2015-04-21}}</ref>.


Un deuxième sens du terme s'est développé en [[Europe]], combinant des visions conservatrices « modernes » (moins [[Catholicisme traditionaliste|traditionalistes]]) avec une certaine forme de [[social-libéralisme]]. Il s'est généralement développé en opposition aux conceptions plus [[Collectivisme|collectivistes]] du [[socialisme]]. Souvent, il s'agit de souligner la nécessité d'un maintien de visions conservatrices du [[libre marché]] et de la croyance en la [[responsabilité individuelle]], tout en adoptant des positionnements [[Social-libéralisme|sociaux-libéraux]] quant à la défense des [[droits civiques]], de la [[protection de l'environnement]] et du soutien à un petit [[État-providence]]. Cette [[philosophie]] est celle de l'actuel [[Fredrik Reinfeldt]] (Premier ministre suédois de 2006 à 2014), ainsi que de [[David Cameron]] (le Premier ministre britannique de 2010 à 2016) et de [[Theresa May]], qui lui a succédé dans la fonction. [[David Cameron]] parle de {{citation|conservatisme moderne}}<ref>{{Lien web|langue=fr|nom1=J.D|titre=David Cameron, conservateur mais moderne|url=https://www.lefigaro.fr/international/2006/05/05/01003-20060505ARTWWW90770-david_cameron_conservateur_mais_moderne.php|site=Le Figaro.fr|date=2006-05-05}}</ref> pour expliquer la [[doctrine]] actuelle des [[Tory|tories]]. En Europe continentale, ce terme peut être traduit de l'anglais par « [[conservatisme social]] ».
Dans de nombreux pays, les partis d'idéologie conservatrice ont, avec le temps, adopté des arguments [[Modernité|modernes]]. Le terme « conservateur » plutôt que « libéral-conservateur » est souvent employé pour qualifier les personnes concernées. Dans les pays où les idées libérales sont considérées comme relevant de la [[tradition]], comme les [[États-Unis]], le [[conservatisme]] est aussi une notion englobant la défense du [[conservatisme]] classique et du [[libéralisme classique]]. Dans d'autres pays où les mouvements libéraux-conservateurs sont devenus des courants politiques dominants, les termes « libéral » et « conservateur » peuvent devenir synonymes (comme en [[Australie]], en [[Italie]] et en [[Espagne]]). En revanche, aux [[États-Unis]] et au [[Royaume-Uni]], ces deux termes sont antinomiques, radicalement opposés. Des idées [[Libéralisme|libérales]] et [[Modernité|modernes]] se sont imposées dans certaines franges conservatrices des États-Unis (le [[Paléo-libertarianisme|paléolibertarianisme]], le [[Paléo-conservatisme|paléoconservatisme]] et le [[Tea Party (mouvement politique)|Tea Party]] sont des doctrines conservatrices défendant une posture [[Individualisme|individualiste]]). Il s'agit d'une particularité américaine consistant à combiner l'[[individualisme méthodologique]] du [[libéralisme classique]] à une certaine forme de [[conservatisme]] (les écrits de [[Russell Kirk]] renseignent sur cette tendance). Inversement, le [[Néo-conservatisme|néoconservatisme]], dominant au [[Parti républicain (États-Unis)|parti républicain]], souhaite redécouvrir le [[droit naturel]] des [[Philosophie antique|classiques]]<ref>{{Ouvrage|nom1=Norton, Anne.|titre=Leo Strauss and the politics of American empire|éditeur=[[Yale University Press]]|année=2004|isbn=0-300-10436-7|isbn2=978-0-300-10436-3|isbn3=0-300-10973-3|oclc=55146163|lire en ligne=http://worldcat.org/oclc/55146163}}</ref>. Les libéraux-conservateurs français rejoignent les [[Néo-conservatisme|néoconservateurs]] américains sur ce point et refusent d'accorder du crédit au [[libéralisme classique]]<ref>{{Lien web|langue=fr|nom1=Beigbeder|prénom1=Charles|titre=Peut-on être libéral et conservateur? La réponse de Charles Beigbeder à Gaspard Koenig|url=https://www.lefigaro.fr/vox/economie/2015/04/21/31007-20150421ARTFIG00133-peut-on-etre-liberal-et-conservateur-la-reponse-de-charles-beigbeder-a-gaspard-koenig.php|site=Le Figaro.fr|date=2015-04-21}}</ref>.

Un deuxième sens du terme s'est développé en [[Europe]], combinant des visions conservatrices « modernes » (moins [[Catholicisme traditionaliste|traditionalistes]]) avec une certaine forme de [[social-libéralisme]]. Il s'est généralement développé en opposition aux conceptions plus [[Collectivisme|collectivistes]] du [[socialisme]]. Souvent, il s'agit de souligner la nécessité d'un maintien de visions conservatrices du [[libre marché]] et de la croyance en la [[responsabilité individuelle]], tout en adoptant des positionnements [[Social-libéralisme|sociaux-libéraux]] quant à la défense des [[droits civiques]], de la [[protection de l'environnement]] et du soutien à un petit [[État-providence]]. Cette [[philosophie]] est celle de l'actuel [[Fredrik Reinfeldt]] (Premier ministre suédois de 2006 à 2014), ainsi que de [[David Cameron]] (le Premier ministre britannique de 2010 à 2016) et de [[Theresa May]], qui lui a succédé dans la fonction. [[David Cameron]] parle de "conservatisme moderne"<ref>{{Lien web|langue=fr|nom1=J.D|titre=David Cameron, conservateur mais moderne|url=https://www.lefigaro.fr/international/2006/05/05/01003-20060505ARTWWW90770-david_cameron_conservateur_mais_moderne.php|site=Le Figaro.fr|date=2006-05-05}}</ref> pour expliquer la [[doctrine]] actuelle des [[Tory|tories]]. En Europe continentale, ce terme peut être traduit de l'anglais par « [[conservatisme social]] ».


== Fondements du libéralisme-conservatisme ==
== Fondements du libéralisme-conservatisme ==
=== Tradition et scepticisme envers le rationalisme moderne ===
=== Tradition et scepticisme envers le rationalisme moderne ===
Comme la mécanique sociale échappe souvent à la compréhension et au contrôle de l’homme, l’idée que l’on puisse instaurer un système parfait en mesure de gérer le social est à éviter, parce qu’elle relève tout simplement de l’[[utopie]]. Une telle pensée revendique le [[concret]], le réel, le continu, contre la fiction abstraite des constructions ex nihilo. On parlera plutôt de [[Scepticisme (philosophie)|scepticisme]] envers la [[raison]] quand celle-ci prétend percer tous les mystères du monde. Les conservateurs préfèrent plutôt le [[rationalisme]] des penseurs [[Philosophie antique|classiques]]<ref>{{Lien web|langue=français|auteur1=Charles Boyer|titre=Nihilisme versus droit naturel : lecture de Léo Strauss|url=https://www.cairn.info/revue-le-philosophoire-2011-1-page-213.htm#|site=cairn.info|périodique=Le Philosophoire|date=2011}}</ref>. C’est pourquoi il est aussi préférable de se conformer à ce qui existe, c’est-à-dire à l’[[Ordre public|ordre]] et aux [[tradition]]s engendrés par le cours de l’histoire et le travail des ancêtres. Ceci a amené naturellement [[Michael Oakeshott]] à se définir comme conservateur de la manière suivante : {{citation|être conservateur, par conséquent, est préférer le familier à l’inconnu, préférer ce qui a déjà été utilisé à ce qui ne l’a jamais été, préférer le fait au mystère, le vrai au possible, le limité au flou, ce qui est proche plus que ce qui est distant, le suffisant à l’excédent, le convenable au parfait (…)}}. En effet, comme l’écrit [[Philippe Bénéton]], la tradition constitue {{citation|cet héritage […] essentiel à l’homme parce que sa raison est faible et bornée}}<ref>{{Ouvrage |auteur1=Philippe Bénéton |titre=Le conservatisme |lieu=Paris |éditeur= Presses universitaires de France |année=1988 |passage=106 |isbn=}}.</ref>. Irremplaçable fruit de la sagesse des générations passées, la tradition est le révélateur du caractère de chaque peuple. De plus, les libéraux-conservateurs considèrent qu'une [[Société (sciences sociales)|société]] - le vivre ensemble - ne peut exister qu’à travers des ordres de moralité, c'est-à-dire où l’on distingue ce qui est dû, ce qui est permis et ce qui est interdit (retour au [[droit naturel]] ancien).


En somme, si la [[Terreur (Révolution française)|révolution de 1793]] appelée aussi Terreur - à distinguer de la [[révolution française|révolution de 1789]]<ref>{{Ouvrage |auteur1=[[Philippe Nemo]] |titre=Les Deux Républiques françaises |éditeur=[[Presses universitaires de France|PUF]] |collection=Hors collection |année=2008 |pages totales=307 |isbn=}}</ref> - se trouve tant vilipendée par les libéraux-conservateurs, c’est qu’elle représente une brisure irréparable dans ce qui avait mis des siècles à être élaboré.
Comme la mécanique sociale échappe souvent à la compréhension et au contrôle de l’homme, l’idée que l’on puisse instaurer un système parfait en mesure de gérer le social est à éviter, parce qu’elle relève tout simplement de l’[[utopie]]. Une telle pensée revendique le [[concret]], le réel, le continu, contre la fiction abstraite des constructions ex nihilo. On parlera plutôt de [[Scepticisme (philosophie)|scepticisme]] envers la [[raison]] quand celle-ci prétend percer tous les mystères du monde. Les conservateurs préfèrent plutôt le [[rationalisme]] des penseurs [[Philosophie antique|classiques]]<ref>{{Lien web|langue=français|auteur1=Charles Boyer|titre=Nihilisme versus droit naturel : lecture de Léo Strauss|url=https://www.cairn.info/revue-le-philosophoire-2011-1-page-213.htm#|site=cairn.info|périodique=Le Philosophoire|date=2011}}</ref>. C’est pourquoi il est aussi préférable de se conformer à ce qui existe, c’est-à-dire à l’[[Ordre public|ordre]] et aux [[tradition]]s engendrés par le cours de l’histoire et le travail des ancêtres. Ceci a amené naturellement [[Michael Oakeshott]] à se définir comme conservateur de la manière suivante : « être conservateur, par conséquent, est préférer le familier à l’inconnu, préférer ce qui a déjà été utilisé à ce qui ne l’a jamais été, préférer le fait au mystère, le vrai au possible, le limité au flou, ce qui est proche plus que ce qui est distant, le suffisant à l’excédent, le convenable au parfait (…). ». En effet, comme l’écrit [[Philippe Bénéton]], la tradition constitue « cet héritage […] essentiel à l’homme parce que sa raison est faible et bornée »<ref>{{Ouvrage |auteur1=Philippe Bénéton |titre=Le conservatisme |lieu=Paris |éditeur== Presses universitaires de France |année=1988 |passage=106 |isbn=}}.</ref>. Irremplaçable fruit de la sagesse des générations passées, la tradition est le révélateur du caractère de chaque peuple. De plus, les libéraux-conservateurs considèrent qu'une [[Société (sciences sociales)|société]] - le vivre ensemble - ne peut exister qu’à travers des ordres de moralité, c'est-à-dire où l’on distingue ce qui est dû, ce qui est permis et ce qui est interdit (retour au [[droit naturel]] ancien).
En somme, si la [[Terreur (Révolution française)|révolution de 1793]] appelée aussi Terreur - à distinguer de la [[révolution française|révolution de 1789]]<ref>{{Ouvrage |auteur1=[[Philippe Nemo]] |titre=Les Deux Républiques françaises |éditeur=[[Presses universitaires de France|PUF]] |collection=Hors collection |année=2008 |pages totales=307 |isbn=}}</ref> - se trouve tant vilipendée par les libéraux-conservateurs, c’est qu’elle représente une brisure irréparable dans ce qui avait mis des siècles à être élaboré.


Ce conservatisme, pris au sens de conservation, a - toujours - pour tâche d’entourer et de protéger quelque chose, notamment en ce qui concerne l’[[éducation]] selon les propos de [[Hannah Arendt]]. Bien entendu, le libéralisme-conservatisme accepte le monde ''tel qu’il est'' - et ne définit pas sa lutte que pour préserver - accepte donc l’intervention d’êtres humains décidés à modifier le cours des choses et à créer du neuf.
Ce conservatisme, pris au sens de conservation, a - toujours - pour tâche d’entourer et de protéger quelque chose, notamment en ce qui concerne l’[[éducation]] selon les propos de [[Hannah Arendt]]. Bien entendu, le libéralisme-conservatisme accepte le monde ''tel qu’il est'' - et ne définit pas sa lutte que pour préserver - accepte donc l’intervention d’êtres humains décidés à modifier le cours des choses et à créer du neuf.
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== En Europe ==
== Partis politiques ==
=== En France ===
Le libéral-conservatisme a prédominé en France, derrière [[François-René de Chateaubriand|Chateaubriand]], derrière des catholiques libéraux comme [[Charles de Montalembert]] ; il a existé derrière la [[Monarchie de Juillet]], et il a failli resurgir durablement autour du [[Ralliement]], un grand rassemblement, susceptible d'incarner une [[droite républicaine]], démocrate, conservatrice et libérale. Mais il s’est affronté au « catholicisme intransigeant ». Dans l'histoire politique de la France, on peut citer la [[Fédération républicaine]], parti de droite de la première moitié du {{s-|XX}} qui présentait, à ses débuts des éléments du libéral-conservatisme.

=== Partis politiques ===

Au [[Parlement européen]], les libéraux-conservateurs sont unis au sein du [[Parti populaire européen]], mais on en compte aussi quelques-uns dans l'[[Alliance des démocrates et des libéraux pour l'Europe]] et l'[[Alliance des conservateurs et réformistes européens]]. Plusieurs partis d'Europe occidentale ou du nord sont particulièrement représentatifs de cette mouvance politique :
Au [[Parlement européen]], les libéraux-conservateurs sont unis au sein du [[Parti populaire européen]], mais on en compte aussi quelques-uns dans l'[[Alliance des démocrates et des libéraux pour l'Europe]] et l'[[Alliance des conservateurs et réformistes européens]]. Plusieurs partis d'Europe occidentale ou du nord sont particulièrement représentatifs de cette mouvance politique :
* {{Italie}} : [[Forza Italia (parti politique)|Forza Italia]], parti italien dirigé par l'ancien président du Conseil [[Silvio Berlusconi]]. Il compte aussi une frange démocrate chrétienne et est actuellement dans l'opposition. Semblablement à l'UMP, même s'il se réclame de ces valeurs, sa politique économique lors de la pratique du pouvoir s'éloigne du libéral-conservatisme.
* [[Les Républicains]], parti français dont est issu l'ancien président de la République [[Nicolas Sarkozy]]. Ce parti se réclame, entre autres, des valeurs du libéral-conservatisme. Il compte aussi une frange [[gaullisme|gaulliste]] et [[Conservatisme|conservatrice]] ainsi qu'une minorité [[Démocratie chrétienne|démocrate chrétien]]ne. Il fut au pouvoir de 2002 à 2012 et est dans l'opposition depuis 2012.
* {{Royaume-Uni}} : [[Parti conservateur (Royaume-Uni)|Parti conservateur]], au pouvoir depuis 2010 et dirigé par le premier ministre [[Rishi Sunak]].
* Le [[Parti libéral démocrate (France)]] (PLD) est l'un des seuls partis à réclamer l'héritage libéral français.
* {{États-Unis}} : [[Parti républicain (États-Unis)|Parti Républicain]], bien que celui-ci penche plus à droite politiquement parlant depuis l'élection de [[Donald Trump]] au mandat présidentiel.
* [[Union des démocrates et indépendants]], fondée par Jean-Louis Borloo, dans une moindre mesure, se réclame de ce courant.
* {{Espagne}} : [[Parti populaire (Espagne)|Parti populaire]] (PP) , qui compte aussi en son sein des démocrates chrétiens.
* Le [[Centre national des indépendants et paysans]] (CNIP), l'un des plus vieux partis politiques français, aujourd'hui marginal, s'inscrivait aussi dans cette tendance, jusqu'en 2010.
* {{Maroc}} : [[Mouvement populaire (Maroc)|Mouvement populaire]] (MP), [[Libéralisme|libéral]] sur les questions économiques et [[Conservatisme|conservateur]] sur les questions de mœurs ; il fait partie de l'[[Internationale libérale]].
* [[Forza Italia (2013)|Forza Italia]] (FI), parti italien dirigé par l'ancien président du Conseil [[Silvio Berlusconi]]. Il compte aussi une frange démocrate chrétienne et est actuellement dans l'opposition. Semblablement à l'UMP, même s'il se réclame de ces valeurs, sa politique économique lors de la pratique du pouvoir s'éloigne du libéral-conservatisme.
* {{Suède}} : Les [[Parti modéré de rassemblement|Modérés]] (M) de [[Fredrik Reinfeldt]], ancien Premier ministre de la Suède.
* Le [[Parti conservateur (Royaume-Uni)|Parti conservateur]] (Tories) britannique, au pouvoir depuis 2010 et dirigé par le premier ministre [[Boris Johnson]].
* {{Danemark}} : [[Venstre (Danemark)|Parti libéral]] (V) danois, dirigé depuis 2019 par [[Jakob Ellemann-Jensen]].
* Le [[Parti populaire (Espagne)|Parti populaire]] (PP) espagnol, qui compte aussi en son sein des démocrates chrétiens, actuellement à l'opposition et dirigé par [[Pablo Casado]], proche aux tendances libérales-conservatrices.
* {{Finlande}} : [[Parti de la coalition nationale]], membre minoritaire de la coalition actuellement au pouvoir en Finlande.
* Les [[Modérés (Suède)|Modérés]] (M) de [[Fredrik Reinfeldt]], ancien Premier ministre de la Suède.
* Le [[Venstre (Danemark)|Parti libéral]] (V) danois, dirigé depuis 2019 par [[Jakob Ellemann-Jensen]].
* {{Portugal}} : [[Parti social-démocrate (Portugal)|Parti social-démocrate]] (PSD) portugais, parti de l'ancien Premier ministre [[Pedro Passos Coelho]].
* {{Grèce}} : [[Nouvelle Démocratie (Grèce)|Nouvelle Démocratie]] (ΝΔ), parti de l'ancien premier ministre grec [[Antónis Samarás]].
* Le [[Parti de la coalition nationale]], membre minoritaire de la coalition actuellement au pouvoir en Finlande.
* {{Irlande}} : [[Fine Gael]], parti politique [[Irlande (pays)|irlandais]] dirigé par [[Leo Varadkar]].
* Le [[Parti social-démocrate (Portugal)|Parti social-démocrate]] (PSD) portugais, parti de l'ancien Premier ministre [[Pedro Passos Coelho]].
* {{Belgique}} : [[Mouvement réformateur (Belgique)|Mouvement réformateur]] (MR), dirigé par [[Georges-Louis Bouchez]].
* [[Nouvelle Démocratie (Grèce)|Nouvelle Démocratie]] (ΝΔ), parti de l'ancien premier ministre grec [[Antónis Samarás]].
* {{Autriche}} : [[Parti populaire autrichien]] (ÖVP), membre minoritaire de la coalition actuellement au pouvoir en [[Autriche]]. Il compte une importante frange démocrate chrétienne.
* [[Fine Gael]], parti politique [[Irlande (pays)|irlandais]] dirigé par [[Leo Varadkar]].
* {{Islande}} : [[Parti de l'indépendance (Islande)|Parti de l'indépendance]] (SJ), actuellement au gouvernement.
* Le [[Parti populaire autrichien]] (ÖVP), membre minoritaire de la coalition actuellement au pouvoir en [[Autriche]]. Il compte une importante frange démocrate chrétienne.
* Le [[Parti de l'indépendance (Islande)|Parti de l'indépendance]] (SJ) [[Islande|islandais]], actuellement au gouvernement.


=== Pouvoirs privés ===
=== Pouvoirs privés ===
* L'[[Institut Thomas-More]]
* L'[[Institut Thomas-More]]
* [[Institut de formation politique]]<ref>{{Lien web |titre=A l'école française des "libéraux-conservateurs" |url=https://www.lemonde.fr/politique/article/2013/07/26/a-l-ecole-francaise-des-liberaux-conservateurs_3452554_823448.html |site=Le Monde |date=2013-07-26 |consulté le=2020-01-05}}</ref>.
* [[Institut de formation politique]]<ref>{{Lien web |titre=A l'école française des "libéraux-conservateurs" |url=https://www.lemonde.fr/politique/article/2013/07/26/a-l-ecole-francaise-des-liberaux-conservateurs_3452554_823448.html |site=Le Monde |date=2013-07-26 |consulté le=2020-01-05}}</ref>
* [[Institut des libertés|Institut des Libertés]].


== Notes et références ==
== Notes et références ==
{{Références}}
{{Références}}


== Articles connexes ==
== Voir aussi ==
=== Articles connexes ===
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* [[Aristote]]
* [[Aristote]]
* [[Conservatisme]]
* [[Conservatisme]]
*[[Carl Schmitt]]
* [[Carl Schmitt]]
* [[Droit naturel]]
* [[Droit naturel]]
* [[Droit positif]]
* [[Droit positif]]
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* [[Leo Strauss]]
* [[Leo Strauss]]
* [[Libéralisme économique]]
* [[Libéralisme économique]]
*[[National-libéralisme|National-liberalisme]]
* [[National-libéralisme]]
* [[Libéralisme]]
* [[Libéralisme]]
*[[Néo-conservatisme|Neoconservatisme]]
* [[Néo-conservatisme]]
*
* [[Positivisme]]
* [[Positivisme]]
* [[Positivisme juridique]]
* [[Positivisme juridique]]
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* [[Querelle des Anciens et des Modernes]]
* [[Querelle des Anciens et des Modernes]]
* [[Relativisme]]
* [[Relativisme]]
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Dernière version du 20 avril 2024 à 19:49

Edmund Burke : père du libéral-conservatisme.

Le libéral-conservatisme est une idéologie politique, économique et sociale qui combine et défend des préoccupations libérales et conservatrices, en particulier pour les traditions établies, le respect pour l'autorité, l'ordre public, la sécurité, l'identité nationale, l'héritage religieux, la famille. Le penseur emblématique de ce courant juridique, philosophique et politique est Edmund Burke.

Il est possible également d'ajouter François Guizot, Frédéric Le Play, Wilhelm Röpke, Friedrich von Wieser et Joseph Schumpeter, comme figures de proue du libéral-conservatisme. Le libéral-conservatisme fait référence à une droite acceptant le changement, mais s'opposant aux idées du libéralisme classique. En effet, les libéraux-conservateurs défendent les libertés civiles, individuelles et religieuses comme les libéraux classiques, mais refusent, contrairement à ces derniers, de confondre l'État avec la société civile.

Les libertés pour les conservateurs sont acquises au sein d'une communauté grâce à la coutume et à une histoire commune ; elles ne seraient pas innées et attachées à l'individu, contrairement à ce que pensent les libéraux classiques. Les libéraux-conservateurs rejettent donc le pacifisme, l'individualisme, l'universalisme des Lumières, les droits de l'homme, le cosmopolitisme et le contractualisme.[réf. nécessaire]

Le libéral-conservatisme représente l'idéologie dominante des partis européens de droite comme l'Union chrétienne-démocrate d'Allemagne (CDU), le Parti conservateur au Royaume-Uni, Forza Italia en Italie ou encore le Parti populaire (PP) en Espagne. Ces derniers sont regroupés au sein du Parti populaire européen. Le libéral-conservatisme domine également au sein de grands partis de droite en dehors de l'Union européenne. C'est le cas par exemple du Parti républicain aux États-Unis ou encore du Parti conservateur du Canada[réf. nécessaire].

Présentation générale[modifier | modifier le code]

Les libéraux-conservateurs sont pour la propriété privée et une économie de marché modérée. Ces conservateurs rejettent résolument les idées modernes, à savoir la défense de droits individuels, de l'égalité des droits, du contrat social et d'une liberté négative. Au libéralisme des modernes, potentiellement despotique[1], relativiste, conventionnaliste et utilitariste, ils opposent un libéralisme ancien, républicain[2]. Ce faisant, ils s'imposent aux idées du libéralisme classique. Ainsi, les libéraux conservateurs se référent à Alexis de Tocqueville[3]. Pour ce dernier, l'individualisme doit être vu comme la mise en place de la "petite société". Il s'agit de la défense de la "famille" dans le sens que les anciens Grecs et Romains donnent à ce terme. Les parents et les amis constituent cette petite société créée à la mesure de l'individu. Aussi, les libéraux conservateurs sont considérés comme appartenant à une famille ancienne du libéralisme[4].

Le conservatisme libéral : défense du droit naturel classique[modifier | modifier le code]

Ce qui oppose les libéraux-conservateurs aux libéraux classiques, c'est un désaccord sur ce que doit être le droit naturel[5],[6]. Pour les premiers, le droit ne doit en aucun cas être confondu avec la loi, même s'il doit être découvert par la raison, mais consiste à dire ce qui est juste ; c'est le droit des classique[7]. Cela suppose un travail de réflexion de la part des juristes, des philosophes et politologues sur la nature de la vérité, du souverain bien, de la bonne société. Le droit n'est pas connu de prime abord, aussi il doit être recherché et adapté selon les situations. Les divergences entre classiques et modernes se situent sur le plan juridique.

Les conservateurs reprochent aux modernes d'avoir osé penser le droit comme émanant de l'individu. Ils accusent également les libéraux classiques, les premiers modernes, d'avoir ouvert la porte au positivisme juridique en affirmant que le droit se trouve dans des lois rationnelles[8] et à l'utilitarisme en pensant la société à partir des passions individuelles. Le conservateur libéral rejette également le relativisme des valeurs et le progressisme épousés par le moderne. Contrairement au libéral classique et au jacobin, il préfèrera le droit romain aux Droits de l'Homme[9]. A contrario, le libéral classique défend une conception individualiste et égalitaire du droit naturel. La liberté négative, moderne, que le libéral défend a pu effectivement conduire au relativisme et au positivisme, car celui-ci sépare les faits des valeurs, opposant la raison à la tradition[10].

Concordances, convergences et oppositions des diverses doctrines et systèmes politiques[modifier | modifier le code]

Le conservatisme apparaît comme une alternative au libéralisme moderne[11]. C'est toute son ambiguïté : comme les hommes ont besoin à la fois d’enracinement et d'émancipation, il peut vouloir accompagner plus largement les bienfaits du libéralisme, le rendre plus protecteur à l'égard de l'émancipation sans prudence ou encore le considérer comme vicié, donc vouloir le renverser. Sauf dans ce dernier cas, le conservatisme est donc prêt à composer avec le libéralisme. De même, il ne suffit pas qu'une société soit « ouverte », économiquement parlant, pour qu'y règne la liberté. Celle-ci suppose, outre la liberté de choisir des biens de consommation, celle de peser sur les destinées collectives. Contrairement aux libéraux, les conservateurs libéraux ne croient pas que l'égalité et la liberté soient compatibles[12].

Le libéral-conservatisme s'oppose également au centralisme. La décentralisation, conjuguée avec le fédéralisme et le principe de subsidiarité, permet d'initier les citoyens à la vie politique et éviter le despotisme de l’État[13],[14]. Ainsi, il s'oppose logiquement aux régimes totalitaires, le communisme par exemple, c'est-à-dire lorsqu’un État contrôle tous les pouvoirs, notamment économique, religieux, médiatique, etc. Le libéral-conservateur rejoint le libéral classique sur le rejet de la tyrannie et du droit positif. Il soutient la propriété privée et une liberté de commerce modérée, mais se méfie de la démocratie représentative et du progressisme défendus par des penseurs modernes comme Benjamin Constant[15].

Usage du terme[modifier | modifier le code]

Dans de nombreux pays, les partis d'idéologie conservatrice ont, avec le temps, adopté des arguments modernes. Le terme « conservateur » plutôt que « libéral-conservateur » est souvent employé pour qualifier les personnes concernées. Dans les pays où les idées libérales sont considérées comme relevant de la tradition, comme les États-Unis, le conservatisme est aussi une notion englobant la défense du conservatisme classique et du libéralisme classique. Dans d'autres pays où les mouvements libéraux-conservateurs sont devenus des courants politiques dominants, les termes « libéral » et « conservateur » peuvent devenir synonymes (comme en Australie, en Italie et en Espagne). En revanche, aux États-Unis et au Royaume-Uni, ces deux termes sont antinomiques, radicalement opposés. Des idées libérales et modernes se sont imposées dans certaines franges conservatrices des États-Unis (le paléolibertarianisme, le paléoconservatisme et le Tea Party sont des doctrines conservatrices défendant une posture individualiste). Il s'agit d'une particularité américaine consistant à combiner l'individualisme méthodologique du libéralisme classique à une certaine forme de conservatisme (les écrits de Russell Kirk renseignent sur cette tendance). Inversement, le néoconservatisme, dominant au parti républicain, souhaite redécouvrir le droit naturel des classiques[16]. Les libéraux-conservateurs français rejoignent les néoconservateurs américains sur ce point et refusent d'accorder du crédit au libéralisme classique[17].

Un deuxième sens du terme s'est développé en Europe, combinant des visions conservatrices « modernes » (moins traditionalistes) avec une certaine forme de social-libéralisme. Il s'est généralement développé en opposition aux conceptions plus collectivistes du socialisme. Souvent, il s'agit de souligner la nécessité d'un maintien de visions conservatrices du libre marché et de la croyance en la responsabilité individuelle, tout en adoptant des positionnements sociaux-libéraux quant à la défense des droits civiques, de la protection de l'environnement et du soutien à un petit État-providence. Cette philosophie est celle de l'actuel Fredrik Reinfeldt (Premier ministre suédois de 2006 à 2014), ainsi que de David Cameron (le Premier ministre britannique de 2010 à 2016) et de Theresa May, qui lui a succédé dans la fonction. David Cameron parle de « conservatisme moderne »[18] pour expliquer la doctrine actuelle des tories. En Europe continentale, ce terme peut être traduit de l'anglais par « conservatisme social ».

Fondements du libéralisme-conservatisme[modifier | modifier le code]

Tradition et scepticisme envers le rationalisme moderne[modifier | modifier le code]

Comme la mécanique sociale échappe souvent à la compréhension et au contrôle de l’homme, l’idée que l’on puisse instaurer un système parfait en mesure de gérer le social est à éviter, parce qu’elle relève tout simplement de l’utopie. Une telle pensée revendique le concret, le réel, le continu, contre la fiction abstraite des constructions ex nihilo. On parlera plutôt de scepticisme envers la raison quand celle-ci prétend percer tous les mystères du monde. Les conservateurs préfèrent plutôt le rationalisme des penseurs classiques[19]. C’est pourquoi il est aussi préférable de se conformer à ce qui existe, c’est-à-dire à l’ordre et aux traditions engendrés par le cours de l’histoire et le travail des ancêtres. Ceci a amené naturellement Michael Oakeshott à se définir comme conservateur de la manière suivante : « être conservateur, par conséquent, est préférer le familier à l’inconnu, préférer ce qui a déjà été utilisé à ce qui ne l’a jamais été, préférer le fait au mystère, le vrai au possible, le limité au flou, ce qui est proche plus que ce qui est distant, le suffisant à l’excédent, le convenable au parfait (…) ». En effet, comme l’écrit Philippe Bénéton, la tradition constitue « cet héritage […] essentiel à l’homme parce que sa raison est faible et bornée »[20]. Irremplaçable fruit de la sagesse des générations passées, la tradition est le révélateur du caractère de chaque peuple. De plus, les libéraux-conservateurs considèrent qu'une société - le vivre ensemble - ne peut exister qu’à travers des ordres de moralité, c'est-à-dire où l’on distingue ce qui est dû, ce qui est permis et ce qui est interdit (retour au droit naturel ancien).

En somme, si la révolution de 1793 appelée aussi Terreur - à distinguer de la révolution de 1789[21] - se trouve tant vilipendée par les libéraux-conservateurs, c’est qu’elle représente une brisure irréparable dans ce qui avait mis des siècles à être élaboré.

Ce conservatisme, pris au sens de conservation, a - toujours - pour tâche d’entourer et de protéger quelque chose, notamment en ce qui concerne l’éducation selon les propos de Hannah Arendt. Bien entendu, le libéralisme-conservatisme accepte le monde tel qu’il est - et ne définit pas sa lutte que pour préserver - accepte donc l’intervention d’êtres humains décidés à modifier le cours des choses et à créer du neuf.

Décentralisation, fédéralisme, et principe de subsidiarité[modifier | modifier le code]

Pour éviter le despotisme, le libéral-conservatisme insiste sur l’importance et l'existence d’autres contre-pouvoirs - extérieurs ou intérieurs à l'État - face à l’État, en particulier le pouvoir associatif ou pouvoirs privés, qui soient capables de limiter sa puissance, et aussi qu’ils ne soient pas la manifestation d’une démission du pouvoir politique face à des intérêts économiques.

Critique de l'État providence[modifier | modifier le code]

Dans la lignée de Raymond Aron, ce courant libéral s'accommode parfois d'un État providence. Mais avec l'État providence, le lien familial se morcèle car les individus prennent l’habitude de ne dépendre que de l'État.

Idéal républicain et patriotisme[modifier | modifier le code]

Partis politiques[modifier | modifier le code]

Au Parlement européen, les libéraux-conservateurs sont unis au sein du Parti populaire européen, mais on en compte aussi quelques-uns dans l'Alliance des démocrates et des libéraux pour l'Europe et l'Alliance des conservateurs et réformistes européens. Plusieurs partis d'Europe occidentale ou du nord sont particulièrement représentatifs de cette mouvance politique :

Pouvoirs privés[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Friedrich Hayek, Vrai et faux individualisme
  2. « Le libéralisme antique et moderne de Leo Strauss », sur Vu d'ailleurs, (consulté le )
  3. Lamberti, Jean-Claude., La notion d'individualisme chez Tocqueville, Presses universitaires de France, (OCLC 220451380)
  4. Adrien Louis, « Voir et comprendre la politique moderne », Archives de Philosophie, vol. 79, no 3,‎ , p. 485 (ISSN 0003-9632 et 1769-681X, DOI 10.3917/aphi.793.0485, lire en ligne)
  5. « Quatre conceptions du droit naturel (1) », sur Contrepoints,
  6. « Quatre conceptions du droit naturel (2) », sur Contrepoints,
  7. « La justice selon Aristote », sur 1000 idées de culture générale,
  8. « Du Droit naturel au positivisme juridique », sur Contrepoints,
  9. Vincent Schnebel, « Les droits de l’homme, une œuvre critiquée par Edmund Burke », sur Les Chevaliers des Grands Arrêts,
  10. "Nous pouvons nier la vérité, si nous avons en vue d'affirmer par là notre liberté", Descartes, Lettre au Père Mesland, 1645
  11. Thibaut Gress, « Entretien avec Philippe Raynaud : autour des Trois Révolutions de la liberté », sur actu-philosophia.com, .
  12. « Le conservatisme, contrairement au libéralisme, considère qu’il y a incompatibilité absolue entre la liberté et l’égalité », sur Atlantico.fr
  13. Voir essentiellement les écrits de référence. Pour le régime fédéral, il faut évoquer ici par Hamilton. Pour la décentralisation : De la démocratie en Amérique, vol. II, IIe partie, chap. IV, Éd. Garnier-Flammarion, 1981, p. 133 (1re éd., 1840)
  14. Chantal Delsol, Principe de subsidiarité, PUF
  15. De la liberté des Anciens comparée à celle des Modernes
  16. (en) Norton, Anne., Leo Strauss and the politics of American empire, Yale University Press, (ISBN 0-300-10436-7, 978-0-300-10436-3 et 0-300-10973-3, OCLC 55146163)
  17. Charles Beigbeder, « Peut-on être libéral et conservateur? La réponse de Charles Beigbeder à Gaspard Koenig », sur Le Figaro.fr,
  18. J.D, « David Cameron, conservateur mais moderne », sur Le Figaro.fr,
  19. Charles Boyer, « Nihilisme versus droit naturel : lecture de Léo Strauss », sur cairn.info, Le Philosophoire,
  20. Philippe Bénéton, Le conservatisme, Paris, Presses universitaires de France, , p. 106.
  21. Philippe Nemo, Les Deux Républiques françaises, PUF, coll. « Hors collection », , 307 p.
  22. « A l'école française des "libéraux-conservateurs" », sur Le Monde, (consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Il existe une catégorie consacrée à ce sujet : Libéral-conservatisme.