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Le '''''rendaku''''' (連濁, littéralement "voix-groupe") est un phénomène [[morphologie|morphologique]] du [[japonais]] qui contrôle le [[voisement]] de la [[consonne]] initiale des composants non-initiaux des mots [[mot composé|composés]] ou [[préfixe|préfixés]]. Le ''rendaku'' est un phénomène fréquent mais imprévisible en japonais moderne. Il est aussi connu sous le nom de '''voisement séquentiel'''.

Le {{japonais|'''''rendaku'''''|連濁||[[voisement]] successif}} est un phénomène [[Morphologie (linguistique)|morphologique]] du [[japonais]] qui consiste à [[voisement|voiser]] la [[consonne]] initiale des composants non initiaux des mots [[mot composé|composés]] ou [[préfixe (linguistique)|préfixés]]. Le ''rendaku'' est un phénomène fréquent mais imprévisible en japonais moderne. Il est aussi connu sous le nom de '''voisement séquentiel'''.


On peut constater le ''rendaku'' dans les exemples suivants :
On peut constater le ''rendaku'' dans les exemples suivants :
* [hito] + [hito] > [hitobito] ("personne" + "personne""les gens")
* [''hito''] + [''hito''] > [''hitobito''] (« personne » + « personne »« les gens ») ;
* [te] + [kami] > [tegami] ("main" + "papier""lettre")
* [''te''] + [''kami''] > [''tegami''] (« main » + « papier »« lettre » [message]).


Si le ''rendaku'' était purement [[phonologie|phonologique]], ses occurences seraient tout aussi prédictibles qu'explicables par la phonologie. Mais apparement, le ''rendaku'' est de nature morphologique, puisqu'il ne s'applique qu'à la limite entre deux groupes de [[morphème]]s. Encore plus fort, il ne s'applique pas dans tous les cas où on s'y attendrait. De plus, il n'y a pas de pertinence à ce que la première consonne de la seconde partie d'un mot composé soit voisée, phénomène qui n'est donc dû qu'aux conventions du rendaku.
Si le ''rendaku'' était purement [[phonologie|phonologique]], ses occurrences seraient systématiques et prédictibles par un ensemble de règles phonologiques. Mais le ''rendaku'' est aussi de nature morphologique, puisqu'il ne s'applique qu'à la limite entre deux groupes de [[morphème]]s. Le ''rendaku'' ne s'applique d'ailleurs pas dans tous les cas où on s'y attendrait, certains exemples montrant même qu'il n'y a parfois aucune autre règle que l'usage habituel.


==Propriétés qui empêchent le ''rendaku''==
== Propriétés qui empêchent le ''rendaku'' ==


Les recherches concernant le champ d'application du ''rendaku'' se sont surtout limitées aux cas où il ne s'applique pas.
Les recherches concernant le champ d'application du ''rendaku'' se sont surtout limitées aux cas où il ne s'applique pas.


===Loi de Lyman===
=== Loi de Lyman ===
Les conditions les plus connues qui empêchent le ''rendaku'' sont connues sous le nom de "loi de Lyman" (bien que le phénomène fut à l'origine découvert par Motoori Norinaga au {{s|XVIII|e}}), qui conclut que le ''rendaku'' ne s'applique pas si la seconde consonne du second élément est une [[obstruante]] [[voisement|voisée]]. Cette règle fut généralisée pour affirmer que si le second élément contient une obstruante voisée, où qu'elle soit, alors le ''rendaku'' ne s'applique pas. Cette loi est considérée comme l'une des règles fondamentales du ''rendaku''.
Les conditions les plus connues qui empêchent le ''rendaku'' sont connues sous le nom de « loi de Lyman » (bien que le phénomène fut à l'origine découvert par [[Motoori Norinaga]] au {{s-|XVIII}}), qui conclut que le ''rendaku'' ne s'applique pas si la seconde consonne du second élément est une [[Consonne_obstruante|obstruante]] [[voisement|voisée]]. Cette règle fut généralisée pour affirmer que si le second élément contient une obstruante voisée, où qu'elle soit, alors le ''rendaku'' ne s'applique pas. Cette loi est considérée comme l'une des règles fondamentales du ''rendaku''.


* [yama] + [kaji] > [yamakaji], et non *[yamagaji] ("montagne" + "feu" > "volcan")
* [''Yama''] + [''kaji''] > [''yamakaji''], et non *[''yamagaji''] (« montagne » + « incendie » > « feu de forêt »).
* [hitori] + [tabi] > [hitoritabi], et non *[hitoridabi] ("une personne" + "voyage" > "seul")
* [''Hitori''] + [''tabi''] > [''hitoritabi''], et non *[''hitoridabi''] (« une personne » + « voyage » > « seul »).
* [tsuno] + [tokage] > [tsunotokage], et non *[tsunodokage] ("corne" + "lézard" > "lézard à corne")
* [''Tsuno''] + [''tokage''] > [''tsunotokage''], et non *[''tsunodokage''] (« corne » + « lézard » > « lézard à corne »).


===Propriétés lexicales===
===Propriétés lexicales===
De manière similaire à la loi de Lyman, on a découvert que pour certains [[lexème]]s, le ''rendaku'' ne se manifeste pas s'il y a une consonne obstruante voisée près de la limite morphémique, que la consonne se situe avant ou après la limite.
De manière similaire à la loi de Lyman, on a découvert que pour certains [[lexème]]s, le ''rendaku'' ne se manifeste pas s'il y a une consonne obstruante voisée près de la limite morphémique, que la consonne se situe avant ou après la limite.


Certains lexèmes tendent à résister au ''rendaku'' quelle que soit leurs conditions, d'autres tendent à l'accepter.
Certains lexèmes tendent à résister au ''rendaku'' quelles que soient leurs conditions, d'autres tendent à l'accepter.


Le ''rendaku'' se manifeste aussi dans les mots sino-japonais (mots japonais d'origine chinoise), mais assez rarement. Cela dépend du degré de [[lexicalisation]] du terme.
Le ''rendaku'' se manifeste aussi dans les mots sino-japonais (mots japonais d'origine chinoise), mais assez rarement. Cela dépend du degré de [[lexicalisation]] du terme.


* [kabushiki] + [kaisha] > [kabushikigaisha] ("stock" + "société" > "corporation")
* [''Kabushiki''] + [''kaisha''] > [''kabushikigaisha''] (« stock » + « société » > « corporation »).
* [aisu] + [kōhii] > [aisukōhii], et pas *[aisugōhii] ("glace" + "café" > "café glacé")


===Propriétés [[sémantique]]s===
=== Propriétés sémantiques ===
Le ''rendaku'' tend aussi à ne pas se manifester dans les composés signifiant "A et B" (appelés [[dvandva]]s)
Le ''rendaku'' tend aussi à ne pas se manifester dans les composés signifiant « A et B » (appelés ''[[dvandva]]s'').


* [yama] + [kawa] > [yamakawa] "montagnes et rivières"
* [''Yama''] + [''kawa''] > [''yamakawa''] > « montagnes et rivières ».
* À comparer avec [yama] + [kawa] > [yamagawa] "rivière de montagne"


* À comparer avec [''yama''] + [''kawa''] > [''yamagawa''] > « rivière de montagne ».
===Contraintes multiples (d'embranchement)===

=== Contraintes multiples (d'embranchement) ===
Enfin, le ''rendaku'' est aussi bloqué par ce qu'on appelle les contraintes d'embranchement. Le phénomène est effectivement bloqué au sein du second élément d'un composé non initial.
Enfin, le ''rendaku'' est aussi bloqué par ce qu'on appelle les contraintes d'embranchement. Le phénomène est effectivement bloqué au sein du second élément d'un composé non initial.


* [mon] + ([shiro + chō]) > [monshirochō], et non *[monjirochō] ("marque familiale" + {"blanc" + "papillon"} > "papillon du choux")
* [''Mon''] + ([''shiro'' + ''chō'']) > [''monshirochō''], et non *[''monjirochō''] (« marque familiale » + {« blanc » + « papillon »} > « papillon du chou »).

but
Mais :
* ([o] + [shiro]) + [washi] > [ojirowashi] ({"queue" + "blanc"} + "aigle" > "aigle à queue blanche")
* ([''O''] + [''shiro'']) + [''washi''] > [ojirowashi] ({« queue » + « blanc »} + « aigle » > « aigle à queue blanche »)

== Pour aller plus loin ==
Malgré le nombre important de règles formulées ci-dessus pour expliquer les occurrences du ''rendaku'', il existe encore de nombreux mots où celui-ci est imprédictible. Certains cas sont liés à des propriétés lexicales, comme énoncé précédemment, mais d'autres obéissent à des lois qui restent à découvrir. Par conséquent, le ''rendaku'' reste partiellement aléatoire, allant même jusqu'à poser des problèmes aux Japonais natifs, surtout dans les [[nom propre|noms propres]], où le ''rendaku'' se montre assez capricieux. Un certain nombre de noms sont écrits de manière identique mais appliquent ou non le ''rendaku'', selon les personnes ; par exemple, 中田 peut être lu de nombreuses manières, dont « Nakata » et « Nakada ».

=== Autres exemples ===

On peut trouver des exemples en japonais qui tendent à prouver qu'il n'existe pas de système complet de règles pour déterminer l'utilisation ou non du ''rendaku''.

En particulier, les deux particules pour compter, 回 et 階, se prononcent {{japonais|''kai''|かい}} exactement de la même façon, mais on dit :
* {{japonais|''Sangai''|三階/さんがい}} : utilisation du ''rendaku'' ;
* {{japonais|''Sankai''|三回/さんかい}} : pas de ''rendaku''.

Cet exemple montre que l'utilisation ou non du ''rendaku'' est un problème au cas par cas, déterminé au moins autant par l'usage que par un ensemble de règles bien établies.


==Pour aller plus loin==
== Voir aussi ==
=== Bibliographie ===
Malgré le nombre important de règles formulées ci-dessus pour expliquer les occurences du ''rendaku'', il existe encore de nombreux mots où celui-ci est imprédictible. Certains cas sont liés à des propriétés lexicales, comme énoncé précédemment, mais d'autres obéissent à des lois qui restent à découvrir. Par conséquent, le ''rendaku'' reste partiellemnt aléatoire, allant même jusqu'à poser des problèmes aux japonais natifs, surtout dans les [[nom propre|noms propres]], où le ''rendaku'' se montre assez capricieux. Un certain nombre de noms sont écrits de manière identique mais appliquent ou non le ''rendaku'', selon les personnes ; par exemple, 中田 peut être lu de nombreuses manières, dont Nakata et Nakada.
* Haruo Kubozono, ''{{Langue|en|Voicing in Japanese}}'' (voir liens externes).
* Masayoshi Shibatani, ''{{Langue|en|The Languages of Japan}}'', {{Langue|en|Cambridge University Press}}, 1990, p. 173-175.


=== Articles connexes ===
==Voir aussi==
* [[Japonais]]
===Références===
* [[Lénition]]
* Haruo Kubozono : ''Voicing in Japanese'' (voir liens externes)
* [[Mutation consonantique]]
* Masayoshi Shibatani : ''Les langues du Japon'', p. 173-175.


===Articles connexes===
=== Liens externes ===
* {{en}} [http://www.let.leidenuniv.nl/ulcl/faculty/vdweijer/jvoice/ ''{{Langue|en|Voicing in Japanese}}'']
*[[Lénition]]
* [http://www.thbz.org/kanjimots/html/annexes.html ''Du Kanji aux mots - Annexes'']
*[[Loi de Lyman]]
*[[Japonais]]


{{Portail|langues|Japon}}
===Liens externes===
*[http://www.let.leidenuniv.nl/ulcl/faculty/vdweijer/jvoice/ ''Voicing in Japanese'']


[[Catégorie:Linguistique]]
[[Catégorie:Grammaire du japonais]]
[[Catégorie:Phonétique des consonnes]]
[[en:Rendaku]]
[[Catégorie:Morphophonologie]]
[[ja:連濁]]

Dernière version du 10 avril 2023 à 03:43

Le rendaku (連濁?, voisement successif) est un phénomène morphologique du japonais qui consiste à voiser la consonne initiale des composants non initiaux des mots composés ou préfixés. Le rendaku est un phénomène fréquent mais imprévisible en japonais moderne. Il est aussi connu sous le nom de voisement séquentiel.

On peut constater le rendaku dans les exemples suivants :

  • [hito] + [hito] > [hitobito] (« personne » + « personne » → « les gens ») ;
  • [te] + [kami] > [tegami] (« main » + « papier » → « lettre » [message]).

Si le rendaku était purement phonologique, ses occurrences seraient systématiques et prédictibles par un ensemble de règles phonologiques. Mais le rendaku est aussi de nature morphologique, puisqu'il ne s'applique qu'à la limite entre deux groupes de morphèmes. Le rendaku ne s'applique d'ailleurs pas dans tous les cas où on s'y attendrait, certains exemples montrant même qu'il n'y a parfois aucune autre règle que l'usage habituel.

Propriétés qui empêchent le rendaku[modifier | modifier le code]

Les recherches concernant le champ d'application du rendaku se sont surtout limitées aux cas où il ne s'applique pas.

Loi de Lyman[modifier | modifier le code]

Les conditions les plus connues qui empêchent le rendaku sont connues sous le nom de « loi de Lyman » (bien que le phénomène fut à l'origine découvert par Motoori Norinaga au XVIIIe siècle), qui conclut que le rendaku ne s'applique pas si la seconde consonne du second élément est une obstruante voisée. Cette règle fut généralisée pour affirmer que si le second élément contient une obstruante voisée, où qu'elle soit, alors le rendaku ne s'applique pas. Cette loi est considérée comme l'une des règles fondamentales du rendaku.

  • [Yama] + [kaji] > [yamakaji], et non *[yamagaji] (« montagne » + « incendie » > « feu de forêt »).
  • [Hitori] + [tabi] > [hitoritabi], et non *[hitoridabi] (« une personne » + « voyage » > « seul »).
  • [Tsuno] + [tokage] > [tsunotokage], et non *[tsunodokage] (« corne » + « lézard » > « lézard à corne »).

Propriétés lexicales[modifier | modifier le code]

De manière similaire à la loi de Lyman, on a découvert que pour certains lexèmes, le rendaku ne se manifeste pas s'il y a une consonne obstruante voisée près de la limite morphémique, que la consonne se situe avant ou après la limite.

Certains lexèmes tendent à résister au rendaku quelles que soient leurs conditions, d'autres tendent à l'accepter.

Le rendaku se manifeste aussi dans les mots sino-japonais (mots japonais d'origine chinoise), mais assez rarement. Cela dépend du degré de lexicalisation du terme.

  • [Kabushiki] + [kaisha] > [kabushikigaisha] (« stock » + « société » > « corporation »).

Propriétés sémantiques[modifier | modifier le code]

Le rendaku tend aussi à ne pas se manifester dans les composés signifiant « A et B » (appelés dvandvas).

  • [Yama] + [kawa] > [yamakawa] > « montagnes et rivières ».
  • À comparer avec [yama] + [kawa] > [yamagawa] > « rivière de montagne ».

Contraintes multiples (d'embranchement)[modifier | modifier le code]

Enfin, le rendaku est aussi bloqué par ce qu'on appelle les contraintes d'embranchement. Le phénomène est effectivement bloqué au sein du second élément d'un composé non initial.

  • [Mon] + ([shiro + chō]) > [monshirochō], et non *[monjirochō] (« marque familiale » + {« blanc » + « papillon »} > « papillon du chou »).

Mais :

  • ([O] + [shiro]) + [washi] > [ojirowashi] ({« queue » + « blanc »} + « aigle » > « aigle à queue blanche »)

Pour aller plus loin[modifier | modifier le code]

Malgré le nombre important de règles formulées ci-dessus pour expliquer les occurrences du rendaku, il existe encore de nombreux mots où celui-ci est imprédictible. Certains cas sont liés à des propriétés lexicales, comme énoncé précédemment, mais d'autres obéissent à des lois qui restent à découvrir. Par conséquent, le rendaku reste partiellement aléatoire, allant même jusqu'à poser des problèmes aux Japonais natifs, surtout dans les noms propres, où le rendaku se montre assez capricieux. Un certain nombre de noms sont écrits de manière identique mais appliquent ou non le rendaku, selon les personnes ; par exemple, 中田 peut être lu de nombreuses manières, dont « Nakata » et « Nakada ».

Autres exemples[modifier | modifier le code]

On peut trouver des exemples en japonais qui tendent à prouver qu'il n'existe pas de système complet de règles pour déterminer l'utilisation ou non du rendaku.

En particulier, les deux particules pour compter, 回 et 階, se prononcent kai (かい?) exactement de la même façon, mais on dit :

  • Sangai (三階/さんがい?) : utilisation du rendaku ;
  • Sankai (三回/さんかい?) : pas de rendaku.

Cet exemple montre que l'utilisation ou non du rendaku est un problème au cas par cas, déterminé au moins autant par l'usage que par un ensemble de règles bien établies.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Haruo Kubozono, Voicing in Japanese (voir liens externes).
  • Masayoshi Shibatani, The Languages of Japan, Cambridge University Press, 1990, p. 173-175.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]