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| nom = Glitch
| origines stylistiques = [[Intelligent dance music|IDM]]<br>[[Electro]]<br>[[Chiptune]]<br>[[Synthpop]]<br>[[Breakbeat]]<br>[[Musique industrielle]]
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| instruments = [[Matériel (informatique)|matériel informatique]] (technique de [[circuit bending]]), [[logiciel]] ([[Ableton Live]]), audiomulch, AudioSculpt<ref name="Cascone2000"/>, [[ChucK]], CLAM/SMS<ref name="Cascone2000"/>, [[Jeskola Buzz]], [[Max/MSP]]<ref name="Cascone2000"/>, [[Pure Data]]<ref name="Cascone2000"/>, [[Reaktor]], [[Reason (logiciel)|Reason]], [[Super Collider]]
| popularité = Faible, principalement en [[Allemagne]], au [[Japon]] et dans les pays de l'ex-[[URSS]]
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Le '''glitch''' est généralement considéré comme un « [[Genre musical|genre]] » de musique électronique expérimentale qui émerge au milieu des [[années 1990]]. Stricto sensu, le mot ''glitch'' désigne une brusque augmentation de tension provenant du dysfonctionnement ''(failure)'' d'un dispositif électrique ou électronique. Les sons produits par ces phénomènes sont utilisés comme matériau sonore de compositions musicales. En ce sens, le ''glitch'' est plus une esthétique ''(aesthetics of failure<ref name="Cascone2000">{{en}} [http://subsol.c3.hu/subsol_2/contributors3/casconetext.html The Aesthetics Of Failure: 'Post-Digital' Tendencies in Contemporary Computer Music], par Kim Cascone, ''Computer Music Journal'' 24:4, Winter 2000 (MIT Press)</ref>)'' qu'un genre musical à proprement parler.
Le '''glitch''' est un [[genre musical|genre]] de [[musique électronique]] [[musique expérimentale|expérimentale]] ayant émergé au milieu des [[années 1990]]. Stricto sensu, le mot {{citation|glitch}} désigne une brusque augmentation de tension provenant du dysfonctionnement ''(failure)'' d'un dispositif électrique ou électronique. Les sons produits par ces phénomènes sont utilisés comme matériau sonore de compositions musicales. En ce sens, le glitch est plus une esthétique<ref name="Cascone2000">{{lien web|lang=en|url=http://subsol.c3.hu/subsol_2/contributors3/casconetext.html|titre=The Aesthetics Of Failure: 'Post-Digital' Tendencies in Contemporary Computer Music|auteur=Kim Cascone|périodique=Computer Music Journal|année=2000|éditeur=MIT Press|consulté le=25 mars 2012}}. 24:4.</ref> qu'un genre musical à proprement parler.


Par extension, l'esthétique ''glitch'' est caractérisée par un usage délibéré de « défauts » sonores, qu'ils résultent du dysfonctionnement de dispositifs électroniques, de l'utilisation détournée des technologies numériques de production ou de traitement sonore, du collage d'échantillons sonores tronqués, du bruit de CD ou de disques vinyles qui sautent{{etc.}}<ref>{{Ouvrage|langue=|prénom1=|nom1=|lien auteur1=|auteurs= Cox, Christoph and Warner, Daniel, eds. |titre= Audio Culture: Readings in Modern Music |sous-titre=|lien titre=|numéro d'édition=|lien éditeur=|éditeur= Continuum Books |lieu=|année= 2004 |tome=|volume=|pages totales=|isbn=|passage= 393 |lire en ligne=|consulté le=}}</ref>.
Par extension, l'esthétique glitch se caractérise par un usage délibéré de {{citation|défauts}} sonores, qu'ils résultent notamment du dysfonctionnement de dispositifs électroniques, de l'utilisation détournée des technologies numériques de production ou de traitement sonore, du collage d'échantillons sonores tronqués, du bruit de CD ou de disques vinyles qui sautent<ref>{{Ouvrage|lang=en|auteur1=Cox, Christoph|auteur2=Warner, Daniel, eds.|titre=Audio Culture: Readings in Modern Music|éditeur=Continuum Books|année= 2004|passage=393|lire en ligne=|consulté le=25 mars 2012}}.</ref>. L'esthétique glitch est plus ou moins présente au sein des compositions qui se réclament du genre. Certaines, que l'on pourrait qualifier de {{citation|radicales}}, n'utilisent que ces défauts sonores. Mais de nombreux artistes exploitent ces matériaux au sein d'œuvres plus traditionnelles, synthétiques ou hybrides (acoustique/synthétique). Parmi les artistes populaires qui utilisent intensément ces matériaux, on trouve [[Alva Noto]] ([[Carsten Nicolai]]), [[Pole (artiste)|Pole]] ([[Stefan Betke]]), [[Richard Devine]] et [[Ryoji Ikeda]].

L'esthétique ''glitch'' est plus ou moins présente au sein des compositions qui se réclament du genre. Certaines, que l'on pourrait qualifier de « radicales », n'utilisent que ces défauts sonores. Mais de nombreux artistes exploitent aujourd'hui ces matériaux au sein d'œuvres plus traditionnelles, synthétiques ou hybrides (acoustique/synthétique).

Parmi les artistes populaires qui utilisent intensément ces matériaux, on trouve [[Alva Noto]] ([[Carsten Nicolai]]), [[Pole (artiste)|Pole]] ([[Stefan Betke]]), [[Richard Devine]] et [[Ryoji Ikeda]].

== Approche théorique ==
Dans un manifeste écrit en 1995, [[Achim Szepanski]] (fondateur du label [[Mille Plateaux]]), insiste sur la nécessité pour les créateurs de pousser les frontières des logiciels de production audionumériques, notamment en refusant les réglages d'usine, les sons prêts-à-l'emploi. « [...] les standards PEUVENT ET DOIVENT être transformés. [...] Les machines sonores qui sont plus que des ordinateurs produisent des effets musicaux quand elles sont pilotées par des proto subjectivités. [...] Les clics, glitches et les soi-disant erreurs deviennent des sons. Les événements sonores deviennent audibles par arrangement. Le couper-copier-coller-funk des sons considérés comme les moins pertinents, les clics, émergent ; le mouvement de 0 et de 1 devenu audible. Les clics sont une valeur, la monnaie, loi, communication et son du médial lui-même. Ils sont l'introduction dans le minimalisme du XXe siècle, un outil pour le nouveau millénaire<ref>{{en}} [http://edition-mille-plateaux.de/a-mille-plateaux-manifesto/ A mille plateaux manifesto], d'Achim Szepanski (1995). Une traduction française existe mais comporte de nombreuses erreurs de traduction.</ref>. »

Dans un article du ''[[Computer Music Journal]]'' publié en 2000, le compositeur et écrivain {{lien|Kim Cascone}} classe le ''glitch'' comme un sous-genre de musique électronique et utilise le terme de « post-numérique » ''(post-digital)'' pour décrire l'esthétique ''glitch''<ref name="MIT">{{en}} "The glitch genre arrived on the back of the electronica movement, an umbrella term for alternative, largely dance-based electronic music (including house, techno, electro, drum'n'bass, ambient) that has come into vogue in the past five years. Most of the work in this area is released on labels peripherally associated with the dance music market, and is therefore removed from the contexts of academic consideration and acceptability that it might otherwise earn. Still, in spite of this odd pairing of fashion and art music, the composers of glitch often draw their inspiration from the masters of 20th century music who they feel best describe its lineage." The Aesthetics Of Failure: 'Post-Digital'Tendencies in Contemporary Computer Music, Kim Cascone, [http://subsol.c3.hu/subsol_2/contributors3/casconetext.html ''Computer Music Journal'' 24:4 Winter 2000 (MIT Press)]</ref>. Il ne faut pas comprendre ici qu'il s'agit d'une musique qui vient « après » le numérique (avec une notion de rupture) mais bien d'une musique qui en découle<ref name="PhilThomson2004"/>. On pourrait même dire que le ''glitch'' est un « métagenre » en ce qu'il s'appuie sur des problématiques inhérentes aux technologies utilisées pour produire ce son numériquement : les dysfonctionnements (''{{lang|en|failures}}'').

Dans le même article, Kim Cascone considère que « l'esthétique post-numérique fut développée à la suite d'expériences immersives [des artistes], dues au fait de travailler dans un environnement imprégné de technologie numérique : la soufflerie des systèmes de ventilation des ordinateurs, les imprimantes laser extrayant des documents, la “sonification” des interfaces logicielles et les bruits étouffés des disques durs. Mais plus spécifiquement, ce sont des dysfonctionnements de la technologie numérique que ce nouveau travail a émergé [...]. ». Et d'ajouter que « la plupart des outils audio[numériques] peuvent zoomer sur les erreurs, permettant aux compositeurs d'en faire le cœur de leur travail. »


== Histoire ==
== Histoire ==
=== Origines ===
=== La genèse de l'esthétique ''glitch'' ===
Les origines de l'esthétique glitch remontent au début du {{s-|XX|e}}, avec le manifeste [[futurisme|futuriste]] de [[Luigi Russolo]], ''[[L'Art des bruits]]'' (publié en 1913), à la base de la [[musique bruitiste]]. En 1922, dans son essai ''{{lang|en|Production-Reproduction}}'', le peintre [[László Moholy-Nagy]] suggère de transformer le [[gramophone]] en instrument de production de son en altérant manuellement la surface des disques plats<ref name="samartzis">{{lien web|lang=en|url=http://arn.cci.ecu.edu.au/data/tmp/10samartzissoundscripts.pdf|format=pdf|titre=Surface Noise|auteur=Philip Samartzis|périodique=Sound Scripts: Proceedings of the Inaugural Totally Huge New Music Festival Conference|année=2005|page=62|consulté le=25 mars 2012}}.</ref>. En 1965, l'artiste tchèque Milan Knížák utilise, lors de performances sonores, des disques brisés ou altérés par des trous, des rayures, etc.<ref>{{lien web|lang=en|url=https://www.qagoma.qld.gov.au/__data/assets/pdf_file/0007/6892/POPCatalogue.pdf|format=pdf|titre=Pop: the continuing influence of popular culture on contemporary art|année=2003|éditeur=Queensland Art Gallery|citation=In 1965 I started to destroy records: scratch them, punch holes in them, break them. By playing them over — which destroyed the needle and often there cord players too — an entirely new music was created. Unexpected, nerve-racking, aggressive|consulté le=28 février 2015}}.</ref>. En 1979, le compositeur et plasticien américain [[Christian Marclay]], en mal de batteur, commence à utiliser des disques vinyles rayés pour lui servir de base rythmique<ref>{{lien web|lang=en|url=http://www.furious.com/perfect/christianmarclay.html|titre=Christian Marclay, Interview by Jason Gross (March 1998)|site=Perfect Sound Forever|consulté le=25 mars 2012}}.</ref>.
Les origines de l'esthétique ''glitch'' remontent au début du {{s-|XX|e}}, avec le manifeste [[futurisme|futuriste]] de [[Luigi Russolo]], [[L'Art des bruits|''L'Art des bruits'']] (publié en 1913), à la base de la [[musique bruitiste]].


En 1985, le compositeur japonais Yasunao Tone compose un collage sonore à partir du son de CD {{citation|préparés}} (petits bouts de Scotch collés à la surface du disque) pour accompagner la suite ''{{lang|en|Techno Eden}}'' de la chorégraphe Kay Nishikawa<ref>{{lien web|lang=en|url=http://rwm.macba.cat/uploads/qa/QA_01/QA_01.pdf|format=pdf|titre=Blackout, Representation, transformation and de-control in the sound work of Yasunao Tone|auteur=Roc Jiménez de Cisneros|site=Quaderns d'àudio #01|date=29 mars 2009|consulté le=25 mars 2012}}.</ref>. Volontairement tournée vers des performances live, sa technique ne sera disponible à l'écoute qu'en 1995 sur un album intitulé ''{{lang|en|Solo for Wounded CD}}''<ref name="StuartCaleb2003">{{lien web|lang=en|url=http://www.deepdyve.com/lp/mit-press/damaged-sound-glitching-and-skipping-compact-discs-in-the-audio-of-1ut6vcI0B8|titre=Damaged Sound: Glitching and Skipping Compact Discs in the Audio of Yasunao Tone|auteur=Stuart Caleb|périodique=Leonardo Music Journal|description=13|année=2003|page=47-52|consulté le=25 mars 2012}}.</ref>. En 1988, le compositeur Nicolas Collins commence de son côté à travailler sur des lecteurs de CD {{citation|préparés}} (suppression notamment des circuits de correction d'erreur). Les sons obtenus se rapprochent de ceux obtenus par Yasunao Tone<ref name="StuartCaleb2003"/>. En 1992, l'album ''{{lang|en|It Was a Dark and Stormy Night}}'' de Nicolas Collins comprend une composition de quatuor à cordes jouant aux côtés de sons de CD qui sautent<ref>{{lien web|lang=en|url=http://media.hyperreal.org/zines/est/intervs/collins.html|titre=Interview with Nicolas Collins|auteur=Brian Duguid|consulté le=25 mars 2012}}.</ref>.
En 1922, dans son essai ''Production-Reproduction'', le peintre [[László Moholy-Nagy]] suggère de transformer le [[gramophone]] en instrument de production de son en altérant manuellement la surface des disques plats<ref name="samartzis">{{en}} [http://arn.cci.ecu.edu.au/data/tmp/10samartzissoundscripts.pdf Surface Noise], par Philip Samartzis, in ''Sound Scripts: Proceedings of the Inaugural Totally Huge New Music Festival Conference 2005'', p. 62</ref>.


=== Affirmation du mouvement ===
En 1979, le compositeur et plasticien américain [[Christian Marclay]], en mal de batteur, commence à utiliser des disques vinyles rayés pour lui servir de base rythmique<ref>{{en}} [http://www.furious.com/perfect/christianmarclay.html Christian Marclay], interviewé par Jason Gross en mars 1998 pour ''Perfect Sound Forever''</ref>.
En 1993, l'album ''{{lang|de|Wohnton}}'' du groupe allemand [[Oval (groupe)|Oval]]<ref name=glitch-allmusic>{{lien web|lang=en|url=http://www.allmusic.com/subgenre/glitch-ma0000011854|titre=Glitch|site=[[AllMusic]]|consulté le=20 février 2015}}.</ref>, contribue à la construction esthétique du genre (malgré un chant farouchement pop) par son [[Échantillon (musique)|échantillonnage]] des sauts de CD (très présents sur le titre ''{{lang|de|AllesinGedanken}}''). Les albums suivants - ''{{lang|de|Systemisch}}'' et ''{{lang|de|94diskont}}'' - respectivement sortis en 1994 et 1995 prennent un tour beaucoup plus minimal et instrumental. ''{{lang|de|Systemisch}}'' fut entièrement composé à partir d'extraits du CD ''{{lang|en|[[Selected Ambient Works Volume II]]}}'' d'[[Aphex Twin]], volontairement altéré par des dessins réalisés au stylo feutre<ref name=Putting-a-Glitch-in-the-Field>{{lien web|lang=en|format=pdf|auteur=Nick Prior|url=https://www.sfu.ca/cmns/courses/2011/488/1-Readings/Prior%20Putting%20a%20Glitch%20in%20the%20Field.pdf|titre=Putting a Glitch in the Field: Bourdieu, Actor Network Theory and Contemporary Music|éditeur=Sage Publications|date=2008|doi=10.1177/1749975508095614|consulté le=28 février 2015}}</ref>. À partir de 1995, l'éclatement des pratiques se fait sentir. Le label autrichien [[Mego (label)|Mego]] encourage à la fois l'usage des techniques d'échantillonnage glitch et de séquençage sonore mais aussi d'usages détournés des logiciels de production sonore, voire de développements spécifiques, sans parler des techniques de [[Databending]]. Des artistes comme [[Fennesz]], Florian Hecker ou [[Peter Rehberg|Pita]] font leurs premières armes<ref name="StuartCaleb2003"/>. À partir de 1996, le label allemand [[Raster-Noton]] créé par Carsten Nicolai ([[Alva Noto]]) et Olaf Bender (Byetone) propose des productions glitch à travers leurs propres œuvres et celles d'artistes comme [[Ryoji Ikeda]] ou Frank Bretschneider. Le premier album de Noto (ne signant pas encore sous son pseudonyme d'Alva Noto) - dénommé ''{{lang|en|Spin}}'' - commence à creuser le genre glitch. Il faut attendre néanmoins l'an 2000 pour que la compilation ''{{lang|en|Clicks_+_Cuts}}'' du label allemand [[Mille Plateaux (label)|Mille Plateaux]] fondé par [[Achim Szepanski]] impose le genre.


== Caractéristiques ==
En 1985, le compositeur japonais [[Yasunao Tone]] compose un collage sonore à partir du son de CD « préparés » (petits bouts de Scotch collés à la surface du disque) pour accompagner la suite ''Techno Eden'' de la chorégraphe Kay Nishikawa<ref>{{en}} [http://rwm.macba.cat/uploads/qa/QA_01/QA_01.pdf Blackout, Representation, transformation and de-control in the sound work of Yasunao Tone], par Roc Jiménez de Cisneros, in ''Quaderns d'àudio #01'' (29 mars 2009)</ref>. Volontairement tournée vers des performances ''live'', sa technique ne sera disponible à l'écoute qu'en 1995 sur un album titré ''Solo for Wounded CD''<ref name="StuartCaleb2003">{{en}} [http://www.deepdyve.com/lp/mit-press/damaged-sound-glitching-and-skipping-compact-discs-in-the-audio-of-1ut6vcI0B8 Damaged Sound: Glitching and Skipping Compact Discs in the Audio of Yasunao Tone], par Stuart Caleb, in ''Leonardo Music Journal,'' Vol. 13 (2003), pp. 47-52</ref>
Le matériau sonore utilisé est à lui seul constitutif du genre. Le glitch est souvent produit par des ordinateurs utilisant des logiciels de production numérique servant à raccorder des ''{{lang|en|cuts}}'' (petits [[Échantillon (musique)|échantillons]]) d'œuvres musicales déjà existantes. Ces ''{{lang|en|cuts}}'' sont ensuite intégrés à la musique pour former des ''{{lang|en|beats}}''. Ces ''{{lang|en|cuts}}'' remplacent alors généralement les instruments de percussion traditionnels. Les sons du glitch peuvent également être produits par des [[disque compact|CD]] qui sautent, disques vinyles rayés, techniques de ''{{lang|en|[[circuit bending]]}}''<ref name="HearingPureData">{{lien web|lang=en|url=http://creative.canberra.edu.au/mitchell/papers/HearingPureData.pdf|format=pdf|titre=Hearing Pure Data: Aesthetics and Ideals of Data-Sound|auteur=Mitchell Whitelaw|site=creative.canberra.edu.au|consulté le=25 mars 2012}}.</ref> et de [[Databending]]<ref name="HearingPureData"/> ou autres bruits distordus. C'est de l'utilisation de ces défauts sonores que le genre tire son nom. Les logiciels populaires pour créer du glitch incluent les ''{{lang|en|trackers}}'' [[Ableton Live]], AudioMulch, Bidule, [[ChucK]], [[FL Studio]], [[Max/MSP]], [[Pure Data]], [[Reaktor]], [[Reason (logiciel)|Reason]], Renoise, Super Collider, et Usine.


Contrairement à d'autres genres musicaux, le glitch ne se distingue pas par des cellules rythmiques particulières, ni même par une construction spécifique de ses compositions. Un nombre significatif se rapprochent néanmoins de la [[techno minimale]], le rendant ainsi plus « écoutable ». « [...] est-ce que cela doit être regrettable ou encensé ? Avec l'aide du {{lang|en|beat}}, l'organisateur du bruit affine le message. Le {{lang|en|beat}} peut mettre en évidence l'esthétique du bruit. Il peut rendre la ‘dureté’ agréable : ‘la pulsation équivaut à la vie, équivaut au plaisir’ »<ref>{{lien web|lang=en|url=http://m-h-z.net/wp-content/uploads/2014/04/Noise-on-the-Grid-Rhythmic-Pulse-in-Experimental-and-Electronic-Noise-Music.pdf|format=pdf|titre=Noise on the grid: rhythmic pulse in experimental and electronic noise music|auteur1=Mo H. Zareei|auteur2=Ajay Kapur|auteur3=Dale A. Carnegie|éditeur=International Computer Music Association|date=2013|consulté le=1 mars 2015}}.</ref>. Le glitch n'est pas non plus attaché à un style vestimentaire ou comportemental, un mode de pensée, un lieu ou une circonstance particulière de diffusion. Tout au plus est-il souvent associé à des projections vidéos minimalistes pilotées par les artistes eux-mêmes (voir notamment les spectacles d'[[Alva Noto]], Frank Bretschneider ou [[Ryoji Ikeda]]) ou grâce à l'intervention de [[VJ]].
En 1988, le compositeur [[Nicolas Collins]] commence de son côté à travailler sur des lecteurs de CD « préparés » (suppression notamment des circuits de correction d'erreur). Les sons obtenus se rapprochent de ceux obtenus par [[Yasunao Tone]]<ref name="StuartCaleb2003"/>.


Dans un manifeste écrit en 1995, [[Achim Szepanski]] (fondateur du label [[Mille Plateaux]]), insiste sur la nécessité pour les créateurs de pousser les frontières des logiciels de production audionumériques, notamment en refusant les réglages d'usine, les sons prêts-à-l'emploi. « [...] les standards PEUVENT ET DOIVENT être transformés. [...] Les machines sonores qui sont plus que des ordinateurs produisent des effets musicaux quand elles sont pilotées par des proto subjectivités. [...] Les ''clics'', ''glitches'' et les soi-disant erreurs deviennent des sons. Les événements sonores deviennent audibles par arrangement. Le couper-copier-coller-funk des sons considérés comme les moins pertinents, les clics, émergent ; le mouvement de 0 et de 1 devenu audible. Les clics sont une valeur, la monnaie, loi, communication et son du médial lui-même. Ils sont l'introduction dans le minimalisme du XXe siècle, un outil pour le nouveau millénaire<ref>{{lien web|lang=en|url=http://edition-mille-plateaux.de/a-mille-plateaux-manifesto/|titre=A mille plateaux manifesto|auteur=Achim Szepanski|année=1995|consulté le=25 mars 2012}}. Une traduction française existe mais comporte de nombreuses erreurs de traduction.</ref>. »
En 1992, l'album ''It Was A Dark and Stormy Night'' de [[Nicolas Collins]] comprend une composition de quatuor à cordes jouant aux côtés de sons de CD qui sautent<ref>{{en}} [http://media.hyperreal.org/zines/est/intervs/collins.html Interview with Nicolas Collins], par Brian Duguid</ref>.


Dans un article du ''{{lang|en|[[Computer Music Journal]]}}'' publié en 2000, le compositeur et écrivain {{lien|Kim Cascone}} classe le glitch comme un sous-genre de musique électronique et utilise le terme de {{citation|post-numérique}} (post-digital) pour décrire l'esthétique glitch<ref name="MIT">{{lien web|lang=en|url=http://subsol.c3.hu/subsol_2/contributors3/casconetext.html|titre=The Aesthetics Of Failure: 'Post-Digital' Tendencies in Contemporary Computer Music|auteur=Kim Cascone|périodique=Computer Music Journal|année=2000|éditeur=MIT Press|passage=The glitch genre arrived on the back of the electronica movement, an umbrella term for alternative, largely dance-based electronic music (including house, techno, electro, drum'n'bass, ambient) that has come into vogue in the past five years. Most of the work in this area is released on labels peripherally associated with the dance music market, and is therefore removed from the contexts of academic consideration and acceptability that it might otherwise earn. Still, in spite of this odd pairing of fashion and art music, the composers of glitch often draw their inspiration from the masters of 20th century music who they feel best describe its lineage.|consulté le=25 mars 2012}}.</ref>. Il ne faut pas comprendre ici qu'il s'agit d'une musique qui vient {{citation|après}} le numérique (avec une notion de rupture) mais bien d'une musique qui en découle<ref name="PhilThomson2004"/>. Il est même également probable que le glitch soit un {{citation|métagenre}} en ce qu'il s'appuie sur des problématiques inhérentes aux technologies utilisées pour produire ce son numériquement : les dysfonctionnements (''{{lang|en|failures}}''). Dans le même article, Kim Cascone considère que {{citation|l'esthétique post-numérique fut développée à la suite d'expériences immersives [des artistes], dues au fait de travailler dans un environnement imprégné de technologie numérique : la soufflerie des systèmes de ventilation des ordinateurs, les imprimantes laser extrayant des documents, la “sonification” des interfaces logicielles et les bruits étouffés des disques durs. Mais plus spécifiquement, ce sont des dysfonctionnements de la technologie numérique que ce nouveau travail a émergé [...].}} Et d'ajouter que {{citation|la plupart des outils audio[numériques] peuvent zoomer sur les erreurs, permettant aux compositeurs d'en faire le cœur de leur travail<ref name="MIT"/>.}}
=== L'affirmation du ''glitch'' comme mouvement ===
En 1993, l'album ''Wohnton'' du groupe [[Oval (groupe)|Oval]], a contribué à la construction esthétique du genre (malgré un chant farouchement pop) par son [[Échantillonnage (musique)|échantillonnage]] des sauts de CD (très présents sur le titre AllesinGedanken). Les albums suivants - ''Systemisch'' et ''94diskont'' - respectivement sortis en 1994 et 1995 prennent un tour beaucoup plus minimal et instrumental. .


== Artistes et labels ==
À partir de 1995, l'éclatement des pratiques se fait sentir. Le label autrichien [[Editions Mego|Mego]] encourage à la fois l'usage des techniques d'échantillonnage ''glitch'' et de séquençage sonore mais aussi d'usages détournés des logiciels de production sonore, voir de développements spécifiques, sans parler des techniques de ''[[data bending]]''. Des artistes comme [[Fennez]], [[Florian Hecker|Hecker]] ou [[Pita (Musicien)|Pita]] font leurs premières armes<ref name="StuartCaleb2003"/>.
Les artistes notables et représentatifs des [[années 1990]] du genre incluent : [[Alva Noto]], [[Aphex Twin]]<ref name=glitch-allmusic/>, [[Autechre]]<ref name=glitch-allmusic/>, Byetone (Olaf Bender), Frank Bretschneider, Nicolas Collins, Goem, [[Ryoji Ikeda]], [[Oval (groupe)|Oval]]<ref>{{lien web|lang=en|url=summit.sfu.ca/system/files/iritems1/7752/b37692604.pdf|format=pdf|titre=Tick-Tick-Tick-Tick-Tick: Oval, the glitch and the utopian politics of noise|auteur=James Brady Cranfield Rose|éditeur=Simon Fraser University|date=1999|consulté le=25 mars 2012}}.</ref>, [[Pan Sonic]] ([[Mika Vainio]] et Ilpo Väisänen ; notamment dans leur premier album ''{{lang|en|Vaiko}}'', 1995), [[Pole (artiste)|Pole]] (''1''<ref name="rodgers2003">{{article|lang=en|url=http://laurier.communicationstudies.ca/files/rodgers_sampling.pdf|format=pdf|année=2003|titre=On the process and aesthetics of sampling in electronic music production|auteur=Tara Rodgers|périodique=Organised Sound}}. 8(3): 313–320, Cambridge University Press.</ref>), [[Peter Rehberg|Pita]] (album ''{{lang|en|Seven Tons For Free}}'', 1996), Signal, snd, Jo Thomas<ref name="jothomas">{{chapitre|lang=en|url=http://www.uel.ac.uk/wwwmedia/schools/lss/Yearbook-2.pdf#page=89|titre=Jo Thomas: Electronic musicking, glitch and the digital Cyborg|prénom1=Charles|nom1=de Ledesma|titre ouvrage=Crossing Conceptual Boundaries II|passage=89-102|éditeur=University of East London|année=2010|consulté le=15 avril 2012}}.</ref> et Tone Rec (album ''{{lang|en|Pholcus}}'', 1998).


Les artistes notables et représentatifs des [[années 2000]] du genre incluent : @c (par exemple, le titre ''73'', extrait de l'album ''{{lang|en|Mus***** c}}''), [[Cyclo (groupe)|Cyclo]], Grischa Lichtenberger (''{{lang|en|~Treibgut}}'', 2009), Ihan (''{{lang|en|Clicks_+_Cuts}}''), Incite/, Kid 606, Kotra, Lacunae, [[Panacea]] (notamment le titre ''{{lang|en|Sinecore}}'' issu de l'album ''{{lang|en|Clicks_+_Cuts}}''), Pixel (notamment le titre ''{{nobr|+43° 39 25.60 -110° 42 10.10}}'' issu de l'album ''{{lang|en|The Drive}}'', 2009), Slipped Disk, [[Soap&Skin]], Ryoichi Kurokawa, Thomas Brinkmann (album ''{{lang|en|Klick}}''<ref name="samartzis"/>, 2000), Ten Data Keshin, et Vitor Joaquim.
A partir de 1996, le label allemand [[Raster-Noton]] créé par [[Carsten Nicolai]] (Alva Noto) et [[Olaf Bender]] (Byetone) propose des productions ''glitch'' à travers leurs propres œuvres et celles d'artistes comme [[Ryoji Ikeda]] ou [[Frank Bretschneider]]. Le premier album de Noto (ne signant pas encore sous son pseudonyme d'Alva Noto) - dénommé Spin - commence à creuser le genre ''glitch''.


Ceux des années 2010 incluent : Evala (par exemple, les titres ''{{lang|en|Crackink}}'' et ''{{lang|en|Hush}}'', extraits de l'album ''{{lang|en|Acoustic Bend}}''), Kabutogani (par exemple l'album ''{{lang|en|Bektop}}'' est un bel exemple de glitch radical), Ketem, Inaktera (par exemple l'album ''{{lang|en|Permutation.a}}''), Lauki, Monoiz (par exemple l'album ''{{lang|en|Multiplied Phoneme}}''), Plaster, Takeshi Kagamifuchi, et ToXic.aZ.SiD.
Il faut attendre néanmoins l'An 2000 pour que la compilation Clicks_+_Cuts du label [[Mille Plateaux (label)|Mille Plateaux]] fondé par [[Achim Szepanski]] impose le genre.


Les [[label discographique|labels discographiques]] représentatifs du genre incluent les labels allemands [[Mille Plateaux (label)|Mille Plateaux]]<ref name=glitch-allmusic/> (fondé par [[Achim Szepanski]]), et [[Raster-Noton]] (fondé par [[Carsten Nicolai]] et Olaf Bender) ; le label autrichien Mego ; le label américain 12k (fondé par Taylor Deupree) ; et le label japonais Atak.
== Éléments distinctifs du genre ==
=== Matériau sonore ===
Comme expliqué ci-dessus, le matériau sonore utilisé est à lui seul constitutif du genre.

=== Techniques de production ===
Le ''glitch'' est souvent produit par des ordinateurs utilisant des logiciels de production numérique servant à raccorder des ''cuts'' (petits [[Échantillon (musique)|échantillons]]) d'œuvres musicales déjà existantes. Ces ''cuts'' sont ensuite intégrés à la musique pour former des ''beats''. Ces ''cuts'' remplacent alors généralement les instruments de percussion traditionnels.

Les sons du ''glitch'' peuvent également être produits par des [[Disque compact|CD]] qui sautent, disques vinyles rayés, techniques de ''[[circuit bending]]''<ref name="HearingPureData">{{en}} [http://creative.canberra.edu.au/mitchell/papers/HearingPureData.pdf Hearing Pure Data: Aesthetics and Ideals of Data-Sound], par Mitchell Whitelaw</ref> et de ''[[data bending]]''<ref name="HearingPureData"/> ou autres bruits distordus. C'est de l'utilisation de ces défauts sonores que le genre tire son nom.

Les logiciels populaires pour créer du ''glitch'' incluent les ''trackers'' [[Ableton Live]], AudioMulch, Bidule, [[ChucK]], FLStudio, [[Max/MSP]], [[Pure Data]], [[Reaktor]], [[Reason (logiciel)|Reason]], Renoise, Super Collider et Usine.

== Éléments non distinctifs du genre ==
Contrairement à d'autres genres musicaux, le ''glitch'' ne se distingue pas par des cellules rythmiques particulières, ni même par une construction spécifique de ses compositions. Un nombre significatif se rapprochent néanmoins de la [[techno minimale]].

Le ''glitch'' n'est pas non plus attaché à un style vestimentaire ou comportemental, un mode de pensée, un lieu ou une circonstance particulière de diffusion.

Tout au plus est-il souvent associé à des projections vidéos minimalistes pilotées par les artistes eux-mêmes (voir notamment les spectacles d'[[Alva Noto]], [[Frank Bretschneider]] ou [[Ryoji Ikeda]]) ou grâce à l'intervention de [[VJ]].

==Artistes représentatifs==

===Années 1990===
{{début de colonnes|taille=17}}
* [[Alva Noto]] ([[Carsten Nicolai]])
* [[Aphex Twin]] ([[Richard D. James]])
* [[Autechre]]
* [[Byetone]] ([[Olaf Bender]])
* [[Frank Bretschneider]]
* [[Nicolas Collins]]
* [[Goem]]
* [[Ryoji Ikeda]]
* [[Oval (groupe)|Oval]]<ref>{{en}} [http://lib-ir.lib.sfu.ca/bitstream/1892/8961/1/b37692604.pdf Tick-Tick-Tick-Tick-Tick: Oval, the glitch and the utopian politics of noise] : Thèse de doctorat de James Brady Cranfield Rose (Simon Fraser University, 1999)</ref>
* [[Pan Sonic]] ([[Mika Vainio]] et [[Ilpo Väisänen]]) : notamment dans leur premier album ''Vaiko'' (1995)
* [[Pole (artiste)|Pole]] ([[Stefan Betke]]) : album ''1''<ref name="rodgers2003">{{en}} [http://laurier.communicationstudies.ca/files/rodgers_sampling.pdf On the process and aesthetics of sampling in electronic music production] par Tara Rodgers, in ''Organised Sound'' 8(3): 313–320, Cambridge University Press (2003)</ref>, 1998
* [[Peter Rehberg|Pita]] ([[Peter Rehberg]]) : son premier album ''Seven Tons For Free'' (1996) est caractéristique du genre
* [[Signal (groupe)|Signal]] ([[Carsten Nicolai]], [[Frank Bretschenider]], [[Olaf Bender]])
* [[snd (groupe)|snd]]
* [[Jo Thomas]]<ref name="jothomas">{{en}} {{Chapitre|url=http://www.uel.ac.uk/wwwmedia/schools/lss/Yearbook-2.pdf#page=89|titre=Jo Thomas: Electronic musicking, glitch and the digital Cyborg|prénom1=Charles|nom1=de Ledesma|titre ouvrage=Crossing Conceptual Boundaries II|passage=89-102|éditeur=University of East London|année=2010|consulté le=15 avril 2012}}</ref>
{{fin de colonnes}}

===Années 2000===
{{début de colonnes|taille=17}}
* [[@c]] (par exemple, le titre 73, extrait de l'album ''Mus***** c'')
* [[Cyclo (Groupe)|Cyclo]] ([[Ryoji Ikeda]] et [[Carsten Nicolai]]) : toute la producion du duo et notamment l'album ''Cyclo'' (2001, [[Raster-Noton]])
* [[Grischa Lichtenberger]] : notamment l'album ''~Treibgut'' (2009, [[Raster-Noton]])
* [[Ihan]] : notamment le titre Sans Titre No. 2 issu de l'album ''Clicks_+_Cuts'' (2000, [[Mille Plateaux]])
* [[Incite/]]
* [[Kid 606]] : notamment le titre Sonqizzmaster issu de l'album ''Clicks_+_Cuts'' (2000, [[Mille Plateaux]])
* [[Kotra]]
* [[Lacunae]]
* [[Panacea]] : notamment le titre Sinecore issu de l'album ''Clicks_+_Cuts'' (2000, [[Mille Plateaux]])
* [[Pixel (Musicien)|Pixel]] : notamment le titre « {{nobr|+43° 39 25.60 -110° 42 10.10}} », issu de l'album ''The Drive'' (2009, [[Raster-Noton]])
* [[Slipped Disk]]
* [[Soap&Skin]]
* [[Ryoichi Kurokawa]]
* [[Thomas Brinkmann]] : album ''Klick'', 2000<ref name="samartzis"/>
* [[Ten Data Keshin]]
* [[Vitor Joaquim]]
{{fin de colonnes}}

===Années 2010===
{{début de colonnes|taille=17}}
* [[Evala (groupe)|Evala]] (par exemple, les titres Crackink et Hush, extraits de l'album ''Acoustic Bend'')
* [[Kabutogani]] (l'album ''Bektop'' est un bel exemple de ''glitch'' radical)
* [[Ketem]]
* [[Inaktera]] (par exemple l'album ''Permutation.a'')
* [[Lauki]]
* [[Monoiz]] (par exemple, l'album ''Multiplied Phoneme'')
* Plaster (Italie)
* [[Takeshi Kagamifuchi]]
* [[ToXic.aZ.SiD]]
{{fin de colonnes}}

== Labels représentatifs ==

Une partie significative de la production issue des labels et sous-labels cités ci-dessous utilise une esthétique ''glitch''.
=== Allemagne ===
* [[Mille Plateaux (label)|Mille Plateaux]] (fondé par [[Achim Szepanski]])
* [[Raster-Noton]] (fondé par [[Carsten Nicolai]] et [[Olaf Bender]])
=== Autriche ===
* [[Editions Mego|Mego]]
=== États-Unis ===
* [[12k]] (fondé par [[Taylor Deupree]])
=== Japon ===
* [[Atak]]


== Genres connexes ==
== Genres connexes ==
Le ''glitch'' peut être confondu avec d'autres genres de musique électronique ou instrumentale.
Le glitch peut être confondu avec d'autres genres de [[musique électronique]] ou [[musique instrumentale|instrumentale]]. Les quatre appellations {{incise|microwave, DSP, sinecore et microscopic music}} sont considérées comme des synonymes de glitch<ref name="Cascone2000"/>.


=== Clicks and Cuts ===
=== Clicks and cuts ===
Parfois présenté comme un genre, le ''clicks and cuts'' (ou ''clicks & cuts'') est avant tout le titre d'une série de compilations proposée par le label [[Mille Plateaux]] depuis l'An 2000. La première édition de cette compilation s'appelle Clicks_+_Cuts<ref>[http://www.discogs.com/Various-Clicks__Cuts/release/3160 Clicks_+_Cuts] : détail de la compilation sur Discogs</ref>. Les éditions ultérieures ont été titrées Clicks & Cuts.
Le clicks and cuts (ou clicks & cuts) est considéré comme un [[genre musical]], mais il est avant tout le titre d'une série de compilations proposée par le label [[Mille Plateaux]] depuis l'an 2000<ref name=glitch-allmusic/>. La première édition de cette compilation s'appelle ''{{lang|en|Clicks_+_Cuts}}''<ref>{{lien web|lang=en|url=http://www.discogs.com/Various-Clicks__Cuts/release/3160|titre=''Clicks_+_Cuts''|site=[[Discogs]]|consulté le=25 mars 2012}}.</ref>. Les éditions ultérieures sont intitulées ''{{lang|en|Clicks & Cuts}}''. Néanmoins, une interprétation littérale du titre, tend en effet à décrire une production musicale composée de clics (au sens sonore du terme) et de brefs échantillons sonores. Il s'agirait alors d'une extension du genre glitch, théoriquement limité à des accidents sonores.

Néanmoins, une interprétation littérale du titre, tend en effet à décrire une production musicale composée de clics (au sens sonore du terme) et de brefs échantillons sonores ''(cuts)''. Il s'agirait alors d'une extension du genre ''glitch'', théoriquement limité à des accidents ''(failures)'' sonores.


=== Microsound ===
=== Microsound ===
Souvent utilisé comme synonyme de ''glitch'', le ''[[microsound]]'' désigne en fait un genre musical qui s'est structuré plus précocement que le ''glitch'' (au début des [[années 1960]]) et qui l'englobe. Le principe du ''microsound'' consiste à travailler à partir de sons très courts (de l'ordre de la milliseconde) qui sont utilisés soit isolément, soit agrégés pour créer de nouvelles textures sonores. Dans ce dernier cas, on parle alors de granularité sonore. Cette musique ne fait donc pas uniquement référence à des sons issus ou simulant les dysfonctionnements électroniques, mais s'empare de n'importe quel matériau sonore<ref name="PhilThomson2004">{{en}} [http://www.diapasongallery.org/PDFs/ThomsonPhil_AtomsAndErrors.pdf Atoms and Errors: Towards a History and Aesthetics of Microsound], par Phil Thomson, in ''Organised Sound 9'' {{numéro|2}} : 207-218</ref>. Le ''microsound'' est généralement dépourvu d'éléments rythmiques répétitifs ''(beats)''.
Le {{lien|microsound}}, souvent utilisé comme synonyme de glitch, désigne un [[genre musical]] structuré plus précocement que le glitch (au début des [[années 1960]]) et qui l'englobe. Le principe du microsound consiste à travailler à partir de sons très courts (de l'ordre de la milliseconde) qui sont utilisés soit isolément, soit agrégés pour créer de nouvelles textures sonores. Dans ce dernier cas, on parle alors de granularité sonore. Cette musique ne fait donc pas uniquement référence à des sons issus ou simulant les dysfonctionnements électroniques, mais s'empare de n'importe quel matériau sonore<ref name="PhilThomson2004">{{article|lang=en|url=http://www.diapasongallery.org/PDFs/ThomsonPhil_AtomsAndErrors.pdf|format=pdf|titre=Atoms and Errors: Towards a History and Aesthetics of Microsound|auteur=Phil Thomson|périodique=Organised Sound 9|numéro=2|année=.|page=207-218|consulté le=25 mars 2012}}.</ref>. Le microsound est généralement dépourvu d'éléments rythmiques répétitifs.


Théorisé à la fin des [[années 1950]], le ''microsound'' prend son essor avec les premiers [[mini-ordinateur]]s, ce qui explique qu'il est encore aujourd'hui fortement associé au milieu de la recherche universitaire<ref name="PhilThomson2004"/>. Milieu qui n'est pas toujours tendre, voir ignore les artistes ''glitch''<ref name="stephengard2004"/>.
Théorisé à la fin des [[années 1950]], le microsound prend son essor avec les premiers [[mini-ordinateur]]s, ce qui explique qu'il est encore aujourd'hui fortement associé au milieu de la recherche universitaire<ref name="PhilThomson2004"/>. Milieu qui n'est pas toujours tendre, voir ignore les artistes glitch<ref name="stephengard2004"/>. Parmi les compositeurs emblématiques de ce genre ou qui ont produit des œuvres fidèles aux principes du microsound, il faut compter avec Bernhard Guenter, [[Iannis Xenakis]], [[Karlheinz Stockhausen]], Kim Cascone, [[Oval (groupe)|Oval]], et Taylor Deupree<ref name="PhilThomson2004"/>.


=== Musique bruitiste ===
Parmi les compositeurs emblématiques de ce genre ou qui ont produit des œuvres fidèles aux principe du ''microsound'', il faut compter avec [[Bernhard Guenter]], [[Iannis Xenakis]], [[Karlheinz Stockhausen]], [[Kim Cascone]], [[Oval (groupe)|Oval]] et [[Taylor Deupree]]<ref name="PhilThomson2004"/>.
La [[musique bruitiste]] est certes construite à partir de {{citation|saletés}} (électroniques ou instrumentales) mais plus longues que dans le glitch, souvent soutenues dans le temps. L'un des représentants emblématiques du genre est le Japonais [[Merzbow]]<ref name="stephengard2004">{{lien web|lang=en|url=http://ses.library.usyd.edu.au/handle/2123/894|titre=Nasty Noises: ‘Error’ as a Compositional Element|auteur=Stephen Gard|lieu=[[Université de Sydney]]|date=2004|consulté le=25 mars 2012}}.</ref>.


== Notes et références ==
=== Microwave, DSP, sinecore, microscopic music ===
{{références|colonnes=2}}
Ces quatre appellations sont considérées comme étant des synonymes de ''glitch''<ref name="Cascone2000"/>.


=== Noise ===
== Bibliographie ==
* {{en}} Andrews, Ian, ''[http://ian-andrews.org/texts/postdig.html Post-digital Aesthetics and the return to Modernism]'', MAP-uts lecture, 2000.
La ''noise music'' (en français [[musique bruitiste]]) est certes construite à partir de « saletés » (électroniques ou instrumentales) mais plus longues que dans le ''glitch'', souvent soutenues dans le temps. L'un des représentants emblématique du genre est le japonais [[Merzbow]]<ref name="stephengard2004">{{en}} [http://ses.library.usyd.edu.au/handle/2123/894 Nasty Noises: ‘Error’ as a Compositional Element], mémoire de Stephen Gard, Université de Sydney (2004)</ref>.
* {{en}} Bijsterveld, Karin and Trevor J. Pinch. '' 'Should One Applaud?': Breaches and Boundaries in the Reception of New Technology in Music.'' ''Technology and Culture''. Ed. 44.3, pp. 536–559. 2003.

* {{en}} Byrne, David. ''What is Blip Hop?'' ''Lukabop'', 2002. Available [http://www.luakabop.com/comparativesound/whatis/whatis.htm here.]
== Références ==
* {{en}} Collins, Adam, ''Sounds of the system: the emancipation of noise in the music of Carsten Nicolai'', ''Organised Sound'', 13(1): 31–39. 2008. Cambridge University Press.
{{Références|colonnes=2}}
* {{en}} Collins, Nicolas. Editor. ''Composers inside Electronics: Music after David Tudor.'' ''Leonardo Music Journal''. Vol. 14, pp. 1–3. 2004.

* {{en}} Krapp, Peter, [http://www.upress.umn.edu/book-division/books/noise-channels Noise Channels: Glitch and Error in Digital Culture]. Minneapolis: University of Minnesota Press 2011.
== Voir aussi ==
* {{en}} Prior, Nick, ''Putting a Glitch in the Field: Bourdieu, Actor Network Theory and Contemporary Music'', ''Cultural Sociology'', 2: 3, 2008 : pp. 301–319.

* {{en}} Thomson, Phil, ''Atoms and errors: towards a history and aesthetics of microsound'', ''Organised Sound'', 9(2): 207–218. 2004. Cambridge University Press.
=== Articles connexes ===
* {{en}} Sangild, Torben : [http://groveloejer.dk/sangild/wiki/index.php?title=Glitch#.22Glitch_-_The_Beauty_of_Malfunction.22 ''Glitch—The Beauty of Malfunction''], ''Bad Music''. Routledge (2004, {{ISBN|0-415-94365-5}})
* [[Glitch art]]
* {{en}} Young, Rob : ''Worship the Glitch'', ''The Wire'' 190/191 (2000)
* {{en}} Noah Zimmerman, [http://www.dustedmagazine.com/reviews/59 ''Dusted Reviews, 2002'']


{{Palette|Musique électronique}}
{{Palette|Musique électronique}}
{{Portail|musique électronique|Allemagne}}
{{Portail|musique électronique|Allemagne}}


[[Catégorie:Style de techno]]
[[Catégorie:Glitch|*]]
[[Catégorie:Genre de musique électronique]]
[[Catégorie:Genre de musique électronique]]
[[Catégorie:Electronica]]
[[Catégorie:Electronica]]
[[Catégorie:Glitch|*]]

Dernière version du 7 février 2024 à 19:52

Glitch
Origines stylistiques IDM, electro, chiptune, musique industrielle, synthpop
Origines culturelles milieux des années 1990 Allemagne
Instruments typiques matériel informatique (technique de circuit bending), logiciel (Ableton Live), audiomulch, AudioSculpt[1], ChucK, CLAM/SMS[1], Jeskola Buzz, Max/MSP[1], Pure Data[1], Reaktor, Reason, Super Collider
Popularité Faible. Underground aux États-Unis et en Europe, en particulier en Allemagne, en Suède[2] et au Japon
Voir aussi Glitch art

Genres dérivés

Complextro, glitch-hop

Le glitch est un genre de musique électronique expérimentale ayant émergé au milieu des années 1990. Stricto sensu, le mot « glitch » désigne une brusque augmentation de tension provenant du dysfonctionnement (failure) d'un dispositif électrique ou électronique. Les sons produits par ces phénomènes sont utilisés comme matériau sonore de compositions musicales. En ce sens, le glitch est plus une esthétique[1] qu'un genre musical à proprement parler.

Par extension, l'esthétique glitch se caractérise par un usage délibéré de « défauts » sonores, qu'ils résultent notamment du dysfonctionnement de dispositifs électroniques, de l'utilisation détournée des technologies numériques de production ou de traitement sonore, du collage d'échantillons sonores tronqués, du bruit de CD ou de disques vinyles qui sautent[3]. L'esthétique glitch est plus ou moins présente au sein des compositions qui se réclament du genre. Certaines, que l'on pourrait qualifier de « radicales », n'utilisent que ces défauts sonores. Mais de nombreux artistes exploitent ces matériaux au sein d'œuvres plus traditionnelles, synthétiques ou hybrides (acoustique/synthétique). Parmi les artistes populaires qui utilisent intensément ces matériaux, on trouve Alva Noto (Carsten Nicolai), Pole (Stefan Betke), Richard Devine et Ryoji Ikeda.

Histoire[modifier | modifier le code]

Origines[modifier | modifier le code]

Les origines de l'esthétique glitch remontent au début du XXe siècle, avec le manifeste futuriste de Luigi Russolo, L'Art des bruits (publié en 1913), à la base de la musique bruitiste. En 1922, dans son essai Production-Reproduction, le peintre László Moholy-Nagy suggère de transformer le gramophone en instrument de production de son en altérant manuellement la surface des disques plats[4]. En 1965, l'artiste tchèque Milan Knížák utilise, lors de performances sonores, des disques brisés ou altérés par des trous, des rayures, etc.[5]. En 1979, le compositeur et plasticien américain Christian Marclay, en mal de batteur, commence à utiliser des disques vinyles rayés pour lui servir de base rythmique[6].

En 1985, le compositeur japonais Yasunao Tone compose un collage sonore à partir du son de CD « préparés » (petits bouts de Scotch collés à la surface du disque) pour accompagner la suite Techno Eden de la chorégraphe Kay Nishikawa[7]. Volontairement tournée vers des performances live, sa technique ne sera disponible à l'écoute qu'en 1995 sur un album intitulé Solo for Wounded CD[8]. En 1988, le compositeur Nicolas Collins commence de son côté à travailler sur des lecteurs de CD « préparés » (suppression notamment des circuits de correction d'erreur). Les sons obtenus se rapprochent de ceux obtenus par Yasunao Tone[8]. En 1992, l'album It Was a Dark and Stormy Night de Nicolas Collins comprend une composition de quatuor à cordes jouant aux côtés de sons de CD qui sautent[9].

Affirmation du mouvement[modifier | modifier le code]

En 1993, l'album Wohnton du groupe allemand Oval[2], contribue à la construction esthétique du genre (malgré un chant farouchement pop) par son échantillonnage des sauts de CD (très présents sur le titre AllesinGedanken). Les albums suivants - Systemisch et 94diskont - respectivement sortis en 1994 et 1995 prennent un tour beaucoup plus minimal et instrumental. Systemisch fut entièrement composé à partir d'extraits du CD Selected Ambient Works Volume II d'Aphex Twin, volontairement altéré par des dessins réalisés au stylo feutre[10]. À partir de 1995, l'éclatement des pratiques se fait sentir. Le label autrichien Mego encourage à la fois l'usage des techniques d'échantillonnage glitch et de séquençage sonore mais aussi d'usages détournés des logiciels de production sonore, voire de développements spécifiques, sans parler des techniques de Databending. Des artistes comme Fennesz, Florian Hecker ou Pita font leurs premières armes[8]. À partir de 1996, le label allemand Raster-Noton créé par Carsten Nicolai (Alva Noto) et Olaf Bender (Byetone) propose des productions glitch à travers leurs propres œuvres et celles d'artistes comme Ryoji Ikeda ou Frank Bretschneider. Le premier album de Noto (ne signant pas encore sous son pseudonyme d'Alva Noto) - dénommé Spin - commence à creuser le genre glitch. Il faut attendre néanmoins l'an 2000 pour que la compilation Clicks_+_Cuts du label allemand Mille Plateaux fondé par Achim Szepanski impose le genre.

Caractéristiques[modifier | modifier le code]

Le matériau sonore utilisé est à lui seul constitutif du genre. Le glitch est souvent produit par des ordinateurs utilisant des logiciels de production numérique servant à raccorder des cuts (petits échantillons) d'œuvres musicales déjà existantes. Ces cuts sont ensuite intégrés à la musique pour former des beats. Ces cuts remplacent alors généralement les instruments de percussion traditionnels. Les sons du glitch peuvent également être produits par des CD qui sautent, disques vinyles rayés, techniques de circuit bending[11] et de Databending[11] ou autres bruits distordus. C'est de l'utilisation de ces défauts sonores que le genre tire son nom. Les logiciels populaires pour créer du glitch incluent les trackers Ableton Live, AudioMulch, Bidule, ChucK, FL Studio, Max/MSP, Pure Data, Reaktor, Reason, Renoise, Super Collider, et Usine.

Contrairement à d'autres genres musicaux, le glitch ne se distingue pas par des cellules rythmiques particulières, ni même par une construction spécifique de ses compositions. Un nombre significatif se rapprochent néanmoins de la techno minimale, le rendant ainsi plus « écoutable ». « [...] est-ce que cela doit être regrettable ou encensé ? Avec l'aide du beat, l'organisateur du bruit affine le message. Le beat peut mettre en évidence l'esthétique du bruit. Il peut rendre la ‘dureté’ agréable : ‘la pulsation équivaut à la vie, équivaut au plaisir’ »[12]. Le glitch n'est pas non plus attaché à un style vestimentaire ou comportemental, un mode de pensée, un lieu ou une circonstance particulière de diffusion. Tout au plus est-il souvent associé à des projections vidéos minimalistes pilotées par les artistes eux-mêmes (voir notamment les spectacles d'Alva Noto, Frank Bretschneider ou Ryoji Ikeda) ou grâce à l'intervention de VJ.

Dans un manifeste écrit en 1995, Achim Szepanski (fondateur du label Mille Plateaux), insiste sur la nécessité pour les créateurs de pousser les frontières des logiciels de production audionumériques, notamment en refusant les réglages d'usine, les sons prêts-à-l'emploi. « [...] les standards PEUVENT ET DOIVENT être transformés. [...] Les machines sonores qui sont plus que des ordinateurs produisent des effets musicaux quand elles sont pilotées par des proto subjectivités. [...] Les clics, glitches et les soi-disant erreurs deviennent des sons. Les événements sonores deviennent audibles par arrangement. Le couper-copier-coller-funk des sons considérés comme les moins pertinents, les clics, émergent ; le mouvement de 0 et de 1 devenu audible. Les clics sont une valeur, la monnaie, loi, communication et son du médial lui-même. Ils sont l'introduction dans le minimalisme du XXe siècle, un outil pour le nouveau millénaire[13]. »

Dans un article du Computer Music Journal publié en 2000, le compositeur et écrivain Kim Cascone (en) classe le glitch comme un sous-genre de musique électronique et utilise le terme de « post-numérique » (post-digital) pour décrire l'esthétique glitch[14]. Il ne faut pas comprendre ici qu'il s'agit d'une musique qui vient « après » le numérique (avec une notion de rupture) mais bien d'une musique qui en découle[15]. Il est même également probable que le glitch soit un « métagenre » en ce qu'il s'appuie sur des problématiques inhérentes aux technologies utilisées pour produire ce son numériquement : les dysfonctionnements (failures). Dans le même article, Kim Cascone considère que « l'esthétique post-numérique fut développée à la suite d'expériences immersives [des artistes], dues au fait de travailler dans un environnement imprégné de technologie numérique : la soufflerie des systèmes de ventilation des ordinateurs, les imprimantes laser extrayant des documents, la “sonification” des interfaces logicielles et les bruits étouffés des disques durs. Mais plus spécifiquement, ce sont des dysfonctionnements de la technologie numérique que ce nouveau travail a émergé [...]. » Et d'ajouter que « la plupart des outils audio[numériques] peuvent zoomer sur les erreurs, permettant aux compositeurs d'en faire le cœur de leur travail[14]. »

Artistes et labels[modifier | modifier le code]

Les artistes notables et représentatifs des années 1990 du genre incluent : Alva Noto, Aphex Twin[2], Autechre[2], Byetone (Olaf Bender), Frank Bretschneider, Nicolas Collins, Goem, Ryoji Ikeda, Oval[16], Pan Sonic (Mika Vainio et Ilpo Väisänen ; notamment dans leur premier album Vaiko, 1995), Pole (1[17]), Pita (album Seven Tons For Free, 1996), Signal, snd, Jo Thomas[18] et Tone Rec (album Pholcus, 1998).

Les artistes notables et représentatifs des années 2000 du genre incluent : @c (par exemple, le titre 73, extrait de l'album Mus***** c), Cyclo, Grischa Lichtenberger (~Treibgut, 2009), Ihan (Clicks_+_Cuts), Incite/, Kid 606, Kotra, Lacunae, Panacea (notamment le titre Sinecore issu de l'album Clicks_+_Cuts), Pixel (notamment le titre +43° 39 25.60 -110° 42 10.10 issu de l'album The Drive, 2009), Slipped Disk, Soap&Skin, Ryoichi Kurokawa, Thomas Brinkmann (album Klick[4], 2000), Ten Data Keshin, et Vitor Joaquim.

Ceux des années 2010 incluent : Evala (par exemple, les titres Crackink et Hush, extraits de l'album Acoustic Bend), Kabutogani (par exemple l'album Bektop est un bel exemple de glitch radical), Ketem, Inaktera (par exemple l'album Permutation.a), Lauki, Monoiz (par exemple l'album Multiplied Phoneme), Plaster, Takeshi Kagamifuchi, et ToXic.aZ.SiD.

Les labels discographiques représentatifs du genre incluent les labels allemands Mille Plateaux[2] (fondé par Achim Szepanski), et Raster-Noton (fondé par Carsten Nicolai et Olaf Bender) ; le label autrichien Mego ; le label américain 12k (fondé par Taylor Deupree) ; et le label japonais Atak.

Genres connexes[modifier | modifier le code]

Le glitch peut être confondu avec d'autres genres de musique électronique ou instrumentale. Les quatre appellations — microwave, DSP, sinecore et microscopic music — sont considérées comme des synonymes de glitch[1].

Clicks and cuts[modifier | modifier le code]

Le clicks and cuts (ou clicks & cuts) est considéré comme un genre musical, mais il est avant tout le titre d'une série de compilations proposée par le label Mille Plateaux depuis l'an 2000[2]. La première édition de cette compilation s'appelle Clicks_+_Cuts[19]. Les éditions ultérieures sont intitulées Clicks & Cuts. Néanmoins, une interprétation littérale du titre, tend en effet à décrire une production musicale composée de clics (au sens sonore du terme) et de brefs échantillons sonores. Il s'agirait alors d'une extension du genre glitch, théoriquement limité à des accidents sonores.

Microsound[modifier | modifier le code]

Le microsound (en), souvent utilisé comme synonyme de glitch, désigne un genre musical structuré plus précocement que le glitch (au début des années 1960) et qui l'englobe. Le principe du microsound consiste à travailler à partir de sons très courts (de l'ordre de la milliseconde) qui sont utilisés soit isolément, soit agrégés pour créer de nouvelles textures sonores. Dans ce dernier cas, on parle alors de granularité sonore. Cette musique ne fait donc pas uniquement référence à des sons issus ou simulant les dysfonctionnements électroniques, mais s'empare de n'importe quel matériau sonore[15]. Le microsound est généralement dépourvu d'éléments rythmiques répétitifs.

Théorisé à la fin des années 1950, le microsound prend son essor avec les premiers mini-ordinateurs, ce qui explique qu'il est encore aujourd'hui fortement associé au milieu de la recherche universitaire[15]. Milieu qui n'est pas toujours tendre, voir ignore les artistes glitch[20]. Parmi les compositeurs emblématiques de ce genre ou qui ont produit des œuvres fidèles aux principes du microsound, il faut compter avec Bernhard Guenter, Iannis Xenakis, Karlheinz Stockhausen, Kim Cascone, Oval, et Taylor Deupree[15].

Musique bruitiste[modifier | modifier le code]

La musique bruitiste est certes construite à partir de « saletés » (électroniques ou instrumentales) mais plus longues que dans le glitch, souvent soutenues dans le temps. L'un des représentants emblématiques du genre est le Japonais Merzbow[20].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e et f (en) Kim Cascone, « The Aesthetics Of Failure: 'Post-Digital' Tendencies in Contemporary Computer Music », Computer Music Journal, MIT Press, (consulté le ). 24:4.
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Bibliographie[modifier | modifier le code]

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